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Le chômage des jeunes, ‘bombe à retardement’?

Le chômage des 20-24 ans a atteint 6,8%. Keystone Archive

Les syndicats annoncent une mobilisation contre le chômage croissant des jeunes, le patronat veut calmer le débat et le gouvernement propose un plan d’action…

Ce thème est au menu des entretiens de Watteville, qui réunissent vendredi une délégation du Conseil fédéral et les chefs des partis gouvernementaux.

«Le chômage des jeunes est une bombe à retardement. Le temps de l’apaisement est fini il faut agir, et vite!» En début de semaine, par la voix de son secrétaire central, le syndicat Travail.Suisse a tapé sur la table.

Le week-end dernier, déjà, la jeunesse du syndicat Unia, l’autre grande centrale syndicale, a tenu sa première conférence nationale à Lausanne. Forte de 35’000 membres, Jeunesse Unia a annoncé le lancement pour le printemps d’actions choc pour sensibiliser l’opinion et les décideurs au chômage et à la protection des jeunes travailleurs.

C’est que la publication, lundi, des statistiques du chômage en janvier montrait une nouvelle augmentation du chômage des 20-24 ans. Lequel a atteint 6,8%, alors que la moyenne pour l’ensemble de la population active est de 4,1%.

En comptant aussi les étudiants en quête d’une activité accessoire, ce taux atteint… 7,7%. «Les méthodes de calculs peuvent diverger, mais c’est trois fois plus qu’il y a 4 ans», s’inquiète Jean-Christophe Schwaab, secrétaire central à la Jeunesse Unia.

Pénurie de places d’apprentissage

Ce dernier estime qu’il faut d’autre part augmenter les places d’apprentissage et de stages. «Alors qu’il y a plus de 200’000 apprentis, 20’000 jeunes attendent une place; ils risquent de tomber dans la précarité des petits jobs non qualifiés», ajoute Jean-Christophe Schwaab.

Autre sujet d’inquiétude: le gouvernement a transmis au parlement son projet de révision de la loi sur le travail. Un projet qui prévoit d’abaisser l’âge limite de protection des travailleurs.

Conséquence: les apprentis et les jeunes employés risquent de devoir bientôt travailler la nuit et le dimanche dès 18 ans, et non plus 20.

Les jeunes trop difficiles?

A l’Office fédéral de la formation professionnelle (OFFT), Hugo Barmettler ne partage pas ces inquiétudes: «Il y a 10% de places vacantes, soit à peu près autant que de jeunes en attente, cela veut dire que certains se montrent difficiles et ne veulent pas changer d’orientation».

Mais l’OFFT a préparé de nouvelles mesures, à la demande de Joseph Deiss, ministre de l’Economie. «Avec l’appui de l’assurance-chômage, nous allons développer les semestres de motivation pour les jeunes, l’offre s’étendra à 10’000 places et le nombre de places de stages va être doublé à 6000 cette année», ajoute M. Barmettler.

Autre innovation, la formation professionnelle initiale sur deux ans pour obtenir un diplôme fédéral sera lancée à la prochaine rentrée. M. Barmettler note aussi que dès 2006, le nombre d’élèves en fin de scolarité obligatoire va diminuer et donc celui des apprentis.

Ne pas tout mélanger

L’Union suisse des arts et métier (USAM) de son côté ne s’affole pas. C’est ce qu’elle a indiqué jeudi à Berne lors de sa conférence de presse annuelle. «Il n’y a pas de raison de s’alarmer», note la centrale des petites et moyennes entreprises.

Pierre Triponez, son directeur, estime qu’«il ne faut pas confondre le chômage avec les places d’apprentissage».

Certes, il reconnaît que «le problème est réel chez les 20-24 ans, dont le taux de chômage est très élevé. Cela signifie que le problème intervient à la fin de l’apprentissage ou des études.» Pierre Triponez ajoute que la durée du chômage des jeunes est réduite par rapport à leurs aînés.

Pour ce qui est de l’apprentissage, par contre, Pierre Triponez annonce que 71’500 places seront offertes en août prochain, soit 1500 de plus qu’en 2004.

Comment intéresser plus d’entreprises (une sur 3, voire sur 5 selon les syndicats, ont des apprentis) à former des jeunes? Pierre Triponez répond en rappelant que «99% des entreprises suisses sont de très petite taille, avec une ou deux personnes seulement. Elles n’ont donc pas la possibilité, et même parfois la capacité, de former des jeunes».

Le «plan d’action» de Joseph Deiss

Vendredi, Joseph Deiss doit présenter aux chefs des partis gouvernementaux son plan d’action pour améliorer l’apprentissage, en réponse en partie aux requêtes des milieux politiques.

Jean-Christophe Schwaab se dit content de ce que le ministre de l’Economie ait déjà exprimé sa préoccupation. «Il nous l’a dit lorsqu’il nous a reçu le 3 février dernier, alors qu’auparavant, il avant tendance à dédramatiser la situation.»

Quant aux propositions concoctées par l’OFFT et présentées par Joseph Deiss, Jean-Christophe Schwaab les juges «faibles». «C’est bien joli d’augmenter les places de stage, mais si ce n’est pas associé à une vraie perspective professionnelle, cela risque de simplement allonger la liste d’attente.»

Et de conclure sur une note positive: «Je relève que l’on parle de plus en plus des problèmes des jeunes et c’est, en soi, un grand progrès.»

swissinfo, Isabelle Eichenberger

La jeunesse Unia a tenu sa 1ère conférence nationale le week-end dernier à Lausanne.
Avec ses 35’000 membres de moins de 30 ans, ce groupe syndical est le plus grand mouvement de jeunesse politique de Suisse.
Au printemps, il va lancer des actions contre le chômage.
De même la Jeunesse Unia va se mobiliser contre le projet gouvernemental de révision de la loi sur le travail, un projet qui préconise l’abaissement de l’âge limite de protection de 20 à 18 ans.

-Les 15-24 ans (30’494) restent proportionnellement les plus frappés par le chômage en Suisse, avec un taux de 5,5% (4,1% pour les 25-49 ans).

– Alors qu’il y a plus de 200’000 apprentis, 20’000 jeunes attendent une place, alors qu’un nombre équivalent de places restent vacantes dans les entreprises.

– En Suisse (qui compte 95% de PME), environ 30% des entreprises offrent des places d’apprentissages, voire une sur 5 selon les syndicats .

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