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La naturalisation, un instrument politique

Keystone

La naturalisation est depuis toujours utilisée pour régler certains conflits d'intérêts sociaux et politiques, conclut une étude financée par le Fonds national suisse.

La pratique suisse en matière de naturalisation est l’une des plus restrictives d’Europe, constatent aussi les chercheurs de l’Université de Berne.

Les étrangers doivent résider douze ans en Suisse avant de déposer une demande de naturalisation. Dans l’Union européenne (UE), ce délai va de quatre à dix ans.

Dans la plupart des Etats de l’UE, une naturalisation facilitée est prévue pour les étrangers de deuxième génération. Ce n’est pas le cas en Suisse.

La Suisse se singularise d’une autre manière encore. Les décisions de naturalisation s’y prennent en général au niveau communal.

Conséquence de tout cela: plus d’un habitant sur cinq ne possède pas la nationalité helvétique et se voit privé de droits politiques au niveau national.

Une équipe d’historiens de l’Université de Berne a donc cherché à expliquer cette situation. Elle a planché sur les critères d’admission et d’exclusion du droit de cité en Suisse entre 1874 et aujourd’hui.

Signes de libéralisation

Schématiquement, pratiques de naturalisation et débats autour de la question ont évolué par vagues. Jusqu’à la fin de la guerre de 14-18, les temps ont été à un certain libéralisme.

Ensuite, pendant soixante ans, tendance à une approche de plus en plus restrictive jusqu’à la fin des années 1970. La politique actuelle montre de nouveaux signes de libéralisation, constate Brigitte Studer, directrice du projet de recherche.

Depuis les années 80, les tentatives de libéralisation ont en effet plus de poids. La reconnaissance de la double nationalité en 1992 et la possibilité pour les conjoints étrangers de bénéficier d’une naturalisation facilitée en sont l’illustration.

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Ce contenu a été publié sur Le Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS) est une organisation privée, mais en grande partie financée par la Confédération. Son but est de promouvoir la recherche de base en Suisse. Le FNS soutient la recherche dans tous les domaines, de la philosophie à la médecine en passant par les nanotechnologies. Sa principale tâche…

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Gérer par la naturalisation

Pour les chercheurs, on retrouve derrière ces critères de naturalisation et leurs modifications, des normes et représentations sociales helvétiques. Exemple: la courtoisie, le zèle, la réserve politique et la réputation.

La pratique en matière de naturalisation fait aussi émerger des conflits d’intérêts sociopolitiques. Les chercheurs citent la préservation de la «santé du peuple» durant l’entre-deux guerres ou la peur d’une société noyautée par les communistes pendant la Guerre froide.

La naturalisation a aussi été utilisée pour gérer certains problèmes. Typiquement, on a rejeté des personnes économiquement désavantagées par peur des frais d’assistance. On a aussi voulu réguler le marché en faisant venir en Suisse des travailleurs étrangers.

Exigences de l’Etat de droit

Brigitte Studer et son collègue Gérald Arlettaz tirent plusieurs enseignements de l’examen des anciens dossiers de naturalisation et d’autres documents historiques.

Selon eux, les exigences en matière d’adaptation et d’assimilation ont été appliquées de manière très disparate, parfois même arbitraire au cours du 20e siècle.

Les auteurs recommandent donc de rendre plus objective la procédure de naturalisation pour la rendre conforme aux principes d’un Etat de droit. Selon eux, «le dépôt d’une demande de naturalisation devrait être soumis aux mêmes conditions claires dans toute la Suisse».

A l’heure de la mobilité

Les deux historiens s’en prennent aux pratiques actuelles fondées sur le rôle historique des communes et des cantons dans l’admission du droit de cité.

Leurs prérogatives découlaient de l’organisation de l’ancienne Confédération et répondaient aux besoins administratifs et de sélection de la population.

«Aujourd’hui, à l’heure de la mobilité, de tels intérêts particuliers, qui peuvent conduire à des décisions subjectives voire arbitraires, ne sont plus adéquats», estime Brigitte Studer.

Transférer les compétences

La chercheuse note aussi que «la possibilité de sélectionner au niveau local ne correspond plus aux besoins d’intégration de la Suisse». D’où cette recommandation: il faut transférer les compétences du niveau communal au niveau cantonal. Comme cela est déjà le cas à Genève.

Les chercheurs conseillent aussi de réduire la durée de résidence requise ouvrant sur l’obtention de la nationalité. Et cela, «dans des proportions raisonnables», compte tenu aussi des pratiques dans l’UE.

Cette précision encore, l’étude historique bernoise est la plus détaillée menée jusqu’ici en Suisse autour des pratiques de naturalisation.

swissinfo et les agences

La naturalisation est un thème récurrent en politique suisse. Ces dernières années, la question a notamment tourné autour de la légitimité des naturalisations avalisées dans les urnes. Une initiative sur le sujet doit passer devant le parlement et le peuple.

A moins d’un an des élections fédérales, le thème de l’intégration et de la naturalisation sont repris par les partis gouvernementaux, qui chacun proposent leur concept. Derniers en date, les socialistes préconisent d’imposer un contrat d’intégration aux étrangers.

Une demande de naturalisation peut être déposée en Suisse après y avoir résidé depuis 12 ans.

La Suisse accorde la naturalisation à qui est bien intégré et connaît le système juridique suisse.

La naturalisation passe par les cantons et les communes. La procédure peut varier fortement.

En 2005, 39’753 naturalisations ont été enregistrées en Suisse, un record.

La Suisse compte plus de 20% d’étrangers.

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