De l’Etat radical à la «formule magique»
A la création de l'Etat fédéral, seuls des radicaux siègent au gouvernement. Le Conseil fédéral s'est depuis ouvert à d'autres sensibilités.
Cette évolution a débouché en 1959 sur une répartition surnommée «formule magique», toujours en vigueur.
Créé en 1848, l’Etat fédéral est voulu (et imposé) par les radicaux. C’est donc en toute logique qu’ils monopolisent les sept fauteuils du Conseil fédéral.
Cette situation dure plus de 40 ans. Ce n’est qu’en 1891 qu’un représentant du Parti catholique-conservateur (l’ancêtre du Parti démocrate-chrétien) accède au gouvernement.
Ce n’est pas par pure bonté d’âme que les radicaux cèdent un siège à leurs principaux opposants politiques. Les catholiques peuvent en effet bloquer le système grâce au recours systématique à un nouveau droit politique, l’initiative populaire.
Dans ces conditions, mieux vaut donc pour les radicaux partager le pouvoir avec les catholiques conservateurs que d’en faire d’irréductibles ennemis.
Séisme politique
Mais la situation se modifie profondément en 1919. C’est en effet à cette date que le peuple accepte le principe d’une représentation politique proportionnelle au Parlement.
Cette modification fait l’effet d’un séisme. Avec la proportionnelle, les radicaux passent de 105 à 63 élus. Les socialistes de 19 à 41.
Devant une opposition qui se renforce, les radicaux établissent une coalition avec les catholiques, qui obtiennent un second siège au gouvernement.
En 1929, le Parti des paysans, artisans et indépendants (l’ancêtre de l’Union démocratique du centre) arrive à se hisser au Conseil fédéral à l’occasion d’une double élection.
Naissance de la «formule magique»
Mais cette formule (4 radicaux, 2 catholiques-conservateurs et 1 agrarien) ne résiste pas à la crise des années 30 et à la 2e Guerre mondiale.
Les socialistes connaissent alors des succès électoraux et forment le parti le plus important de la Chambre basse. Par ailleurs, face au danger du nazisme, ils se rallient à la défense nationale.
Du coup, il n’y a plus de raison de leur barrer la route du gouvernement. En 1943, un socialiste accède au Conseil fédéral, aux dépends des radicaux, qui perdent encore un siège.
Les radicaux récupèrent brièvement ce siège perdu en 1953, lorsque le conseiller fédéral socialiste claque la porte du gouvernement.
Mais tout change l’année suivante. Catholiques et socialistes s’arrangent pour reprendre ce 4e siège radical. Le gouvernement compte dès lors 3 radicaux, 3 catholiques et 1 agrarien.
Et en 1959, les catholiques rendent l’ascenseur aux socialistes. A l’occasion d’une quadruple élection au Conseil fédéral, ces alliés de circonstances s’entendent pour s’octroyer deux sièges chacun.
Désormais, le gouvernement est composé de 2 radicaux, 2 socialistes, 2 catholiques conservateurs et 1 agrarien. C’est la naissance de la «formule magique».
Cette répartition a survécu jusqu’à aujourd’hui.
swissinfo/Olivier Pauchard
Le 1er conseiller fédéral catholique-conservateur: le Lucernois Joseph Zemp (1891).
Le 1er conseiller fédéral agrarien : le Bernois Rudolf Minger (1929).
Le 1er conseiller fédéral socialiste: le Zurichois Ernst Nobs (1943).
La «formule magique» est née d’une entente entre les partis. Aucune loi écrite n’en fixe le principe. Outre la répartition selon le partis, la «formule magique» veut que 3 des 7 ministères soient réservés à la minorité latine. Mais pour cela aussi, l’accord est oral.
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