Le secteur du lait va mieux, la preuve par Emmi
Le bénéfice d'Emmi a chuté d'un tiers en 2002. Mais, dopé par la reprise de larges pans de Swiss Dairy Food, le numéro un suisse des produits laitiers est optimiste.
Sept mois après la tempête, c’est toute la branche laitière qui retrouve son calme.
Pour 2003, Emmi table sur un chiffre d’affaires de 1,88 milliard de francs et un bénéfice net de 42 millions de francs. En clair, le groupe lucernois a annoncé jeudi qu’il fera mieux qu’en 2002 (1,389 milliard, respectivement 19,8 millions ou moins 33%).
La reprise de nombreux secteurs de Swiss Dairy Food (SDF) après sa débâcle en septembre dernier a fortement pesé sur le bénéfice d’Emmi l’an dernier. Les frais de financement liés aux acquisitions sont venus se greffer là-dessus.
Emmi a notamment repris de SDF tout le secteur fromager ainsi que le site de production d’Ostermundigen, aujourd’hui en cours d’intégration.
Après les moments difficiles de 2002, 2003 est une année de consolidation pour Emmi, selon son directeur Fritz Wyss. C’est le cas aussi pour toute la branche laitière.
Craintes du naufrage
En septembre dernier, la débâcle de Swiss Dairy Food avait fait craindre le pire, soit des centaines de milliers de litres de laits abandonnés chez les paysans et des milliers d’emplois perdus.
Sept mois plus tard, la plupart des observateurs tirent un bilan positif des mesures pour éviter le naufrage de la branche.
«Des 620 millions de litres de lait achetés chaque année par SDF, aucun n’est resté en rade, constate Walter Willener, directeur de l’Association des groupements et organisations romands de l’agriculture (AGORA). Emmi et Cremo, les deux principaux repreneurs, ont donc joué le jeu».
Côté emplois, «sur les 1400 collaborateurs de SDF, plus de mille ont retrouvé une place», indique Urs Markstein, chef de la section du lait et produits laitiers à l’Office fédéral de l’agriculture.
Vers le marché
Si la débâcle de SDF a été douloureuse, notamment pour les fédérations de producteurs actionnaires de SDF qui ont perdu des dizaines de millions de francs, elle a été salutaire. «Il y a en général moins de sites de production, estime Urs Markstein. La restructuration a été bénéfique. Les capacités de production sont aujourd’hui mieux utilisées».
Dorénavant, et sans doute pour plusieurs années, cinq gros acteurs emmenés par Emmi et quelques petits concurrents achètent, transforment et commercialisent le lait fournit par les 38 000 producteurs du pays.
Progressivement, les règles de l’économie de marché prennent le dessus sur le dirigisme étatique. Qui n’est pas totalement mort, puisque les contingents laitiers (quantités à produire fixées par l’Etat accompagnées d’un prix cible) ne disparaîtront qu’en 2009.
D’ici là, la branche se transformera encore. Du côté des producteurs surtout, puisque sous la pression de la baisse du prix du lait, leur nombre pourrait diminuer de moitié en dix ans. Dans le même temps, certains observateurs voient les exploitations doubler ou tripler en terme de volume de production.
Côté produit fini, 42% des 3,1 milliards de litres de lait produits chaque année finissent en formage. La moitié est exportée.
Stocks d’Emmental
Gruyère, Appenzell et autres trouvent leurs marchés. Mais l’Emmental croule sous les stocks. Or, il représente la moitié de la production de fromage suisse.
Prix trop élevé, quantités trop fortes, mauvaise stratégies de produit? Les avis divergent mais le problème demeure.
Et le marché montre les dents. Une septantaine de fromageries villageoises productrices d’Emmental vont fermer ce printemps, faute d’acheteurs pour leur fromage, indique Henri Zürcher, conseiller auprès de la Fédération des producteurs suisses de lait.
Outre l’impact croissant de la concurrence interne, la branche devra aussi affronter la prochaine ouverture totale aux produits laitiers étrangers d’un marché suisse saturé.
Mais «tous les acteurs, y compris la Confédération, sont assez sereins pour la suite», affirme Urs Markstein. Qui l’aurait cru il y a sept mois?
swissinfo, Pierre-François Besson
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