Le CICR poursuivra ses opérations en Colombie
Après plusieurs démentis, le président Alvaro Uribe a admis mercredi qu'un de ses officiers avait utilisé l'emblème de la Croix-Rouge lors de la libération des otages des FARC. L'organisation humanitaire ne se retirera pas de Colombie pour autant.
Mercredi, le chef de l’Etat colombien a expliqué lors d’une cérémonie publique qu’un officier de son armée engagé dans l’opération aérienne portait un brassard frappé de l’emblème de l’organisation humanitaire internationale.
L’homme aurait eu recours à la Croix-Rouge – qui garantit en principe l’immunité à celui qui la porte – parce que les dangers de l’opération l’avaient rendu «très nerveux». Cet officier «n’a pas respecté les ordres donnés, mais à aucun moment, il n’a voulu se substituer aux organisations humanitaires», a précisé le président.
«Nous regrettons que cela soit arrivé», a ajouté Alvaro Uribe, qui a déjà présenté ses excuses au CICR.
Les abus sont courants
L’emblème de la Croix-Rouge n’est évidemment pas fait pour les commandos militaires et un tel usage abusif représente une violation grave des Conventions de Genève. En tant qu’organisation humanitaire, le CICR n’a toutefois aucun pouvoir pour sanctionner un Etat ou une organisation.
Ce nouveau cas, qui implique l’armée, et donc le gouvernement d’un pays, est-il le signe d’une nouvelle dimension dans l’usage abusif de la Croix-Rouge ? Florian Westphal, porte-parole du CICR, ne le croit pas.
Ce genre de cas n’est pas rare en Colombie. Ainsi, les guérilleros des FARC tirent régulièrement sur des ambulances frappées du symbole de la Croix-Rouge, arguant que celui-ci ne servent en l’occurrence qu’à camoufler des transports de troupes.
Ces abus ne doivent pourtant pas affecter le travail de terrain du CICR, qui n’envisage absolument pas de se retirer de Colombie. «Vu les énormes besoins de ce pays dans le domaine humanitaire, il est extrêmement important que nous y poursuivions notre travail», confirme Florian Westphal.
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Comité international de la Croix-Rouge
La confiance demeure
Mais dans ces circonstances, le CICR peut-il encore protéger ses employés ? «Nous examinerons la situation sécuritaire au jour le jour», répond son porte-parole.
Il n’empêche: un incident comme celui survenu lors de la libération des otages pourrait nuire à l’image du CICR et à la confiance qu’on lui accorde dans le vaste réseau de contacts que l’organisation entretient en Colombie.
«Nous sommes bien connus dans ce pays et notre image y est positive. Jusqu’ici, je reste convaincu que la confiance dans le CICR n’a pas été ébranlée», affirme Florian Westphal.
L’organisation ne va d’ailleurs pas manquer de rappeler à toutes les parties au conflit que le respect de l’emblème de la Croix-Rouge doit être reconnu comme un principe intangible.
Et s’agissant de futures libérations d’otages en Colombie, le CICR réaffirme sa «volonté d’y jouer un rôle de médiateur humanitaire».
swissinfo, Corinne Buchser
(traduction et adaptation de l’allemand: Marc-André Miserez)
En 1987, des photos du magazine américain Newsweek montrent trois officiers de la Contra nicaraguayenne montant dans un hélicoptère frappé de la Croix-Rouge. L’appareil transportait du matériel militaire et des équipements électroniques pour la guérilla anti-gouvernementale.
L’emblème humanitaire a également été souvent usurpé lors des guerres en ex-Yougoslavie. En mai 1992, un délégué du CICR est tué lors de l’attaque d’un convoi près de Sarajevo, parce que les parties en conflit ne savent plus faire la différence entre «vraies» et «fausses» Croix-Rouges. Et en 1998, on rapporte que les troupes serbes ont tiré sur des réfugiés depuis des hélicoptères frappés de la Croix-Rouge.
Dans les années 90, l’emblème humanitaire a également été usurpé dans les guerres civiles du Caucase, d’Asie centrale ou de la Sierra Leone. Les milices se sont cachées derrière de fausses Croix-Rouges pour circuler ou pour transporter des armes dans une relative impunité.
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