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Risque d’impasse en Italie

Considéré un temps comme le sauveur de l'Italie, Mario Monti est à la peine dans les sondages. AFP

Une fois encore, les élections législatives italiennes pourraient se transformer en un vote pour ou contre Silvio Berlusconi. Mais quel que soit le vainqueur, il devra chercher de nouvelles alliances, avec le risque d’une paralysie politique. Le nouveau gouvernement devra aussi sortir le pays du marasme et nettoyer la classe politique.

«Le nouveau gouvernement se trouve à devoir gérer une situation extrêmement difficile. Si, au niveau financier, l’ancien président du Conseil Mario Monti a réussi à regagner la confiance des marchés, l’économie réelle n’a jusqu’à présent donné aucun signe de reprise. Au contraire, nous sommes en pleine récession: de plus en plus d’entreprises font faillite et plus de 30% des jeunes sont sans travail, ce qui est alarmant», constate Marina Cattaruzza, historienne à l’université de Berne et d’origine italienne.

Les observateurs sont unanimes pour affirmer qu’après plus d’un an de gouvernement technique, l’Italie a retrouvé de la crédibilité à l’extérieur. Cependant, l’ancien commissaire européen Mario Monti n’a pas su imprimer un tournant radical à la politique italienne, commente de son côté le politologue suisse Hanspeter Kriesi, qui travaille depuis septembre à l’Institut universitaire européen de Florence. «Les réformes adoptées ont eu un impact plus symbolique que réel. Le gouvernement a cherché à réduire le déficit public en augmentant les impôts, mais il n’est pas parvenu à tailler dans les dépenses et s’est révélé impuissant face aux privilèges dont jouissent certaines catégories, au premier rang desquelles les politiciens. Sans parler de la réforme de la loi électorale, qui a une nouvelle fois échoué avant même de commencer», dit-il.

Considéré initialement comme le sauveur de l’Italie, encensé par les marchés et par les responsables européens, Mario Monti se retrouve aujourd’hui à aborder les élections dans une position défavorable. Les Italiens n’ont pas digéré la sévère cure d’austérité imposée par le professeur: réintroduction de l’IMU (taxe immobilière), hausse du prix de l’essence et de la TVA, réforme du travail et toute une série d’autres mesures qui ont provoqué le mécontentement populaire.

République parlementaire depuis 1947, l’Italie est divisée en 20 régions (15 avec statut ordinaire et 5 autonomes), chacune dotée d’un conseil et d’un gouvernement.

Le Parlement est composé d’une Chambre des députés (630 membres élus au suffrage universel pour 5 ans) et d’un Sénat (315 membres élus au suffrage universel pour 5 ans, auxquels s’ajoutent quelques sénateurs à vie).

Le président de la République est élu pour 7 ans par le parlement et par 58 délégués régionaux. Cette charge est assumée par Giorgio Napolitano depuis 2006.

Le président de la République nomme le Président du conseil. Un fois nommé, celui-ci lui propose le nom des ministres qui, avec lui, formeront le Conseil des ministres (gouvernement).

Le gouvernement dépend de la confiance des deux Chambres du parlement. Il a le pouvoir d’émettre des décrets de loi qui doivent cependant être confirmés par le parlement dans un délai de 60 jours.

Assainir la politique

Marina Cattaruzza et Hanspeter Kriesi sont d’accord sur un point: le pays a avant tout besoin de réformes structurelles sur le plan politique. «Il existe en Italie une culture légaliste stupéfiante, note le politologue. Le nombre de lois y dépasse celui que l’on trouve dans des pays analogues, en France ou en Allemagne notamment. Mais ces lois ne sont pas appliquées et la corruption est endémique».

La classe politique est la seule à ne pas subir les contrecoups de la cure d’austérité. «Ses privilèges sont restés intacts, estime Marina Cattaruzza. Cela a provoqué une grande insatisfaction au sein de l’électorat et explique le désintérêt par rapport à la politique». Le nouveau gouvernement est donc appelé à intervenir. «Il devrait réduire le nombre de représentants politiques à tous les niveaux, tailler dans les dépenses et les différents privilèges, et augmenter la transparence. Il devrait finalement s’attaquer au problème des lobbies qui sont à l’origine de la paralysie politique du pays», poursuit-elle.

