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Pas de précipitation dans les réformes agricoles

Les paysans s'inquiètent pour leur avenir. Keystone

Les paysans suisses demandent au gouvernement de ne pas entamer pour le moment des discussions sur un accord de libre-échange agricole avec l'Union européenne (UE).

Pour l’Union suisse des paysans (USP), il faut d’abord attendre le résultat de négociations menées dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

«La Suisse ne doit pas courir trois lièvres à la fois», ont dit les leaders de l’USP vendredi à Berne. La centrale paysanne appelle le Conseil fédéral (gouvernement) à conclure la Politique agricole (PA) 2011 et les négociations de l’OMC avant de se lancer dans un accord de libre-échange avec l’UE.

Il ne s’agit pas d’une manoeuvre pour enterrer cet accord, assure l’USP. Au contraire, un accord de libre-échange avec l’Europe pourrait aider à compenser une partie des pertes générées par le Cycle de Doha de l’OMC, affirme le directeur de l’USP Jacques Bourgeois.

L’USP change de tactique. Au lieu de réagir à des décisions qui péjorent le revenu des agriculteurs et réduisent le nombre d’exploitations, l’organisation faîtière a décidé d’anticiper. Et d’étayer ses nouvelles convictions par une étude.

La fin des paysans de plaine

Celle-ci montre que le Cycle de Doha réduirait le revenu des agriculteurs par rapport aux projections de la PA 2011 de près de la moitié en région de collines ou de montagne et de deux tiers en plaine.

Et avec les signes de nouveaux compromis émanant de Bruxelles entre l’UE et les grands exportateurs agricoles, cela pourrait être encore pire, s’inquiéte Hansjörg Walter, président de l’USP.

On en arriverait à une situation telle que la surface agricole de plaine ne serait plus exploitée que par quelques industriels de l’agriculture. Parmi les premiers touchés, les céréaliers devraient renoncer à leur activité. «Imaginez le Plateau suisse tout vert, de Genève à Romanshorn», dit le député John Dupraz.

Evoquant les effets collatéraux, le député et vice-président de l’USP note qu’ils iraient bien au-delà de cet aspect écologique. Toute la filière, des moulins aux fabricants d’aliments pour animaux, serait supprimée.

Concentrer ses forces

Ainsi, les négociateurs suisses du Cycle de Doha doivent être plus actifs que jamais. Berne ne doit en aucun cas disperser ses forces en menant en parallèle des négociations pour un accord de libre-échange avec l’UE, insiste l’USP.

Surtout que le résultat de l’OMC influencera les relations entre la Suisse et l’UE. Et s’il est mal ou trop vite négocié, l’accord de libre-échange avec l’UE pourrait amplifier les conséquences négatives de l’OMC.

Sans mesure d’accompagnement de grande envergure ni soutien financier supplémentaire de la Confédération, l’agriculture suisse serait purement et simplement condamnée, avertit Jacques Bourgeois.

Des raisons d’espérer

Face à ce scénario pessimiste, l’étude de l’USP montre aussi une approche optimiste. Certains produits pourraient être écoulés dans l’immense marché européen à des prix de 5 à 20% supérieurs, en profitant d’un supplément qualitatif d’«helvétitude». Ce serait notamment le cas du lait.

Pour que l’accord de libre-échange avec l’UE puisse déployer des effets positifs pour l’agriculture helvétique, l’USP estime que différentes conditions préalables doivent être remplies. Il faut notamment identifier clairement les mesures à prendre pour réduire les coûts de production.

En amont et en aval

Les secteurs en amont et en aval de l’agriculture doivent impérativement être intégrés au processus.

Le potentiel des produits suisses sur le marché européen et les conditions pour les exploiter doivent être étudiés. Il s’agit aussi de prévoir des mesures d’accompagnement pour entrer sur le marché européen.

Ce n’est qu’une fois ces conditions réalisées que l’USP se prononcera sur l’opportunité de soutenir ou non l’entrée en négociation pour un accord de libre-échange sur les produits agricoles avec l’UE.

swissinfo et les agences

– La Suisse doit rendre son agriculture plus compétitive, dans un contexte mondial de libéralisation des marchés.

– L’Organisation mondiale du commerce (OMC) souhaite que la Suisse réduise ses droits de douane sur les produits agricoles importés et diminue ses subventions à l’agriculture.

– Pour supprimer les obstacles au libre-échange, le gouvernement préconise, entre autres, de réduire les subventions au secteur agricole au profit de paiements directs liés à des prestations d’intérêt général.

– C’est justement à cause des subventions qui protègent l’agriculture helvétique que le projet de libre-échange avec les Etats-Unis a capoté au début de l’année.

– Depuis, la Suisse étudie la possibilité d’un nouvel accord de libre-échange sur l’agriculture avec l’union européenne (UE), même si près de 60% des exportations de produits agricoles vers l’Europe des 25 sont déjà libéralisés.

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