Perquisitions chez General Electric à Belfort
(Keystone-ATS) Des perquisitions ont été diligentées jeudi sur le site du géant industriel américain General Electric à Belfort dans le cadre d’une enquête pour blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée, les syndicats dénonçant un schéma d’optimisation vers des paradis fiscaux.
Cette enquête avait été ouverte par le parquet national financier (PNF) à la suite d’un signalement effectué par le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, en juillet 2019, sur des « soupçons d’optimisation et fraudes fiscales de General Electric » (GE) en Suisse.
« GE respecte la réglementation de tous les pays dans lesquels l’entreprise opère », a réagi auprès de l’AFP un porte-parole du groupe, confirmant la perquisition et assurant collaborer « pleinement avec les autorités ».
Les perquisitions chez General Electric Energy Products France, révélées par le site Letrois.info et confirmées à l’AFP par le PNF, ont été réalisées par le Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), chargé des investigations.
Jeudi matin, le comité social et économique (CSE) de l’entité turbines à gaz, organisé en visioconférence, a été interrompu brusquement.
« Aujourd’hui, sur notre site TE05, la société fait l’objet d’une perquisition menée par des officiers de police judiciaire », peut-on lire dans un courriel de la direction envoyé en fin de matinée aux salariés.
Suisse et Delaware
Le rachat en 2015 par General Electric de l’activité turbines d’Alstom à Belfort, berceau historique de cette activité en France, n’a cessé d’alimenter la controverse, notamment en raison de promesses de créations d’emplois non tenues. Des pénalités ont été payées.
L’enquête qui a donné lieu aux perquisitions vise des soupçons de fraude fiscale.
Selon une source proche de l’enquête, elle porte sur les prix de transferts du groupe, ces remontées de flux financiers de la France vers la maison mère ou d’autres filiales.
La multinationale américaine aurait fait échapper des centaines de millions d’euros de bénéfices vers la Suisse et les Etats-Unis – notamment dans l’Etat du Deleware connu pour sa fiscalité avantageuse – grâce à un montage financier faisant de l’usine de Belfort une simple « unité de fabrication sous contrat » ou « prestataire » de filiales suisses de GE.
L’usine belfortaine versait également des redevances à la maison mère américaine pour l’utilisation de sa marque et de ses technologies, selon des informations de presse parues au printemps.
Le Comité social et économique (CSE) et l’intersyndicale du site de Belfort avaient déposé une plainte fin mai qui a été jointe à l’enquête et qui accuse la société américaine d’avoir artificiellement minoré les bénéfices du site de Belfort par ce mécanisme ne respectant pas les règles sur les prix de transfert.
L’intersyndicale a comme avocat l’ancienne députée européenne et ancienne juge d’instruction spécialisée dans la lutte contre la corruption, Eva Joly.
GE a toujours assuré pour sa part avoir respecté les règles fiscales applicables en France.
« Toutes les entreprises qui opèrent et fabriquent dans plusieurs pays ont une politique de prix de transferts pour s’assurer que toutes les transactions inter-sociétés se font à un prix de pleine concurrence, c’est-à-dire à des prix qui s’appliqueraient aux transactions entre parties non liées », avait-il opposé.
A terme, le site de Belfort, où travaillent environ 2000 personnes, doit partiellement revenir dans le giron français: GE a signé en février un accord avec EDF pour lui céder d’ici à la fin 2023 son activité nucléaire dont les fameuses turbines à vapeur Arabelle destinées aux centrales nucléaires et construites à Belfort. Les turbines à gaz produites par GE à Belfort vont elles rester sous pavillon américain.