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Les soins seront financés de manière uniforme en Suisse

EFAS
Avec leur projet de financement uniforme des prestations de santé, le Conseil fédéral et le Parlement veulent encourager les soins ambulatoires. Keystone / Gaetan Bally

Le peuple a accepté à 53,3% ce dimanche le financement uniforme des prestations de santé. Une défaite pour la gauche et les syndicats à l’origine du référendum, une victoire pour le gouvernement et le Parlement.

En Suisse, les traitements hospitaliers stationnaires et ambulatoires seront désormais financés de la même manière: les cantons paieront un peu plus d’un quart de la facture et les assureurs se chargeront du reste.

Dimanche, les Suisses ont approuvé à 53,3% des voix le financement uniforme des prestations de santé (EFAS). Ce projet, ficelé par le gouvernement et le Parlement, est l’une des plus importantes réformes de la loi fédérale sur l’assurance maladie (LAMal), depuis son adoption en 1994. Il aura fallu 14 ans de travail pour le mettre sous toit.

Avec cette réforme, les pouvoirs publics souhaitent encourager davantage les traitements ambulatoires. Ils estiment que cela améliorera la qualité des soins et permettra de réaliser des économies.

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«Une réforme qui permettra d’y voir plus clair»

Il s’agit d’une victoire pour les partis de droite et du Centre, ainsi que pour les assurances maladie et les milieux médicaux, qui soutenaient la réforme. Ces derniers saluent une clarification du financement des soins. «Il s’agit d’une première pierre importante. Il faudra ensuite trouver des solutions pour mieux utiliser l’argent qu’on dépense pour la santé», a réagi le sénateur du Parti libéral radical (PLR / droite) Pascal Broulis, interrogé par la Radio Télévision Suisse (RTS).  

>> La réaction du sénateur PLR Pascal Broulis à la RTS:

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Le député du Centre Benjamin Roduit partage cet avis. Il estime que le financement uniforme permettra d’y voir plus clair et de faire des économies: «Désormais, on saura qui paie quoi, pour quelles prestations et quel moment de sa vie. Aujourd’hui, personne n’est capable de le dire. C’est pour cela qu’il y a tellement de perte, de gaspillage, de doublons, etc.».

Le verdict des urnes a également réjoui l’association suisse Médecins de familles et de l’enfance. «La réforme du financement uniforme des soins simplifie le financement et le rend plus transparent. Elle constitue une base de travail pour développer les soins ambulatoires», a estimé Sébastien Jotterand, coprésident de l’organisation à la RTS.

Pour la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), le résultat du vote montre qu’il est possible de réformer le système de santé. «Il s’agit d’un signal fort à l’attention de toutes celles et ceux qui s’engagent en faveur d’un système de santé durable et financièrement viable», estime-t-elle dans une prise de position transmise à Keystone-ATS. La CDS reconnaît cependant que le financement uniforme n’est pas la panacée, mais affirme qu’il pose les bases pour de futurs développements au sein du système de santé.

>> Le financement uniforme des soins expliqué en détail:

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«Le problème des primes n’est pas résolu»

En revanche, les syndicats et la gauche, qui combattaient le projet, subissent une défaite. Cela pourrait s’expliquer en partie par le fait que la gauche était divisée sur cet objet: une partie de ses élus soutenaient la révision de la LAMal.

La députée verte Delphine Klopfenstein Broggini prend acte de la décision du peuple. Elle estime toutefois qu’il s’agit d’un «projet bricolé», qui continue de donner beaucoup de pouvoir aux assurances maladie. «Il ne permet pas de résoudre le problème des primes, qui augmentent chaque année et mettent les ménages dans des situations toujours plus difficiles», déplore cette dernière, sur les ondes de la RTS, tout en plaidant pour un système de primes liées aux revenus des individus.

Le syndicat des services publics (SSP), à l’origine du référendum, regrette que le peuple ait finalement accepté cette réforme, dans un communiqué. Il y voit «un pas supplémentaire vers davantage de privatisations et de libéralisation» et craint une nouvelle dégradation des conditions de travail du personnel de santé.

«Nous avons réussi à planter des graines qui vont nous permettre de construire», relève toutefois Christian Dandrès, le président du SSP. Il appelle à se mobiliser pour les batailles à venir, en mentionnant notamment les réseaux de soins contraints, les catalogues de soins dans lesquels les assureurs voudraient pouvoir piocher et la tarification.

>> L’infirmière Jessica Ribeiro a réagi au résultat du vote sur le plateau de la RTS:

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Le Röstigraben se manifeste clairement

Les résultats du vote sur le financement uniforme révèlent un profond Röstigraben (différence de comportement de vote entre francophones et germanophones). Tous les cantons romands ont rejeté la réforme.  

La crainte de voir les primes d’assurance maladie augmenter, comme le prétendait les opposantes et les opposants au projet, a pris le dessus chez les francophones, estime le journal Le Temps. «En Suisse alémanique, l’analyse de la situation a été faite de manière beaucoup plus pragmatique et moins émotionnelle», écrit le quotidien édité à Genève.

Le journal gratuit 20 minutes explique le fossé qui sépare francophones et germanophones par l’influence de Pierre-Yves Maillard en Romandie. Le sénateur socialiste et président de l’Union syndicale suisse était engagé dans la campagne contre le projet. «La méfiance de cette locomotive électorale vis-à-vis du projet et des caisses maladie en général semble avoir été contagieuse dans sa région d’origine», analyse le média.

Le Röstigraben est également thématisé par 24 heures, qui souligne que les Romandes et Romands, majoritairement opposés à EFAS, doivent être entendus.

Une victoire pour la ministre de la Santé

La presse suisse considère aussi que le oui au financement uniforme est une victoire pour la ministre de la Santé Elisabeth Baume-Schneider. Le journal bernois Der Bund souligne que la conseillère fédérale socialiste a dû, une fois de plus, affronter son propre parti et les syndicats. «Elle l’a fait cette fois-ci – en comparaison avec la votation sur la 13e rente AVS – de manière remarquablement enthousiaste. Et la ministre de la Santé peut se réjouir: environ 53% des votantes et votants ont dit oui à EFAS.»

De son côté, 24 heures rappelle qu’après un début d’année difficile pour la conseillère fédérale jurassienne, qui a perdu sur la 13e rente AVS et sur la réforme des caisses de pensions, Elisabeth Baume-Schneider l’emporte à nouveau. «Dans la campagne qui vient de se terminer, elle est apparue convaincue du bénéfice d’EFAS: ce oui est bien une victoire pour elle», note le quotidien vaudois.

Dans la même veine, Le Temps affirme que les propos d’Elisabeth Baume-Schneider ont fait mouche. «Pour elle, dire non au financement uniforme des soins, c’était dire oui aux blocages. Et si le système de santé a bien besoin d’une chose, c’est d’en finir avec les blocages politiques», constate le quotidien.

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