De plus en plus d’assistés, les communes aux abois
En Suisse, le nombre de personnes contraintes de solliciter l’aide sociale a frisé les 300'000 l’an dernier. Soit une hausse spectaculaire de 10%.
Les communes, qui supportent l’essentiel de cette charge, ne pourront plus y faire face très longtemps.
L’aide sociale, c’est la dernière bouée de sauvetage, notamment pour celles et ceux qui ont épuisé leurs droits à l’assurance chômage.
L’année dernière en Suisse, ils et elles ont été près de 300’000 à solliciter cette assistance publique, soit 10% de plus qu’en 2002.
L’augmentation représente l’équivalent de la population d’une ville comme Lugano. Et elle ne manque pas d’inquiéter les responsables.
La sonnette d’alarme
Lundi, la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) tire la sonnette d’alarme. Si aucune mesure n’est prise, le nombre de personnes contraintes de recourir à l’aide sociale pourrait atteindre 400’000 en 2007. Soit 6% de la population suisse.
Dans ces conditions, les cantons et les communes, principaux bailleurs de fonds de l’aide sociale, ne pourront bientôt plus suivre, avertit Walter Schmid, président de la CSIAS.
Qui sont ces pauvres, dont le nombre ne cesse de croître? Selon Philippe Meystre, secrétaire pour la Suisse latine de l’Initiative des Villes pour la politique sociale, les purs marginaux, toxicomanes et autres SDF ne représentent qu’une fraction infime de cette population.
Les familles d’abord
Les trois grandes catégories de bénéficiaires de l’aide sociale sont des familles – surtout monoparentales -, des «working poors» et des gens contraints de solliciter l’assurance invalidité et qui peuvent attendre jusqu’à deux ans avant que celle-ci ne statue sur leur cas.
En outre, les étrangers sont sur-représentés dans cette population par rapport à leur nombre dans la population globale.
La morosité n’explique pas tout
«La morosité économique explique en partie cette augmentation, reconnaît Urs Geissmann, directeur de l’Union des villes suisses (USV). Mais il y a aussi le raccourcissement de la durée des prestations de l’assurance chômage, à laquelle nous étions opposés».
En 2003, certaines villes ont vu leurs budgets d’aide sociale augmenter de 20% et se trouvent désormais prises à la gorge.
C’est la raison pour laquelle l’UVS soutient le référendum lancé par les cantons contre le paquet fiscal de la Confédération, qui risque de leur faire encore perdre 500 millions de francs de recettes.
Les solutions existent
Faut-il s’attendre à une embellie avec la reprise économique annoncée pour 2004?
Ueli Tecklenburg, secrétaire de la CSIAS, n’est guère optimiste. Selon lui, «le nombre des gens qui tombent à l’aide sociale augmente quand la conjoncture est mauvaise, mais lorsqu’elle s’améliore, ce nombre ne fait que de se stabiliser».
Les solutions existent pourtant. L’Initiative des Villes pour la politique sociale, qui est une émanation de l’UVS, tente de convaincre le monde politique d’adopter quatre grandes idées.
La première serait de garantir les allocations familiales à tous et non seulement à celles et ceux qui travaillent. «De plus, il nous faut un système fédéral unifié d’allocations familiales, comme nous l’avons pour la vieillesse et l’invalidité», plaide Philippe Meystre.
Le second axe concerne la fiscalité. L’Initiative des Villes demande des déductions pour les familles qui tiennent réellement compte de leurs charges. Ainsi que des crèches et des garderies plus nombreuses et moins chères.
Enfin, l’Initiative des Villes voudrait introduire un système de prestations complémentaires pour les familles dont les charges dépassent les revenus. «On pourrait prendre modèle sur ce qui se fait déjà au Tessin», suggère Philippe Meystre.
swissinfo et les agences
Selon les estimations de la Conférence suisse des institutions d’action sociale:
Une famille avec deux enfants a besoin d’un minimum de 4’367 francs par mois pour vivre (loyer et assurances compris)
Une personne sans emploi vivant seule a besoin de 2’056 francs
Un parent élevant seul un enfant a besoin de 2’939 francs
– Selon une étude de l’OCDE, une personne sur deux parmi celles qui se trouvent dans le besoin en Suisse ne sollicite pas l’aide sociale.
– Selon l’oeuvre d’entraide Caritas, les pauvres seraient même 850’000 en Suisse, alors que 300’000 seulement sollicitent l’aide sociale.
– La morosité économique et la diminution du nombre de jours durant lesquels les chômeurs touchent des allocations a fait augmenter de 10% le nombre des assistés en 2003.
– La plupart de ces personnes sont des familles, surtout monoparentales, des « working poors » et des gens en attente d’une décision de l’Assurance Invalidité.
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