Les banques cantonales «héroïnes» des PME
Contrairement à leurs grandes sœurs, les banques cantonales n'ont pas coupé les crédits accordés aux PME. La plus forte progression est toutefois le fait des «petites banques».
C’est ce que montre une étude co-financée par l’Union des banques cantonales.
Ils ont tout fait pour n’en rien laisser paraître, mais la satisfaction se devinait sur les visages des responsables de l’Union des banques cantonales suisses (UBCS).
Il faut dire que l’étude présentée mercredi à Zurich à l’occasion de leur conférence de presse annuelle leur donne un beau rôle.
«Un rôle que nous n’avons en rien recherché, se défend le président Urs Amsler, puisque c’est la Confédération qui a mandaté cette étude, pas nous. Nous n’avons fait que la co-financer.»
Réalisée par l’Institut pour les services financers de Zoug (IFZ), un organe de la Haute Ecole de Suisse centrale, l’étude passe au crible les crédits octroyés aux petites et moyennes entreprises (PME) suisses depuis 1997.
Principale conclusion: les banques cantonales n’ont pas laissé tomber les PME, contrairement aux grandes banques.
Si les limites de crédit ont été réduites – toutes banques confondues – de plus de 50 milliards de francs (15%), pour atteindre 307,5 milliards en mars dernier, le recul est principalement le fait des grandes banques qui sont à elles seules responsables d’une diminution de 45%.
Des grandes disparités
En revanche, les banques cantonales ont assuré une progression de près de 8%. Mais ce sont encore les établissements réunis dans la catégorie «autres banques», Raiffeisen, banques régionales, Migros et Coop, qui progressent le plus (environ 21%).
Le changement est radical dans certaines branches. Ainsi, dans l’industrie de transformation, les grandes banques ont réduit leur engagement de 41,1 millions fin 1997 à près de 24 millions fin 2002.
Leur part de marché est ainsi passée dans ce domaine de 65,1% à 41,6%. Les banques cantonales ont de leur côté mainteu leur engagement dans ce secteur à 12,7 millions et 22% de parts de marché.
Des fusions en cause
Pour l’auteur de l’étude, Maurice Pedergnana, le désinvestissement des banques est principalement dû aux fusions bancaires des années 90.
«Les grands établissements se sont retrouvés avec de trop nombreux crédits PME. Elles ont décidé de supporter moins de risques».
Un désengagement «extrêmement rapide» et quelque peu «irresponsable», selon le chercheur, d’autant plus que cette tendance se confirme cette année.
«Frein à la croissance»
«Entre janvier 2002 et janvier 2003, les limites de crédits accordées aux PME de moins de dix employés sont passées de 171 à 161 milliards. Or ce sont celles-là, qui comptent 26,3% des employés de PME, qui innovent.
Ces coupes reviennent à freiner la croissance, car les les banques cantonales n’ont pas pu compenser le désengagement des grandes banques.»
«Nous ne voulons pas nous présenter en héros, a relativisé le PDG de la Banque cantonale zurichoise Hans Vögeli, mais il se trouve que nous avons accepté 80% des demandes de crédit, avec constance.
C’est un fait. Quant au soutien aux start-up, seules les banques cantonales s’investissent! Il n’y a aucune autre banque présente dans ce secteur!»
Le directeur de la Banque cantonale de Fribourg, Albert Michel, a de son côté tenu à souligner l’erreur consistant à pénaliser des branches à risques par le biais de «ratings»: «Il ne faut pas sanctionner une branche à cause d’une entreprise mouton noir.»
Selon le Fribourgeois, l’immobiliser a causé de plus grands dégâts aux banques que les PME. «Il faut mieux analyser les risques, individuellement, et provisionner correctement.»
USAM satisfaite
L’Union suisse des arts et métiers (USAM), représentant les PME, confirme les résultats de l’étude.
«Les cantonales se font un peu de publicité, mais c’est compréhensible dans la mesure où la confiance des PME dans ces établissements a effectivement augmenté depuis quelques années», a déclaré à swissinfo le directeur Pierre Triponez.
«Il est aussi exact que nous avons davantage de difficulté à convaincre les grandes banques depuis quelques années, mais nous avons aussi de la compréhension pour leur exigence de contrôle accru.
Certaines PME doivent aussi apprendre à davantage jouer cartes sur table, et à exposer mieux leurs prolèmes.»
Rencontre annuelle
«Les partenariats avec les banques cantonales et régionales ont augmenté, poursuit Pierre Triponez, mais cela ne veut pas dire que les grandes banques se sont totalement distancées des PME. Elles ont aussi intérêt à soutenir celles qui forment 90% des entreprises suisses.»
Depuis quelques années, l’USAM a mis sur pied une rencontre annuelle avec tous les banquiers du pays. «La compréhension mutuelle s’est nettement améliorée», conclut le directeur de l’USAM.
swissinfo, Ariane Gigon Bormann, Zurich
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