HRC de Rennaz: le Conseil d’Etat a tardé à réagir, selon la CEP
(Keystone-ATS) La Commission d’enquête parlementaire sur l’Hôpital Riviera-Chablais (CEP-HRC) a livré mardi son rapport. Elle n’a constaté aucun acte répréhensible ou malversation, mais plusieurs défaillances, notamment du Conseil d’Etat vaudois, accusé d’avoir tardé à réagir.
Instituée le 30 mars 2021, la CEP-HRC liste plusieurs constats dans son rapport, long de 173 pages, sur les difficultés financières de l’Hôpital de Rennaz (VD). Elle écrit notamment que le Conseil d’Etat et le Grand Conseil vaudois étaient au courant « des difficultés financières croissantes » de l’HRC et que « leur inaction face à la situation est en partie à l’origine de la crise financière » qui a éclaté au grand jour en avril 2020.
« Pour un projet d’une aussi grande taille, les responsabilités sont partagées », résume auprès de Keystone-ATS le député UDC Dylan Karlen, président de la Commission d’enquête parlementaire. « Il n’y a pas de révélations particulières, ni rien de révolutionnaire » par rapport aux deux audits de l’été 2020 qui confirmaient d’importantes lacunes dans la gestion financière et des affaires courantes de l’établissement valdo-valaisan.
« Avec cette CEP et les deux précédents audits, on a fait le tour de la question », estime M. Karlen, sans commenter plus en profondeur le rapport. Celui-ci a été déposé mardi au Bureau du Grand Conseil et sera présenté devant le Parlement le 7 juin. Pour rappel, les députés valaisans ont, eux, refusé d’enquêter sur l’HRC, dont leur canton est propriétaire pour un quart.
Laxisme du Parlement
La crise avait contraint les cantons de Vaud et du Valais à réagir d’urgence en octroyant des garanties d’emprunt supplémentaires pour 70 millions de francs (400 millions en tout). Concernant l’exploitation de l’hôpital, pour lui permettre d’éponger ses pertes et de retrouver des comptes équilibrés en 2026, un soutien de 125 millions de francs sur quinze ans avait aussi été accordé.
Selon le rapport de la CEP-HRC, le Conseil d’Etat a été informé « régulièrement », dès 2015, que la prévision du coût final du nouvel hôpital de Rennaz allait excéder le montant de la garantie. Malgré ça, « il n’a pas pris les mesures adéquates pour remédier à cette situation », peut-on y lire.
Le rapport pointe aussi du doigt le fait que le Département de la santé et de l’action sociale (DSAS), en charge du projet de l’HRC, « n’ait pas saisi le Conseil d’Etat lorsque des problèmes majeurs, d’ordre financier notamment, sont apparus lors de la réalisation dudit projet ».
Le Grand Conseil est également accusé d’un certain laxisme. La situation financière critique de l’HRC, relayée par la Commission interparlementaire de contrôle de l’HRC, n’a pas suscité « de réaction particulière » du Parlement vaudois, souligne la CEP-HRC. Dans le même temps, cette Commission interparlementaire est aussi épinglée: « elle ne possède pas les compétences et les moyens suffisants pour exercer un réel contrôle de gestion sur l’HRC ».
Pas de « business modèle »
Le Conseil d’établissement et la direction de l’HRC sont, eux, restés sourds aux alertes de la directrice financière. « Aucun de ces organes n’a pris de mesures appropriées. En contractant deux emprunts à court terme de 10 millions de francs, la directrice financière a évité que l’HRC ne tombe en cessation de paiement », affirme la CEP-HRC.
Parmi les autres constats, il ressort aussi que le nouvel hôpital – qui a permis de regrouper cinq sites hospitaliers de la région – ne disposait pas de véritable « business modèle ». Un outil qui accompagne pourtant toute création d’entreprise pour définir sa mission, sa clientèle, ses ressources humaines ou encore son financement.
Le Conseil d’établissement de l’HRC ne disposait pas, par ailleurs, « d’une vision claire des orientations stratégiques voulues » par les cantons de Vaud et du Valais. Autre reproche, l’HRC a utilisé des montants en lien avec son exploitation pour financer des investissements, « ce qui a accru les problèmes de trésorerie traités en urgence par le Grand Conseil ».
Reproches écartés
Le Conseil d’Etat prend acte du rapport de la CEP-HRC, a-t-il indiqué dans la foulée de la publication. Le gouvernement note que la CEP n’a relevé aucun acte répréhensible ni utilisation inadéquate de l’argent public. Il suivra plusieurs recommandations formulées, mais ne partage pas certains constats sur l’autonomie, la surveillance et la situation financière de l’hôpital, réagit-il.
« Le Conseil d’Etat constate que le rapport ne dévoile pas des faits nouveaux qui lui auraient été inconnus ou qu’il n’aurait pas communiqués publiquement ni aucun fait grave mettant en cause les autorités », notent les autorités vaudoises.
Le gouvernement vaudois souligne en outre que les coûts de construction ont été maîtrisés et que ceux liés à l’exploitation étaient conformes aux prévisions jusqu’en 2019, mais que la baisse de l’activité (liée notamment au retard pris par le déménagement) a provoqué une baisse des recettes. Le canton dit alors avoir pris « des mesures de correction immédiates » et ordonné deux audits pour comprendre ces difficultés.
Le Conseil d’Etat se réjouit cependant que l’HRC évolue désormais de façon positive, sur tous les plans. L’hôpital « est sur la bonne voie: le résultat financier 2021, meilleur qu’attendu, démontre que les mesures de retour à l’équilibre prises déploient leurs effets. Il a trouvé sa place dans la région et joue un rôle important dans la couverture des besoins des habitants des cantons de Vaud et du Valais », souligne-t-il.