Miss Suisse, anatomie d’un succès
Samedi soir à Genève, la couronne de Miss Suisse est revenue à Christa Rigozzi, de Monte Carasso (Tessin), 23 ans, licenciée en criminologie, élue parmi 14 autres finalistes.
Contrairement à la plupart des pays européens, la Suisse et ses médias plébiscitent ces reines de beauté qui offrent l’image d’une Suisse glamour, ambitieuse et ouverte sur le monde.
«Je suis en même temps tellement heureuse et tellement nerveuse.» Christa Rigozzi a répété ces mots dans les trois principales langues nationales après avoir été sacrée samedi soir à l’Arena de Genève.
La lauréate blonde rayonnait en recevant la couronne des mains de la tenante du titre, la Vaudoise Lauriane Gilliéron, très émue en déclarant: «Pour moi, c’est la fin d’une nouvelle vie.»
La première dauphine de Christa Rigozzi est également une Tessinoise mais d’origine russe, Xenia Tchoumitcheva, et Sabine Heierli, de Teufen (Argovie), est deuxième dauphine.
Un succès sans précédent
Lauriane Gilliéron, qui a rendu sa couronne samedi soir, a gagné près d’un demi-million de francs grâce à son titre de plus belle des Suissesses. Ce montant, le plus élevé jamais obtenu par une reine de beauté helvétique, découle du succès grandissant rencontré par ce concours.
Avec Lauriane Gilliéron – première miss francophone depuis des lustres – cette élection déjà très suivie en Suisse alémanique a définitivement conquis la Suisse romande et ses médias, selon Karina Berger, l’une des organisatrices de la compétition.
Pour preuve: la couverture du numéro de juin du très sérieux mensuel économique «Bilan», où la Vaudoise s’affiche en pleine page avec un petit air de Lauren Bacall.
Ces traits hollywoodiens expliquent – du moins en partie – un autre record arraché par cette universitaire plurilingue: la 3e place de Miss Univers 2006, la plus haute distinction obtenue par une Helvète. Une percée qui a fait saliver le célèbre Larry Flynt et son magazine «Hustler» ou son concurrent «Playboy», sans que la belle ne cède à ces avances.
Une beauté assumée
«Lauriane ne s’excuse pas d’être belle. Elle est ambitieuse et cultive une relation très décomplexée au monde», relève Christophe Passer en guise de première explication au formidable succès du phénomène «Miss Suisse» cette année.
Et le rédacteur en chef de «L’Illustré» – hebdomadaire sponsor de l’événement – d’ajouter: «Depuis leur arrivée, il y une dizaine d’années, les organisateurs du concours ont su le dépoussiérer et le moderniser grâce à la télévision.»
«De son coté, le public ne méjuge plus les lauréates de ce concours, avance encore Christophe Passer. Aujourd’hui, il n’y a plus de honte à vouloir tenter sa chance, à l’instar des candidats de Pop Star, l’équivalent de la française Star Academy.»
Reste qu’ailleurs en Europe – à part peut-être en France – les concours de beauté ne surexcitent plus les foules depuis des lustres. «En Italie, tout le monde s’en fout», résume abruptement Fabrizio Sabelli, avant de rappeler que, dans les années 60, toutes les stars du cinéma transalpin avaient démarré par des concours de miss.
«L’engouement des Suisses pour ce concours a donc quelque chose d’anachronique. Mais il s’explique par des caractéristiques spécifiques à ce pays», ajoute l’anthropologue.
L’envie d’exister par procuration
«Beaucoup de citoyens de ce pays aimeraient participer à l’aventure planétaire, explique Fabrizio Sabelli, alors que le gouvernement suisse, lui, ne veut ou ne peut s’engager activement sur la scène internationale et continue de cultiver, dans son ensemble, une attitude de repli dictée par des considérations économiques et stratégiques.»
En s’emballant pour Miss Suisse, le tennisman Roger Federer, les footballeurs suisses ou l’équipe Alinghi, les Suisses ont le sentiment d’exister, par procuration, au-delà des frontières, selon ce fin connaisseur de la culture helvétique.
Ces nouveaux héros jeunes, dynamiques et glamour représentent et façonnent également une nouvelle image de la Suisse. «Ils participent au marketing du pays et proposent un Swiss made en phase avec le monde globalisé d’aujourd’hui», souligne Fabrizio Sabelli.
swissinfo, Frédéric Burnand à Genève
– Christa Rigozzi, de Monte Carasso (Tessin), a été élue Miss Suisse samedi à Genève. Agée de 23 ans, elle mesure 1,69 mètre pour des mensurations de 88-63-96 et est licenciée en criminologie.
– Sa première dauphine est la Tessinoise d’origine russe Xenia Tchoumitcheva, également nommée Miss photogénique. Sabine Heierli, de Teufen (Appenzell Rodhes Extérieures), est 2e dauphine.
– Le concours était retransmis en direct sur les trois chaînes de télévision nationales. La belle a été élue parmi 14 autres candidates par un jury et par le public, au dernier tour uniquement par ce dernier. Quelque 150’000 votes ont été enregistrés.
– Miss Univers, concours international de beauté féminin réservé aux jeunes femmes de 18 à 25 ans, existe depuis 1926 et est actuellement organisé par la chaîne de télévision américaine NBC.
– L’autre grand concours, Miss Monde, est apparu en 1951 au Royaume-Uni. Initialement, il s’intitulait Festival Bikini, car il a été créé pour lancer la mode du célèbre maillot de bain.
– Le concours Miss Suisse existe depuis 1976 et celui de Miss Suisse romande depuis 1988.
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