Le visage renouvelé de la Genève internationale
La Genève internationale est une plateforme globale de premier plan, mais des défis sans précédent la menacent. Parmi eux, le déclin du multilatéralisme et les effets de la guerre en Ukraine.
Alors que la pandémie a particulièrement exposé l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la guerre en Ukraine a déplacé l’attention sur les droits humains et les questions humanitaires. Il existe à Genève de nombreuses organisations internationales qui traitent de ces thématiques. Le Bureau des droits humains des Nations unies est dirigé par le haut-commissaire aux droits de l’homme, un poste qu’occupe depuis le 17 octobre 2022 l’Autrichien Volker Türk. Il remplace la Chilienne Michelle Bachelet. Le nouveau chef des droits humains doit faire face à de multiples défis, notamment une ONU divisée sur la guerre en Ukraine, de nombreuses crises à travers le monde et le casse-tête de déterminer comment traiter avec la Chine.
Peu avant minuit, le 31 août 2022, dans les dernières minutes de son mandat, Michelle Bachelet a publié un rapport aussi attendu que controversé sur la province chinoise du Xinjiang. Il fait état de possibles crimes contre l’humanité commis à l’encontre de la minorité musulmane ouïghoure. Sa publication a incité les pays occidentaux et les ONG à demander un débat sur le Xinjiang lors de la session d’automne 2022 du Conseil des droits de l’homme (CDH), mais cette demande a été rejetée, reflétant les divisions au sein de l’ONU et la pression exercée sur certains membres du CDH.
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Lors de cette même session, le CDH a toutefois adopté une résolution pour nommer un rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Russie. La Commission d’enquête indépendante sur les violations de droits humains en Ukraine, mise sur pied par le CDH au printemps 2022, a quant à elle présenté son rapport intérimaire et déclaré que, sur la base des preuves recueillies jusqu’alors, «des crimes de guerre ont été commis».
Le Conseil des droits de l’homme se trouve au cœur de la Genève internationale, son siège étant situé au Palais des Nations, le siège européen de l’ONU. L’Assemblée générale des Nations unies à New York a voté le 7 avril la suspension de la Russie de cet organe en raison de la guerre en Ukraine. C’est seulement la deuxième fois dans l’histoire qu’un pays est suspendu, après la Libye de Mouammar Kadhafi. Mais le vote a été plutôt ambivalent, selon une analyse de SWI swissinfo.ch.
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Pour comprendre le fonctionnement et les activités du Conseil des droits de l’homme, regardez cette vidéo explicative:
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Crise alimentaire
Avec la crise humanitaire causée par la guerre en Ukraine, d’autres organismes des Nations unies comme le HCR, l’agence pour les personnes réfugiées basée à Genève, et le Programme alimentaire mondial (PAM) ont fort à faire pour apporter de l’aide. Le conflit a provoqué une crise alimentaire dans certaines régions du monde, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Les approvisionnements sont interrompus, les prix augmentent et les organismes d’aide sont débordés.
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Comment la guerre en Ukraine nourrit la prochaine crise alimentaire mondiale
Un accord phare, conclu en juillet 2022 sous l’égide de l’ONU et de la Turquie, a toutefois permis à l’Ukraine, un important producteur de céréales, de reprendre ses exportations en mer Noire. Le prix des céréales sur les marchés internationaux a ainsi pu être ramené à la baisse, freinant la progression de la faim dans le monde. Malgré les menaces de Moscou de s’en retirer, l’accord – par lequel l’ONU s’engage aussi à faciliter les exportations d’engrais russes – a pu être prolongé en novembre 2022 pour quatre mois supplémentaires.
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Le maintien de l’accord sur les céréales en mer Noire atténue temporairement la crise alimentaire
Les organisations humanitaires sous pression
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), gardien des Conventions de Genève et probablement la plus connue des nombreuses ONG internationales basées à Genève, a aussi été mis sous pression par la guerre en Ukraine. Le CICR continue de défendre sa neutralité afin de pouvoir parler à toutes les parties d’un conflit et sauver des vies, mais il doit faire face à de nombreuses critiques, notamment de la part des autorités ukrainiennes. Ces dernières lui reprochent de ne pas visiter les prisonniers de guerre détenus par la Russie. En vertu du droit international, les États sont tenus d’accorder au CICR un accès régulier aux prisonniers de guerre, mais il ne bénéficie toujours pas d’un accès total, notamment dans les régions d’Ukraine contrôlées par la Russie.
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Les familles des prisonniers de guerre ukrainiens exhortent le CICR à en faire plus
En raison du changement climatique et des guerres qui s’éternisent, l’ONU s’attend à ce que les besoins humanitaires explosent en 2023. Or l’écart entre les besoins humanitaires et les fonds récoltés ne cesse de s’accroître et compromet la capacité du système onusien à répondre à des crises sans précédent. La guerre en Ukraine est l’un des facteurs qui alimentent ce sous-financement, mais pas le seul.
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La guerre en Ukraine contribue au sous-financement d’autres crises
Le Covid et l’OMS
Mais si les regards sont désormais braqués sur l’Ukraine, la pandémie de Covid-19 n’est pas terminée. Et même si le monde apprend à vivre avec ce virus, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) veut en tirer des leçons.
Lors d’une session spéciale en décembre 2021, les États membres de l’OMS se sont engagés à conduire des négociations en vue d’un futur traité mondial sur les pandémies. Il devrait permettre à la communauté internationale de mieux répondre aux futures crises sanitaires, mais celui-ci ne sera probablement pas prêt avant 2024 au moins.
L’OMS est une institution spécialisée des Nations Unies basée à Genève. Elle a été fondée en 1948 pour promouvoir l’accès universel aux soins, fixer des normes et coordonner la réponse mondiale aux crises sanitaires.
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Covid-19: L’OMS mène-t-elle la barque?
L’organisation mondiale du commerce et les vaccins
L’OMC s’est elle aussi retrouvée dans l’œil du cyclone pendant la pandémie. La délicate question des inégalités en matière d’accès aux vaccins y a été discutée en juin 2022, lors d’une Conférence ministérielle à Genève. Une levée temporaire des brevets sur les vaccins contre le coronavirus y a notamment été décidée.
L’OMC compte 164 pays membres et a une longue histoire.
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La longue histoire de l’Organisation mondiale du commerce
Justice internationale
Ces dernières années, les organismes de la Genève internationale ont été complétés par des équipes d’enquête et de spécialistes de la justice internationale qui veillent à récolter et préserver des preuves, afin de préparer d’éventuels futurs procès pour les graves crimes internationaux commis en Ukraine et ailleurs.
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Recueillir des preuves de crimes de guerre en Ukraine, un engagement suisse
Et même si les crimes commis sur le terrain à l’encontre des populations civiles sont au centre de ces efforts, les attaques conduites en ligne sont elles aussi dans le viseur des ONG genevoises.
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Une cyberattaque peut-elle être un crime de guerre?
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