Les chansons de Boris Vian en images
Pour la troisième fois, le 9e art s´intéresse à l´œuvre chantée de Boris Vian. Album collectif, «Boris Vian en images et en bande dessinée», vient de paraître, sous l´œil à la fois concerné et libertaire de la détentrice des droits, Ursula Vian.
«Boris, ça l’aurait beaucoup fait rire!», déclare Ursula Vian Kübler, d’origine zurichoise, qui fut l’épouse de Boris Vian dès 1954, jusqu’à sa mort en 1959.
A propos, appréciait-il la BD, par exemple Tintin? Ou celui-ci était-il trop sage pour l’auteur de «L’écume des jours»? «Non non, pas du tout, il aimait bien Tintin, il l’a fait lire à son fils, il a toujours apprécié la bande dessinée, ça l’amusait!» se souvient Ursula Vian Kübler.
Laisser jouer les gens
«Boris Vian en images et en bande dessinée» vient de paraître aux Editions Vents d’Ouest, faisant suite à deux autres ouvrages dont la démarche était assez similaire: «Chansons de Boris Vian en bande dessinée» d’Olivier Petit, et «Le Vian», chez Mango Jeunesse. Comment Ursula Vian Kübler décide-t-elle d’accorder ou non les droits de publication à un projet?
«J’ai toujours été d’avis qu’il ne fallait rien retenir, qu’il ne fallait pas faire de censure abusive. Qu’il fallait laisser jouer les gens avec ce que Boris a écrit, parce que les mots sont faits pour qu’on joue avec eux. Et puis, si des gens prennent le risque d’adapter quelque chose et que ça n’est pas bon, c’est de leur faute. Et ça ne touche pas Boris Vian. Ma politique à toujours été de laisser faire et de ne pas interdire. Il est interdit d’interdire». Le climat ambiant n’est donc pas le même autour de l’œuvre de Vian qu’autour de celle d’Hergé…
Et les personnages inventés par Vian s’en portent fort bien. Dans cet album collectif, où l’on trouve notamment les noms de Cabu, Fred, Solé, Rabaté ou Christian Godard, la galerie de personnages inventée par l’ingénieur-écrivain-trompettiste-chanteur reprend vie: les fiers-à-bras du «Cinématographe», les sanguinolents «Joyeux Bouchers», ou, évidemment, l’historique «Déserteur», et cela dans une variété de styles graphiques réjouissante.
Des romans en cinq minutes
Entre sa passion pour le jazz et la littérature, quelle place tenait la chanson dans la vie de Boris Vian? «La chanson, comme il disait, lui permettait de faire des romans en cinq minutes. Et puis, il fallait bien vivre… Comme ses romans ne se vendaient pas, il a pensé qu’avec la chanson cela pourrait peut-être aller plus vite». Pourtant, Vian ayant quelques longueurs d’avance en matière de chanson aussi, le public ne se pressa guère au portillon.
«C’est parce que je l’ai entendu que je me suis décidé à tenter de faire quelque chose d’intéressant dans cet art mineur», a dit Gainsbourg. D’une certaine façon, Serge fut-il l’héritier de Boris? «Un héritier, non… Mais un frère. C’est la même espèce, quelque part. Sauf que Gainsbourg prétendait que la chanson est un art mineur». Et Ursula Vian Kübler de citer son mari: «La chanson n’a rien d’un genre mineur. Le mineur ne chante pas en travaillant. Et Walt Disney l’a bien compris, qui faisait siffler ses nains!»
Décidément, cela ne devait pas être triste, entre 54 et 59, au 6bis de la cité Véron, à Paris, siège aujourd’hui de la «Fondation Boris Vian».
swissinfo, Bernard Léchot
Né en 1920 à Ville-d’Avray, dans les Hauts-de-Seine, ingénieur de formation, Boris Vian débute sa carrière artistique en tant que trompettiste dans les clubs de jazz de Saint-Germain-des-Prés.
Il connaît le succès – et le scandale – grâce à ses pastiches de romans noirs américains qu’il écrit sous le pseudonyme de Vernon Sullivan: ‘J’ irai cracher sur vos tombes’, l’un des best-sellers de l’année 1947, ‘Et on tuera tous les affreux’, ‘Les Morts ont tous la même peau’.
Les romans qu’il publie sous son véritable nom dans les années d’après-guerre, ‘Vercoquin et le plancton’, ‘L’ Ecume des jours’ ou encore ‘L’ Arrache-coeur’, ne lui apportent pas la notoriété escomptée.
Egalement auteur de pièces de théâtre, de chansons et de poèmes, Boris Vian ne s’éoignera jamais beaucoup de la musique: en tant que musicien, que chanteur, que chroniqueur musical et que directeur artistique chez Philips, puis Fontana et Barclay.
Malade du cœur depuis l’adolescence, il meurt à l’âge de 39 ans, lors de la première du film tiré de son roman «J’irai cracher sur vos tombes».
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