Le rachat de Swiss n’enflamme guère la presse
Les journaux saluent sans enthousiasme le rachat entériné mardi de la compagnie nationale par l’Allemande Lufthansa.
Aux yeux de la presse, aucune alternative ne s’offrait à Swiss, empêtrée dans ses difficultés. Mais la critique sur les erreurs du passé n’est pas absente des commentaires.
Après le départ de feu Swissair de l’aéroport de Genève, après le rachat par l’Allemagne et les trois milliards injectés dans l’aventure depuis 2002, le quotidien Le Matin ne voit qu’un seul commentaire capable de rendre compte de «cette compagnie qui quitte Zurich pour Francfort: bon débarras». Désormais Swiss et la Suisse, cela fait deux…
Voilà pour le raz le bol. Pour autant, la presse romande se montre généralement mesurée. Le Temps estime que sous l’angle financier, le rachat de la compagnie nationale par Lufthansa est équitable. Car c’est désormais l’Allemande qui reprend le risque industriel lié à Swiss.
Comme la majorité de ses confrères toutefois, le quotidien édité à Genève relève les nombreuses incertitudes intrinsèques à ce rachat. Notamment l’avenir économique de l’aéroport zurichois Unique Airport et le développement de la compagnie au sein de Star Alliance. Et de rappeler qu’au final, les règles du marché trancheront…
Vers une restructuration
Pour la plate-forme zurichoise, l’avenir ne s’annonce pas brillant face à Francfort et Munich avertit déjà L’Impartial-L’Express. Ce rachat tient du «sauvetage in extremis» constate de son côté Le Nouvelliste.
Et «ce que Swiss n’a pas osé ou eu le temps de faire pour se sortir de la lente agonie, Lufthansa va le réaliser sans état d’âme, note le journal valaisan. Les lois du marché vont imposer une restructuration qui se fera tôt ou tard lourdement sentir sur les plate-formes de Zurich et surtout Genève.»
Le Quotidien jurassien met pour sa part en cause le politique. «La vente de Swiss est un échec pour la Suisse. Malgré ses apports financiers, la Suisse n’a pas été à la hauteur du défi».
Et le journal du dernier-né des cantons suisses d’écrire que «l’échec de Swiss doit faire réfléchir. Il interpelle le pays et sa capacité à se faire des alliés dans un monde devenu toujours plus interdépendant».
Un cran plus loin, 24Heures tire un lien entre la destinée de la compagnie et «l’Alleingang» de la Suisse aux marges de l’Union européenne et du monde. «La croix blanche sur les avions restera, mais les décisions seront prises ailleurs. Tel sera, si nous persistons dans notre isolement formel, le sort de notre souveraineté nationale», avertit le quotidien vaudois.
«Unique solution raisonnable»
En Suisse alémanique, la presse pousse là aussi un ouf! de soulagement assorti de réserves. A l’image de la Berner Zeitung: «Ceux qui laisseront parler leur raison plutôt que leur ventre pourront tout à fait vivre avec cette solution». Car la compagnie allemande ouvre des perspectives à Swiss.
A Zurich, la Tages Anzeiger estime que cette «vente à Lufthansa est l’unique solution raisonnable». Et le journal de constater que le peuple – qui a rejeté l’Espace économique européen en 1992 – a aussi sa part de responsabilité dans la détérioration des conditions cadre de l’aviation civile.
Toujours à Zurich, la Neue Zürcher Zeitung estime que, le cas échéant, la justice aura à demander des comptes sur les erreurs commises. Le quotidien de la capitale économique du pays s’en prend surtout à l’absence de garantie politique obtenues en faveur de l’aéroport zurichois. «On aurait ainsi pu mesurer le succès ou l’échec politique du Conseil fédéral (gouvernement) davantage sur les améliorations concrètes du hub de Zurich que sur la prix de vente de Swiss.»
Promesse, promesse
Plus violent, et sur la question de le vente elle-même de Swiss, le Blick rappelle que pendant trois ans, le gouvernement a exclu cette éventualité. «Jusqu’où politiciens et capitaines d’industrie ont-ils le droit de faire des promesses en toute impunité?», se demande le quotidien de boulevard.
La Thurgauer Zeitung, le Bund de Berne et d’autres encore constatent pour leur part que rien n’assure de la réussite de la reprise de Swiss par sa consoeur allemande. L’espoir ne doit pas cacher les incertitudes liées à l’avenir de la marque Swiss, et sur son rôle au sein de la galaxie Lufthansa.
Mais l’espoir fait vivre, parfois.
swissinfo
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