Les Suisses acceptent le durcissement sur les armes, l’UDC « triste »
(Keystone-ATS) La loi sur les armes pourra être adaptée au droit européen et la Suisse rester dans Schengen. Dimanche, 63,7% des votants ont accepté de durcir la réglementation. Les partisans sont soulagés, alors que les opposants dénoncent une campagne biaisée.
La révision découle des nouvelles mesures antiterroristes de l’UE. Certaines armes utilisées lors des attentats de Paris, Bruxelles ou Copenhague étaient des armes semi-automatiques. L’enjeu était important pour le Conseil fédéral: si la révision avait été rejetée, la Suisse aurait dû quitter l’alliance des Etats Schengen et Dublin.
Les milieux du tir, à l’origine du référendum, et l’UDC – seul grand parti à les soutenir-, ont manqué leur cible. Ils craignaient une loi « liberticide » qui aurait touché de plein fouet les compétitions de tir et les manifestations populaires comme le tir en campagne. Pour eux, la révision était en outre inutile, aucune arme légale n’ayant été utilisée lors des derniers attentats.
Leurs arguments n’ont pas fait mouche, si ce n’est au Tessin, qui a rejeté le texte à 54,5%. Tous les autres cantons ont accepté le durcissement de la loi. Les pourcentages s’échelonnent entre 75% pour Bâle-Ville, 73% pour Genève et Neuchâtel, et 52% pour Schwyz et Obwald.
« Fausses déclarations »
Pour le co-président du comité référendaire, Werner Salzmann (UDC/BE), « les déclarations selon lesquelles les tireurs ne sont pas touchés sont simplement fausses. » 80% d’entre eux tirent avec des armes semi-automatiques, a-t-il rappelé à Keystone-ATS.
Selon le Bernois, la Suisse n’aurait par ailleurs pas été automatiquement éjectée de Schengen en cas de « non ». Le comité mixte aurait eu 90 jours pour proposer une solution.
« Aujourd’hui, nos libertés ont reculé », a de son côté estimé Jean-Luc Addor (UDC/VS), président de ProTell. « On a réussi à faire croire que cette modification touche très peu de monde, mais elle va toucher des centaines de milliers de Suisses qui n’ont rien fait », a-t-il rappelé sur la RTS. « Je suis triste comme un stand de tir vide. »
Accès plus difficile
La loi rendra plus difficile l’accès aux armes susceptibles de faire beaucoup de victimes. Elle interdira les armes semi-automatiques à épauler équipées d’un chargeur de grande capacité, 10 cartouches pour les pistolets et 20 cartouches pour les fusils. Les détenteurs d’une arme à feu passant dans la catégorie des armes interdites pourront se contenter d’une simple annonce à leur canton dans un délai de trois ans.
L’acquisition d’une telle arme et son utilisation pour le tir sportif resteront possibles, sous réserve d’une autorisation exceptionnelle au lieu d’un permis d’acquisition. Les concernés devront en outre prouver, après cinq et dix ans qu’ils sont membres d’une société de tir ou pratiquent régulièrement le tir.
Le marquage des armes permettra de les tracer plus aisément et les échanges dans le cadre de l’espace Schengen seront améliorés. La collaboration avec l’Europe est d’une grande importance pour la sécurité intérieure et pour l’asile.
En outre, le fusil ne sera pas classé dans la catégorie des armes prohibées lorsque son propriétaire décide de le garder à la fin de son service militaire. Il ne le sera que s’il est transmis à un héritier ou vendu. Berne a obtenu plusieurs dérogations de l’UE, notamment sur l’arme d’ordonnance.
Posséder une arme ne devrait pas coûter plus cher avec l’application de la réforme de la loi sur les armes, a promis en conférence de presse la ministre de justice et police Karin Keller-Sutter. L’octroi d’un permis pour les armes semi-automatiques coûtera 50 francs, comme c’est le cas actuellement. A l’origine, le prix devait passer à 100 francs.
Besoin de Schengen
Les partisans sont soulagés et satisfaits par le résultat. « Nous avions besoin de rester dans Schengen et nous avions besoin de l’accès à ce système Schengen », a lâché Béatrice Métraux, cheffe de la sécurité du canton de Vaud au micro de la RTS. Elle craignait avant tout les conséquences sécuritaires et économiques.
« Nous reconnaissons un certain besoin de rester dans Schengen/Dublin, mais pour autant, on ne peut pas tout accepter », souligne Céline Amaudruz, vice-présidente de l’UDC. Cette dernière émet des inquiétudes pour le futur.
Elle relève notamment que l’Europe « va pouvoir un peu nous dicter ce qu’elle veut en jouant sur deux- trois piliers qui semblent centraux pour nos opposants ». Selon Mme Métraux, personne ne s’est couché devant l’UE. La tradition suisse du tir va demeurer. Elle n’est pas remise en cause par la loi.