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La plainte des prisonniers de Champ-Dollon

Les autorités espèrent que la construction d'un nouveau quartier carcéral permettra de résoudre le problème de la surpopulation à Champ-Dollon. Keystone

Des voix s'élèvent de la prison surpeuplée de Champ-Dollon, près de Genève, pour dénoncer de mauvais traitements policiers et une certaine discrimination.

Pour pouvoir communiquer leurs récriminations à la Ligue suisse des droits de l’homme et à des députés genevois, des prisonniers avaient menacé d’entamer une grève de la faim.

«La prison est tellement surpeuplée à l’heure actuelle que le moindre petit problème peut prendre de graves proportions», explique Doris Leuenberger, vice présidente de la Ligue suisse des droits de l’homme (LSDH).

Doris Leuenberger est l’une des quatre personnes qui composaient la délégation de la section genevoise de la LSDH qui s’est entretenue avec sept détenus de Champ-Dollon.

Ces prisonniers représentaient les quelque 200 signataires d’une pétition dénonçant les mauvais traitements qui seraient infligés par la police aux personnes interpelées.

Dans les faits, les prisonniers font état d’une série de griefs à l’encontre des forces de l’ordre et des autorités judiciaires.

La lenteur de la justice, des décisions jugées discriminatoires, des pressions psychologiques et physiques exercées pour soutirer des aveux aux suspects ainsi qu’une durée trop longue des détentions préventives sont ainsi pointées du doigt.

De plus, certains condamnés étrangers écoperaient, à délit égal, de peines plus lourdes que les Européens. Et certains droits seraient refusés aux détenus en fin de peine.

Rencontres prévues

La LSDH va maintenant répercuter ces accusations par courrier au chef du Département des institutions Laurent Moutinot, au chef de la police et au procureur général.

Elle émettra un certain nombre de recommandations, comme le port d’un matricule pour les gendarmes et la présence de caméras dans les locaux de la police.

Concernant le fonctionnement de la justice, l’organisation évoque plusieurs pistes, dont l’augmentation du nombre de juges d’instruction. Ou encore la création, sur un modèle français, d’un tribunal des flagrants délits, qui permettrait de traiter plus rapidement les petits dossiers.

Les prisonniers de Champ-Dollon ont fait les mêmes observations à la Commission des visiteurs officiels du Grand Conseil (Parlement genevois), qui s’est rendue sur place jeudi.

«Nous rencontrerons après Pâques les représentants de la LSDH ainsi que le conseiller d’Etat Laurent Moutinot», indique la présidente de la commission, Esther Alder.

Grève suspendue

Il faudra attendre ces rencontres pour savoir quelles suites la commission compte donner à l’affaire, qui est prise au sérieux, souligne l’élue écologiste. Les commissaires ont certains moyens à leur disposition. Ils peuvent par exemple agir par le biais d’une motion ou nommer des experts pour enquêter sur l’un ou l’autre point.

«Il risque d’y avoir des troubles majeurs si la situation n’est pas réglée», prévient pour sa part Doris Leuenberger.

La vice-présidente de la LSDH rappelle encore que la menace de grève de la faim lancée par les détenus reste envisagée si les autorités ne prennent pas en compte leurs revendications.

Situation difficile

La prison de Champ-Dollon est connue pour être la prison la plus surpeuplée du pays. Elle contient actuellement 485 prisonniers pour une capacité de 270 places.

Le mois dernier, les autorités ont annoncé vouloir construire un nouveau quartier carcéral adjacent à la prison. Devisé à près de 10 millions de francs, celui-ci offrirait des cellules pour 64 détenus.

«Le problème de la surpopulation fait que les conditions normales ne peuvent pas être respectées. Le problème de l’accès aux soins nous parvient de façon récurrente», explique ainsi Damien Scalia, membre du comité prison de la LSDH.

Directeur des prisons genevoises, Constantin Fanziskakis admet que la situation dans la prison est actuellement «très difficile». Il compte sur la nouvelle construction pour améliorer les choses.

swissinfo et les agences

Selon l’Office fédéral de la statistique:

La population carcérale dans les prisons suisses a dépassé les 6’000 personnes pour la première fois l’an dernier.
Cela représente une augmentation de 15% par rapport à l’année précédente.
Sur les 122 centres de détention, 40 étaient pleins et neuf souffraient de surpopulation.
Champ-Dollon a le taux d’occupation moyen le plus élevé (162%) avec 438 détenus pour 270 places.
Les détenus étrangers composent plus de la moitié de la population carcérale de la prison.

Selon l’article 48 de la Constitution fédérale, les cantons suisses peuvent conclure des conventions (concordats) entre eux et créer des institutions communes dans leurs domaines de compétence.

C’est le cas pour l’exécution des peines, répartie en trois concordats régionaux: en Suisse orientale, Suisse centrale et du nord ainsi que Suisse romande et Tessin.

La Suisse compte en tout 9 établissements fermés et 10 semi-ouverts, de nombreuses prisons régionales et des centres de détention préventive.

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