Mais il n’y a pas de solutions en vue, souligne, amère, Marina Cattaruzza, dans la mesure où aucune force politique ne semble avoir l’intention de prendre le taureau par les cornes. Le MoVimento 5 Stelle (Mouvement 5 étoiles) fait peut-être figure d’exception. Emmené par le comique Beppe Grillo, il représente la troisième force politique du pays, devant Mario Monti.

«Beaucoup d’électeurs choisiront cette liste, non pas parce qu’ils sont convaincus par le programme, qui sous bon nombre d’aspects est contradictoire et populiste, mais parce que Beppe Grillo représente l’antipolitique. C’est un vote de protestation, compréhensible mais préoccupant. Beppe Grillo est le seul à ne pas être compromis avec la classe politique et il est celui qui dénonce le plus les coûts de l’appareil étatique, un thème cher à l’électorat», explique l’historienne.

Une gauche en tête, mais divisée

Selon les derniers sondages, la coalition de centre-gauche dirigée par Pierluigi Bersani pourrait remporter les élections, sans toutefois obtenir la majorité au Sénat. Pour pouvoir gouverner, la gauche devra donc chercher de nouvelles alliances. L’hypothèse la plus probable est celle d’un ticket Bersani-Monti. Ce scénario est sans doute anormal, mais réalisable «si c’est le sens de la responsabilité qui prévaut, affirme Marina Cattaruzza. Les autres scénarios impliqueraient une plus grande déstabilisation du cadre politique».

Difficile cependant d’imaginer comment la gauche pourra concilier sa fibre sociale avec la ligne intransigeante de Mario Monti en matière d’austérité, sans trahir son électorat et éviter en même temps une paralysie politique. Aussi parce que la coalition de Bersani «est divisée et ne réussit pas à se présenter comme une force réformiste en coupant le cordon ombilical avec les communistes», juge l’historienne.

Les dés ne sont dès lors pas encore jetés. Et même si un exploit du Cavaliere semble improbable, l’écart encre la coalition de droite et celle du centre-gauche s’est nettement réduit au cours des dernières semaines. Outre les partisans de Mario Monti, la gauche radicale et les adeptes de Beppe Grillo pourraient aussi faire irruption au Parlement, ce qui bouleverserait l’image de système de coalitions bipolaires de la politique italienne.

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Berlusconi, le maître communicateur

Les élections des 24 et 25 février risquent cependant de se résumer une fois de plus en un vote pour ou contre Silvio Berlusconi. Donnée pour moribonde début décembre encore, la droite a réussi à remonter la pente et à franchir la barre psychologique des 30%. Comment expliquer un tel retournement?

Pour Marina Cattaruzza, «l’attachement des Italiens à Berlusconi est symptomatique d’une crise politique qui dure depuis la fin des années 1980. Après l’opération Mains Propres, le cadre politique italien n’a pas été reconstruit. Silvio Berlusconi a profité de ce vide et continue à le faire aujourd’hui. En d’autres termes, nous ne devons pas le considérer comme la cause de la crise, mais comme un symptôme».

A la différence de ses adversaires, Silvio Berlusconi a un atout important dans la manche, soulignent les deux experts. «Il est un grand communicateur, un homme fait pour les campagnes électorales», estime Hanspeter Kriesi.

Le Cavaliere a ainsi promis de rembourser la taxe immobilière aux citoyens et de créer quatre millions d’emplois pour les jeunes, sans cependant fournir de solutions crédibles. Ses solutions, jugées «démagogiques et irresponsables» par nos deux interlocuteurs, ont cependant eu un effet immédiat: sa popularité est remontée en flèche et la bourse a commencé à frémir. L’Europe craint son retour et ses adversaires se sont laissés prendre au jeu de la démagogie.

Quant à Silvio Berlusconi, il semble avoir une nouvelle fois réussi à surprendre ceux qui pensaient que son nom rimait désormais avec de l’histoire ancienne.

A la fin 2012, on dénombrait 294’359 citoyens italiens résidant en Suisse. Avec une proportion de 16,1%, ils forment la communauté étrangère la plus importante du pays.

On trouve au 2e rang les Allemands (285’379 personnes / 15,6%) et au 3e les Portugais (238’432 / 13,1%).

Plus d’une vingtaine d’Italiens de suisse participeront aux élections de février dans la circonscription étranger – Europe.

(Traduction de l’italien: Olivier Pauchard)

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