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En politique suisse, les réseaux sociaux ne font pas recette

La députée sortante Céline Amaudruz, également candidat au Conseil des États, répond aux questions des médias au centre de dépouillements des bulletins de vote de canton de Genève. Salvatore Di Nolfi/Keystone

En Suisse, les élections se jouent encore essentiellement sur les canaux traditionnels. La droite conservatrice a réalisé ce dimanche le deuxième meilleur score de son histoire, en investissant très peu dans les réseaux sociaux.

Grande gagnante des législatives fédérales, l’Union démocratique du centre (UDC) a bâti sa campagne en misant sur les canaux traditionnels. Le parti de la droite conservatrice est de loin celui qui a le moins investi dans les réseaux sociaux au cours de l’année électorale, selon l’analyse du site PolitransparencyLien externe.

Du 8 janvier au 15 octobre, l’UDC a dépensé 112’000 francs sur Facebook et Instagram. Un montant bien moins important que les 224’500 francs déboursés par les Vert-e-s ou les 252’700 francs investis par les Vert’libéraux, les deux partis perdants de ces législatives.

Le Parti socialiste (PS) a été le plus dépensier sur les plateformes de Meta, avec 429’100 francs, soit près de quatre fois plus que l’UDC. Le PLR a consacré un budget de 316’300 francs aux deux réseaux sociaux et Le Centre 280’800.

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L’UDC n’a certes pas été complètement absente des réseaux sociaux. Certains candidats y ont même été très actifs, avec des vidéos conçues pour attirer l’attention. Toutefois, le plus grand parti de Suisse a délibérément pris le contre-pied de ses adversaires, en choisissant de miser sur les canaux traditionnels pour la publicité payante, entre autres avec un tout-ménage envoyé à tous les foyers du pays. Une stratégie qui semble avoir porté ses fruits.

«Il est, pour l’instant, difficile de gagner de nouveaux électeurs via les réseaux sociaux, tout comme de mobiliser son propre électorat», confirme Marc Bühlmann, politologue et co-auteur de l’étude de l’APS. Il relève que, lorsqu’il s’agit de s’informer, la presse écrite reste importante pour une grande partie de celles et ceux qui se rendent aux urnes, soit les personnes d’âge moyen.

Et ce même si les partis tendent à délaisser les médias traditionnels pour leur campagne. Entre les élections fédérales de 2015 et celles d’aujourd’hui, le nombre d’annonces dans les médias imprimés a chuté de 70%, selon une étudeLien externe de l’Année politique suisse (APS). Le Parti libéral radical (PLR /droite) et l’UDC sont les deux formations restées les plus fidèles aux médias imprimés.

L’UDC, la plus présente dans la presse

La droite conservatrice a également bénéficié d’une importante visibilité dans la presse. Toujours selon l’étude de l’APS, sur 4106 articles analysés pendant huit semaines, l’UDC est le parti le plus souvent mentionné, comme le montre le graphique ci-dessous. Suivent le PS, le PLR, le Centre, les Vert-e-s et les Vert’libéraux.

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Ces proportions reflètent la force des partis à l’issue des élections de 2019. Les quatre partis gouvernementaux sont cependant légèrement surreprésentés par rapport aux autres partis. Ce qui joue en défaveur des Vert-e-s et des Vert’libéraux. «Il est étonnant de voir à quel point la presse écrite dans son ensemble parvient à refléter les rapports dominants en termes de force électorale», constate Marc Bühlmann.

«Il serait trop simple de conclure qu’un parti gagne parce qu’on en parle beaucoup», avertit toutefois le politologue. Il reconnaît néanmoins qu’être présent dans les médias permet indéniablement de mobiliser. «Il est important que l’on parle de vous. Que cette couverture médiatique soit positive ou négative importe peu», explique ce dernier.

Cela illustre la responsabilité des journalistes. «Les médias s’interrogent toujours pour déterminer dans quelle mesure ils doivent rendre compte des provocations pendant la campagne électorale», note Marc Bühlmann. Le politologue rappelle que, dans les années 1990 et 2000, les provocations de l’UDC ont toujours été rapportées. «Les médias ont ensuite dû constater que cela permettait au parti d’attirer encore plus l’attention», dit-il.

Marc Bühlmann
Marc Bühlmann est directeur de la plateforme Année Politique Suisse et professeur à l’Université de Berne. SRF

Pas de thème dominant

L’analyse de la couverture médiatique de la campagne électorale 2023 montre également qu’aucun thème n’a réussi à véritablement s’imposer par rapport aux autres. Un large éventail de sujets a été abordé, relève l’APS: les termes «caisse maladie et santé» sont certes apparus le plus souvent, mais la politique bancaire, les transports, l’énergie, la migration et le climat ont également été des thèmes présents dans les articles.

Alors que la politique migratoire avait été au centre des débats lors des élections de 2015 et la politique climatique en 2019, on ne peut pas parler en 2023 «d’une couverture médiatique essentiellement monothématique de la campagne électorale», relève Marc Bühlmann.

L’UDC a tiré profit de l’attention médiatique portée à la migration, son thème de prédilection, notamment en raison d’une nouvelle hausse des demandes d’asile en Suisse. En revanche, les écologistes n’ont pas réussi à utiliser le thème du réchauffement climatique à leur avantage. Les articles sur la politique climatique, par exemple sur les activistes qui se collent sur une route et bloquent ainsi la circulation, leur ont plutôt porté préjudice.

>> Huit choses à retenir de ces élections fédérales, lire notre analyse:

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