Terreur dans une station balnéaire égyptienne
Dix-huit personnes, dont un Suisse, ont été tuées lundi soir dans le triple attentat perpétré dans la station balnéaire de Dahab dans le Sinaï égyptien.
Cette attaque – qui a en outre fait des dizaines de blessés, dont une touriste suisse – frappe un haut lieu du tourisme égyptien pour la troisième fois en moins de 18 mois.
«Les autorités égyptiennes nous ont confirmé la présence d’un ressortissant suisse parmi les victimes», a indiqué dans la nuit de lundi à mardi Lars Knuchel, porte-parole du ministère des affaires étrangères.
La touriste helvétique grièvement blessée à la jambe sera rapatriée par un avion-ambulance de la Rega, la Garde aérienne suisse de sauvetage.
Selon l’assurance de voyage Elvia, 60 à 70 Suisses se trouvaient à Dahab au moment des attentats. Mardi matin, la compagnie a envoyé sur place une équipe de soutien de trois personnes, comprenant un expert en logistique et un psychologue.
De leur côté, les autorités du Caire font état de douze Egyptiens et six étrangers, dont un bébé allemand, tués dans ce triple attentat. Par ailleurs, plus de 80 personnes ont été blessées.
Trois bombes
Les attentats, perpétrés vers 19h15 locales, ont visé deux restaurants et un complexe de boutiques de cette station balnéaire du sud-est du Sinaï, très fréquentée lors de ce long week-end, férié pour les Pâques coptes et la fête égyptienne du printemps de Cham al-Nassim.
Mardi est également un jour férié qui commémore la récupération officielle le 25 avril 1982 par l’Egypte du Sinaï, jadis occupé par Israël. De nombreux touristes étrangers se trouvaient également sur les lieux au moment des attentats.
L’Egypte a ausitôt bouclé ses frontières avec Israël, pour «empêcher la fuite d’éventuels suspects».
Cette fermeture est intervenue alors que des touristes israéliens tentaient de rentrer chez eux. Quelque 20’000 d’entre eux étaient arrivés ces derniers jours dans le Sinaï, en dépit des avertissements lancés par les autorités de l’Etat hébreu qui craignaient une «attaque terroriste».
«Très surpris»
Joint au Caire par swissinfo, Mohamed Abdessalam se dit «très surpris» par ces attentats, qui interviennent à nouveau dans une grande ville du Sinaï à la veille d’une fête nationale.
«Personne ne pouvait imaginer encore une grande opération dans cette région, explique cet expert à l’Unité militaire du Centre Al Ahram pour les études politiques et stratégiques. On pensait que les forces de sécurité égyptiennes avaient le contrôle de la situation. C’est un coup très dur pour l’Egypte, surtout que le secteur touristique s’était relevé très vite des précédents attentats».
Condamnation unanime
Pour le président égyptien Hosni Moubarak, «les responsables de cet acte terroriste hideux doivent être pourchassés et punis conformément à la loi». De Londres à Ottawa et de Jérusalem à Tripoli, la communauté internationale a condamné les attaques.
Le président palestinien Mahmoud Abbas a ainsi dénoncé «un acte criminel qui frappe aveuglément des civils et qui est tout à fait contraire à notre religion».
Le Hamas, désormais au pouvoir en Palestine condamne également cet attentat, et c’est une première. «Notre gouvernement condamne fermement cet acte criminel qui bafoue notre foi, ébranle la sécurité nationale palestinienne et joue contre les intérêts arabes», a dit dès lundi soir Ghazi Hamad, porte-parole du gouvernement du Hamas.
Condamnation également de la part des Frères musulmans d’Egypte. «Quel que puisse être celui qui est derrière ces actions criminelles, elles ne visent qu’à déstabiliser le pays», souligne leur communiqué.
Quant au président américain George W. Bush, il a évoqué un «acte de haine» et promis de continuer à traquer les terroristes.
Action locale ou action importée ?
Ce triple attentat n’a pas encore été revendiqué. Mais la presse égyptienne de lundi évoque un lien possible avec ceux de Taba en octobre 2004 et de Charm el-Cheikh en juilllet 2005.
L’été dernier, un groupe islamiste nommé «Al-Tawhid wal Jihad», se réclamant d’Oussama Ben Laden, avait revendiqué ces attaques, alors que les autorités les imputaient encore à un groupe de bédouins du Sinaï. Et pour le journal gouvernemental Al-Goumhouriya, il ne fait pas de doute que ce groupe «est derrière le crime haineux» de Dahab.
Sans être aussi catégorique, Mohamed Abdessalam estime qu’il peut très bien s’agir d’une action «interne à l’Egypte, menée par une organisation de natifs du Sinaï».
«Je pense que dans ce cas, tout commence et tout finit en Egypte, déclare l’expert. Même s’il y a toujours une dimension extérieure dans toute action terroriste, n’importe où dans le monde».
swissinfo et les agences
– Le 17 novembre 1997, 62 touristes, dont 36 Suisses sont fauchés par un commando dans le temple d’Hatchepsout à Louxor. Six de leurs agresseurs sont abattus par les forces de l’ordre.
– Le 7 octobre 2004, une série d’attentats à la voiture et au camion piégés fait 34 morts dans des stations balnéaires du Sinaï, prisées des touristes israéliens. La plupart des morts et des blessés sont recensés à l’hôtel Hilton de Taba. Il n’y a pas de victime suisse.
– Le 23 juillet 2005, deux voitures et une valise piégées explosent dans des hôtels et des commerces de Charm-el-Cheikh, toujours dans le Sinaï, faisant 64 morts et plus de 200 blessés, dont de nombreux étrangers. Près de 1000 Suisses se trouvent dans la station, mais aucun n’est touché.
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