Interpol se réunit en Chine qui mène une chasse aux fugitifs
(Keystone-ATS) Interpol, qui regroupe les polices de 190 pays, entamait mardi son assemblée générale à Pékin. Pays hôte, la Chine est parfois accusée de servir ses intérêts politiques en poursuivant une intense campagne de rapatriement d’escrocs et de fraudeurs présumés.
Avec l’échange d’informations, Interpol est un outil crucial pour la Chine, à l’heure où le président Xi Jinping a fait de la lutte contre la corruption des cadres du régime un de ses chevaux de bataille. Pékin a lancé une opération « Chasse aux renards » qui a déjà permis de rapatrier au moins 2500 ressortissants suspectés de crimes économiques, selon les autorités.
L’organisation policière basée à Lyon (France) n’émet pas de mandats d’arrêt. Mais elle peut publier, sur demande d’un Etat membre, des « notices rouges », c’est-à-dire des avis de recherche internationaux. De nombreux pays occidentaux restent cependant prudents, face à une Chine où la justice est soumise au Parti communiste (PCC).
La France avait toutefois accepté d’extrader l’an passé un citoyen chinois, une première depuis l’application en 2015 d’un accord bilatéral d’extradition, selon Pékin. « Son engagement dans Interpol est un signal clair qu’elle prend au sérieux les menaces nationales ou transnationales susceptibles de saper ses intérêts », souligne Stefanie Kam, de l’Université de technologie de Nanyang à Singapour.
Milliardaire recherché
Mais depuis l’élection fin 2016 du vice-ministre chinois de la Sécurité publique Meng Hongwei comme président de l’organisation internationale policière, les critiques de défenseurs des droits humains s’accumulent. Le dissident Wei Jingcheng, exilé aux Etats-Unis depuis 1997, a déclaré craindre que Pékin n’utilise ainsi l’institution policière internationale pour « rapatrier des opposants politiques ».
« En tant que numéro deux de la police chinoise – connue pour sa détention, sa torture et son harcèlement de militants – nous craignons que M. Meng ne soit peut-être pas en mesure d’assumer sa responsabilité de défense de la constitution d’Interpol », a indiqué Maya Wang de l’organisation Human Rights Watch. Des craintes jugées « sans fondement » la semaine dernière par le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Lu Kang.
Ces accusations interviennent alors que l’un des fugitifs les plus recherchés de Chine, le milliardaire exilé à New York Guo Wengui, est visé depuis avril par une « notice rouge ». Cet ancien homme d’affaires, accusé de malversation par Pékin, assure détenir des preuves de la corruption de hauts dirigeants chinois. Les Etats-Unis n’ont pas indiqué s’ils comptaient ou non procéder à son extradition.
Face aux accusations de partialité, Interpol réfute fermement et rappelle l’article 3 de ses statuts. Celui-ci « s’interdit absolument toute intervention ou activité à caractère politique, militaire, religieux ou racial ».
Candidature palestinienne
Quelque 1000 dirigeants policiers et politiques vont discuter pendant quatre jours à huis clos de terrorisme, de crime organisé ou encore de cybercriminalité. Un autre dossier agitera cette assemblée générale: la candidature de l’Autorité palestinienne, à laquelle s’oppose fermement la diplomatie israélienne.
La Palestine, en quête de reconnaissance par les institutions internationales, dispose d’un statut d’observateur à l’ONU depuis 2012 et a déjà rejoint la Cour pénale internationale et l’Unesco. Elle tentera à nouveau d’intégrer Interpol après un échec l’an passé et devra obtenir pour cela une majorité des deux-tiers.