Claudine Schmid, une exception à la «vague rose»
La Zurichoise née en Haute-Savoie représentera les Français de Suisse à l'Assemblée nationale. Une consécration pour cette femme de centre-droit, bien connue des expatriés.
Le parti socialiste a remporté la majorité absolue lors des élections législatives en France. Parmi les rares territoires qui échappent à cette «vague rose», la sixième circonscription des Français de l’étranger (Suisse-Liechtenstein), qui a élu dimanche une femme de centre-droit, Claudine Schmid.
Avec 57,6 % des suffrages, Claudine Schmid, affiliée au parti UMP, bat au second tour la socialiste genevoise Nicole Castioni (42,4%). Une victoire très satisfaisante pour cette femme née en Haute-Savoie, près de la frontière genevoise, et vivant à Zurich depuis 30 ans. «C’est une page blanche qui s’ouvre, il va falloir tout créer», affirme la nouvelle élue. C’est en effet la première fois que les Français de l’étranger envoient des députés à l’Assemblée nationale.
Ailleurs dans le monde, la gauche l’emporte largement. Même des «stars» du sarkozysme y laissent leur peau: en Amérique du Nord par exemple, l’ancien porte-parole de l’UMP Frédéric Lefebvre, très proche de l’ancien président Nicolas Sarkozy, sort battu des législatives.
«Je me suis battue»
Pourquoi la Suisse échappe-t-elle au «raz-de-marée»? Les Français y votent traditionnellement à droite. Au second tour de l’élection présidentielle, Sarkozy l’emportait facilement face à François Hollande.
Autre explication: la bonne implantation locale de Claudine Schmid. «Je me suis battue pour décrocher l’investiture de l’UMP», rappelle l’intéressée. Quand ces nouvelles circonscriptions des Français étrangers sont créées l’an dernier, plusieurs poids lourds du parti se découvrent soudainement une vocation helvétique. «Les dirigeants de l’UMP ont heureusement compris l’intérêt de présenter une candidature locale dans cette circonscription petite et dense», se félicite la nouvelle élue.
Claudine Schmid connaît la Suisse par cœur. Cette native de Saint-Julien-en-Genevois épouse dans les année 1980 Urs Schmid, aujourd’hui membre (libéral-radical, droite) du législatif de la ville de Zurich. Elle dispose d’un appartement à Genève, où elle installera sa permanence de parlementaire. Ses fonctions de représentante en Suisse de l’Assemblée des Français de l’étranger et de vice-présidente de l’Union des Français de l’étranger font d’elle l’interlocutrice privilégiée des expatriés.
Cette première élection n’a pas vraiment fasciné les Français de Suisse. Un peu moins de 22% du corps électoral a voté. «La campagne est resté confidentielle», reconnaît Claudine Schmid. Impossible de «faire les marchés» quand les 107’000 électeurs sont dispersés sur un si vaste territoire. «Les électeurs étaient souvent mal informés», ajoute Mme Schmid. La date du premier tour, fixée une semaine avant les législatives en France, n’a rien arrangé. «Et la multitude de candidats – 21 – a sans doute favorisé l’abstention», estime la députée.
Une affaire de femmes
Cette élection était une affaire de femmes: au premier tour, outre Claudine Schmid et Nicole Castioni, la radicale Micheline Spoerri, l’écologiste Magali Orsini et la centriste Marie-Françoise de Tassigny se disputaient les voix de la sixième circonscription des Français de l’étranger.
A Paris, Claudine Schmid retrouvera 154 autres femmes. Un chiffre sans précédent dans l’histoire de l’Assemblée, même si on est encore loin de la parité – 422 hommes ont été élus. Et alors? «On devrait toujours privilégier la compétence sur le sexe, estime la députée. La parité? C’est de l’habillage.» Autant dire que la désignation de 17 femmes au rang de ministres, sur les 34 que compte le gouvernement de gauche, laisse la députée indifférente. «Si elles sont qualifiées, pourquoi pas!»
À Paris dès cette semaine, Mme Schmid aura du pain sur la planche. Les projets socialistes, notamment sur le plan fiscal, inquiètent la nouvelle élue. Si le nouveau pouvoir tient ses promesses, il demandera la révision de la convention de double imposition franco-suisse, afin d’appliquer aux Français de Suisse l’impôt sur les grandes fortunes (ISF). Un processus complexe et inutile, estime Claudine Schmid. «Un échange de lettres entre Paris et Berne datant des années 1960 prévoit que les exilés fiscaux peuvent être imposés par le fisc français, remarque l’élue. Pas besoin donc de tout renégocier aujourd’hui.»
L’exemple de Bâle-Mulhouse
Pour Mme Schmid, les relations franco-suisses ne sont pas aussi mauvaises qu’on le dit. «La coopération en matière universitaire, militaire et policière est excellente. Et l’accord récent sur l’aéroport de Bâle-Mulhouse, qui fait prévaloir la législation suisse en matière de droit du travail même sur le sol français, constitue un progrès indéniable. Il pourrait servir un jour de modèle pour d’autres règlements transfrontaliers, par exemple à Genève.»
C’est plutôt entre la Suisse et l’Union européenne que des progrès restent à faire, estime la députée. En matière de santé par exemple, les Français de Suisse ne peuvent bénéficier du règlement européen qui permet de se faire soigner des deux côtés d’une frontière. «C’est très préjudiciable, notamment pour les femmes désirant accoucher en France, auprès de leurs familles», juge Claudine Schmid.
Le Parti socialiste (PS) et ses proches alliés (radicaux de gauche et divers gauche, sans compter les Verts) ont remporté une majorité absolue de 314 sièges sur 577 lors des législatives françaises, selon des résultats définitifs du ministère de l’Intérieur. Le PS pourra donc se passer du soutien des écologistes d’EELV (17 sièges) et du Front de gauche (10 sièges). Les 19 ministres du gouvernement en lice ont par ailleurs tous été élus ou réélus.
L’UMP a recueilli 194 sièges, le Nouveau centre et les divers centristes 14, les divers droite 15 et les radicaux 6, soit un total de 229 pour la droite. L’extrême droite en a trois, dont deux pour le FN, et le MoDem deux, lors de ce scrutin au taux d’abstention record (autour de 44%).
Près d’un mois et demi après avoir battu Nicolas Sarkozy et ramené la gauche à l’Elysée après 17 ans d’absence, François Hollande aura donc les mains libres pour appliquer son programme, de la réforme fiscale à la promesse d’un redressement industriel. Cette majorité absolue le dispense surtout de devoir composer avec le Front de gauche (gauche radicale) aux positions éloignées sur l’Europe et l’économie.
(Source:afp)
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