Le «prêtre rebelle» définitivement suspendu
Après la messe célébrée samedi dernier, Franz Sabo, le curé de Röschenz, dans le canton de Bâle Campagne, perd définitivement sa mission canonique.
Dans une lettre, l’évêque de Bâle Kurt Koch revient sur sa décision de lui accorder un délai de réflexion de six mois et le menace de «conséquences graves».
L’évêque avait officiellement délié le curé de toutes ses charges (retrait de la Missio canonica) au 1er octobre. Kurt Koch lui avait proposé de prendre une pause de six mois à Bamberg, en Allemagne, soit à l’endroit où il a été ordonné prêtre. Passé ce délai, il aurait pu revenir de son plein gré, sous certaines conditions.
Mais ce sursis est désormais révoqué. Comme l’explique Bernhard Cueni, membre du conseil paroissial de Röschenz, c’est la messe que Franz Sabo a célébré samedi 1er octobre, hors mission, qui a amené l’évêque à revenir sur sa décision.
Dans sa lettre, Kurt Koch menace le curé de «conséquences canoniques graves», au cas où il outrepasserait l’interdiction qui lui a été faite d’officier. Ces conséquences ne sont pas précisées, mais il pourrait s’agir d’une excommunication, ajoute Bernhard Cueni. Désormais, c’est l’archevêché de Bamberg qui est responsable de Franz Sabo.
Une messe de trop
L’affaire Franz Sabo dure depuis plus de deux ans. Le curé de Röschenz a critiqué depuis sa chaire la hiérarchie de l’Eglise et l’évêque de Bâle. En mars, celui-ci annonçait que le curé devrait quitter sa paroisse fin septembre.
Une paroisse qui se refuse à le laisser partir, puisque les 415 personnes présentes en avril à l’Assemblée paroissiale ont toutes rejeté cette décision. Selon Bernhard Cueni, la dernière lettre de l’évêque n’y change rien.
Samedi dernier, les paroissiens ont réitéré leur soutien à leur curé à l’occasion de la messe qu’il a célébrée «illégalement».
Dix minutes avant le début de l’office, les bancs de l’église étaient déjà tous occupés. L’ajout de chaises a permis de faire passer la capacité de l’édifice à 400 personnes, pour accueillir les habitants de Röschenz ainsi que ceux des localités voisines.
Hormis la présence de photographes et de caméras de télévision, le prêche s’est déroulé de façon conventionnelle. Le curé a attendu la fin du service religieux pour faire une allusion claire à sa situation: «Röschenz a un curé, il n’a pas besoin d’en avoir trois», a-t-il dit.
L’évêché avait en effet envoyé à Röschenz un vicaire et un curé pour suppléer le prêtre suspendu.
«La vie de la paroisse va continuer, a poursuivi Franz Sabo. Il y aura des baptêmes, des mariages, des cérémonies d’adieux aux personnes décédées. On continuera a fêter Pâques et Noël ensemble».
«Je suis touché par votre présence, votre participation, votre soutien», a conclu le curé, en remerciant les paroissiens, qui ont longuement applaudi.
Flou juridique
L’affaire est donc loin d’être close. Interrogé par swissinfo, Felix Corley, observateur britannique des affaires écclésiastiques, rappelle que «l’Eglise catholique n’est pas une démocratie» et que «si Sabo continue à prêcher le type de théologie qui est la sienne et à attaquer ses chefs, il ne doit pas s’attendre à y faire une longue carrière».
Reste que le «licenciement» d’un prêtre n’est pas formellement de la compétence de l’évêque, mais de celle de l’Assemblée paroissiale. On nage donc en plein flou juridique.
Pour y voir plus clair, un synode extraordinaire de l’Eglise catholique-romaine est convoqué le 31 octobre à Liestal. Un avis de droit, demandé au professeur Felix Hafner y sera présenté, mais il ne sera rendu public que lorsque l’affaire sera réglée.
swissinfo et les agences
Le cas du curé Sabo constitue une première dans l’histoire de l’Eglise catholique en Suisse.
La situation juridique n’est pas claire. D’un côté, la constitution de l’Eglise affirme que le retrait de la mission canonique (privilège de l’évêque) interdit à un prêtre d’exercer, mais de l’autre son «licenciement» est du ressort de l’Assemblée de paroisse.
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