Le National accepte l’échange automatique d’informations
(Keystone-ATS) Le glas du secret bancaire va bientôt sonner. Le Conseil national a donné mercredi facilement son feu vert au passage à l’échange automatique d’information, mais aussi surpris en faisant un geste en faveur d’une amnistie fiscale. Le dossier passe au Conseil des Etats.
Presque tous les partis ont soutenu le projet du gouvernement en faveur de l’échange automatique d’informations en matière fiscale. Très enthousiaste, la gauche a parlé d’un jour historique à savourer. Plus résignée, la droite a admis que dans le climat actuel, le passage à l’échange automatique de renseignements est inéluctable pour assurer la compétitivité de la place financière suisse et l’économie suisse.
Seule l’UDC a mis les pieds au mur. L’Etat communiquera des millions de données sur des citoyens même pas soupçonnés de délits. Il n’a rien à faire dans la sphère privée des particuliers, a fustigé le banquier zurichois Thomas Matter. Les coups de canif du parti n’ont toutefois eu que très peu de succès.
Echange automatique et spontané
Deux voies mèneront à l’échange automatique de renseignements et pourront coexister. La première passe par la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe et de l’OCDE sur l’assistance administrative en matière fiscale qui intègre la nouvelle norme. Toujours transmises sur demande, les informations le seront désormais aussi de manière automatique ou spontanée.
Par 119 voix contre 51, le National a soutenu le texte avec les réserves proposées par le Conseil fédéral. Pas question de faire de l’assistance au recouvrement pour un autre Etat ni de transmettre des renseignements sur d’autres impôts que le revenu ou la fortune.
Les faits antérieurs à 2014 ne pourront pas faire l’objet de poursuites pénales et les contribuables seront en principe informés d’une communication sur demande ou spontanée d’informations les concernant. Exclus encore les contrôles fiscaux étrangers en Suisse et l’assistance à la notification de documents.
Activation bilatérale
La convention n’est pas applicable directement. La Suisse devra l’activer via des accords bilatéraux avec les pays de son choix.
La seconde voie pour introduire l’échange automatique de renseignement passe par l’accord multilatéral dit MCAA (Multilateral Competent Authority Agreement), qui définit par exemple qui transmet quelles informations sur quels comptes.
Accepté par 119 voix contre 52, ce texte permettrait une application uniforme de la convention et éviterait de devoir modifier chaque accord bilatéral en cas de changement de la norme. Une nouvelle loi d’application règle les procédures.
Les institutions financières collecteront les renseignements sur leurs clients résidants à l’étranger et les transmettront une fois par an à l’Administration fédérale des contributions qui les enverra aux autorités fiscales des pays avec lesquels la Suisse pratique l’échange automatique de renseignements.
250’000 francs d’amende
Les banques qui violeront leurs obligations de déclaration et de diligence risqueront jusqu’à 250’000 francs d’amende. Le National a toutefois décidé d’être clément avec les clients. Ceux qui donneront des renseignements incorrects à leur banque ou ne lui communiqueront pas un changement de leur situation par simple négligence ne risqueront pas 10’000 francs d’amende.
La Chambre du peuple a aussi renforcé la protection des clients étrangers. Ils devraient pouvoir contester devant un juge la transmission de ses données si l’Etat étranger concerné ne donne pas de garanties au niveau de l’Etat de droit, a-t-elle complété tacitement.
Certains Suisses concernés
Le projet ne supprime pas le secret bancaire pour les Suisses, a répété la ministre des finances Eveline Widmer-Schlumpf. Seuls les clients d’une banque suisse résidant à l’étranger ou les contribuables helvétiques ayant des comptes à l’étranger pourront voir leurs données échangées automatiquement.
L’Administration fiscale des contributions pourra transmettre les renseignements reçus à d’autres autorités qu’elles pourraient intéresser. Mais il s’est fallu d’une seule voix pour que le National ne biffe pas cette disposition à la demande de l’UDC.
Amnistie fiscale
Une amnistie fiscale devrait encourager les clients à régulariser leurs fonds. Contre l’avis de la gauche et de la grande argentière, la Chambre du peuple a retenu une proposition de Fabio Regazzi (PDC/TI) par 85 voix contre 80. Les contribuables ayant caché de l’argent au fisc auraient deux ans pour les déclarer et seraient redevables des arriérés pour cinq au lieu de dix.