Le Conseil des Etats ouvre la voie au don d’ovules
(Keystone-ATS) Le don d’ovules devra être autorisé en Suisse au même titre que le don de sperme. Suivant le National, la Chambre des cantons a accepté mardi par 22 voix contre 20 une motion en ce sens en dépit d’une forte opposition du Centre et de l’UDC.
Les couples mariés, dont l’homme est infertile, peuvent actuellement recourir au don de sperme. Si la femme est infertile, les époux doivent en revanche se rendre à l’étranger pour réaliser leur souhait d’avoir un enfant. La Suisse et l’Allemagne sont les deux seuls pays d’Europe à ne pas autoriser les dons d’ovules.
Les femmes doivent avoir les mêmes droits que les hommes, a déclaré Marina Carobbio Guscetti (PS/TI) pour la commission. Une infertilité peut être la conséquence d’une ménopause prématurée, une endométriose ou un traitement d’un cancer, a énuméré la Tessinoise.
Espoir pour les couples
Il ne faut pas renvoyer cette demande à un grand débat éthique, selon Matthias Michel (PLR/ZG). Les conditions cadre seront réglées au moment d’élaborer la loi. Aujourd’hui, il s’agit d’envoyer un signal « pour aider de nombreux couples en Suisse, pour plus d’égalité et pour les droits fondamentaux », a-t-il ajouté.
Le « tourisme reproductif » est problématique, a renchéri Elisabeth Baume-Schneider (PS/FR). Les chiffres sont sans doute sous-estimés, mais une étude a montré qu’en 2019, 516 personnes domiciliées en Suisse ont fait le voyage pour une intervention de procréation médicalement assistée, dont 82% des patientes étaient concernées par le don d’ovules. Ces chiffres démontrent la nécessité d’une base légale.
Beaucoup de questions ouvertes
Mais la proposition a rencontré une forte opposition. Isabelle Chassot (C/FR) a plaidé pour attendre l’évaluation sur la loi sur la procréation médicalement assistée avant de décider du principe du don d’ovules. Il y a plein d’aspects éthiques sensibles à examiner.
Citant la commission nationale d’éthique, elle a mentionné la limite d’âge de la receveuse, l’accès à des bases de données pour le choix de la donneuse et le principe de la gratuité du don. Andrea Gmür-Schönenberger (C/LU) craint elle une exploitation des donneuses. « Pas tout ce que le progrès médical permet doit être autorisé », selon elle.
Rapport dans quelques mois
Le Conseil fédéral était aussi opposé au texte. Un rejet de la motion aujourd’hui ne préjuge pas de la position finale sur le don d’ovules, a déclaré le ministre de la santé Alain Berset. Il s’agit d’attendre quelques mois, afin d’avoir l’évaluation de la loi sur la table.
Comme Isabelle Chassot, il a cité plusieurs points à résoudre, comme de savoir qui peut recourir au don d’ovules, quels droits à donner aux donneuses, la nécessité d’un registre de donneuses, le droit des enfants à connaître leur ascendance génétique. En vain. La motion a passé malgré un vote groupé du Centre et de l’UDC.
Pas de gestation pour autrui
Le texte est ciblé. Seuls les couples, dont les femmes sont infertiles, pourront avoir accès aux dons d’ovules. La gestation pour autrui est exclue. Le National avait adopté la motion par 107 voix contre 57 et 16 abstentions.
Jusqu’à présent, la légalisation du don d’ovules n’a jamais trouvé de majorité sous la Coupole. Un projet similaire a été classé en 2016. Le thème avait été jugé trop complexe pour que le Parlement légifère seul. Le timing était aussi mauvais, juste avant la votation sur le diagnostic préimplantatoire.