Karin Keller-Sutter alerte sur la crise de confiance de la presse
(Keystone-ATS) La conseillère fédérale Karin Keller-Sutter s’est inquiétée jeudi au Swiss Media Forum de la perte de confiance du public envers la presse. Elle a exhorté la branche à miser sur le journalisme de qualité, la fidélité aux faits et l’impartialité.
« Beaucoup de confiance a été perdue » ces dernières années, a constaté la ministre des finances lors d’une intervention vidéo devant les quelque 300 participants au Swiss Media Forum, la principale réunion de la branche des médias du pays. L’évènement se tient durant deux jours au Centre culturel et des congrès de Lucerne (KKL).
La cheffe du Département des finances (DFF) a rappelé que selon une enquête menée chaque année par l’EPF de Zurich, les médias figurent en fond de classement dans l’indice de confiance de la population à l’égard des institutions. En 2022, ils ont obtenu une note d’à peine 5,4 points sur 10. Le Conseil fédéral a lui été gratifié d’une note de 7,3 – la plus haute depuis que le sondage est réalisé, en 1999.
Chien de garde attaqué
La confiance envers les médias est minée par les médias sociaux ou des médias dits alternatifs, a relevé la ministre. Ceux-ci insinuent tour à tour une conspiration des médias, la vénalité des journalistes ou encore l’influence des gouvernements sur la profession.
Des narratifs qui ne contribuent pas à créer la confiance, a insisté Mme Keller-Sutter, citant des expressions comme « faits alternatifs », « médias mainstream » ou « Lügenpresse » (« la presse à mensonge »). Même le terme « presse de qualité » est régulièrement utilisé de manière ironique, a relevé la Saint-Galloise.
« En discréditant les médias, on veut saper la stabilité politique et le discours rationnel », a mis en garde la conseillère fédérale. « On veut désactiver le chien de garde que représente la presse afin de pouvoir cambrioler la maison », a-t-elle encore imagé.
« Car un système médiatique qui fonctionne et qui est digne de confiance est une condition primordiale pour la démocratie », a souligné Karin Keller-Sutter, saluant « chaque démarche de votre branche visant à maintenir et à renforcer la confiance dans votre travail ». Elle a cité comme exemple la formation des journalistes.
A qui profitent les fuites?
La ministre a appelé le secteur à miser sur des « vertus prétendument démodées que sont la qualité, la pertinence, la précision, l’équité et la fidélité aux faits ».
Interrogée sur la question des fuites dans la presse, elle a invité les journalistes à davantage questionner de manière critique les raisons de ces révélations. Il faut toujours se poser la question « Cui bono » (« pour quel profit? »), a-t-elle plaidé.
Une telle approche centrée sur la qualité favorise la confiance envers le quatrième pouvoir. Cela renforce la démocratie et contribue à une société « ouverte et équitable », a ajouté Mme Keller-Sutter. « Finalement, nous sommes tous sur le même bateau. Il s’agit de notre démocratie commune et il n’y en a qu’une seule ».
Lancé par un groupe de journalistes, le Swiss Media Forum est porté par les quatre groupes privés CH Media, NZZ, Ringier et TX Group ainsi que par la SSR. L’évènement est également soutenu par l’association des éditeurs alémaniques (VSM).