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Fiscalité de l’épargne: Rome intraitable face à la Suisse

Le ministre italien des Finances Giulio Tremonti et la ministre française de l'Economie Christine Lagarde ce mardi à Bruxelles. Keystone

L’Italie a refusé mardi de se rallier à un compromis sur la fiscalité de l’épargne, porté par la présidence hongroise de l’Union européenne et de la Commission européenne. «Ecrite par la Suisse», selon Rome, la directive européenne ne sanctionne pas les Etats qui la violent.

La présidence hongroise de l’Union européenne (UE) a proposé le 17 mai aux ministres des Finances des Vingt-Sept Etats membre de l’UE de donner leur feu vert à la Commission (l’exécutif communautaire) pour préparer des mandats de négociations avec cinq pays tiers – la Suisse, le Liechtenstein, Andorre, Saint-Marin et Monaco.

Objectif attendu: s’assurer qu’ils continueront d’appliquer des mesures équivalentes à celles des Européens dans le cadre des accords qu’ils ont conclus en 2004 avec l’UE dans le domaine de la fiscalité de l’épargne.

Paravents aux fraudeurs

 Les Vingt-Sept envisagent en effet d’étendre le champ d’application de leur directive, actuellement limité aux revenus de l’épargne perçus sous forme d’intérêts par des non-résidents, à de nouveaux produits (fonds d’investissement, assurances-vie, etc.) ainsi qu’à certaines «entités intermédiaires» (trusts fondations, etc.) pouvant servir de paravents aux fraudeurs.

Le Luxembourg, longtemps réticent, a finalement approuvé le projet de conclusions rédigé par Budapest qui, il est vrai, évite soigneusement d’aborder la question sensible de la suppression du secret bancaire.

Luxembourg et Vienne exigent d’être mis sur un strict pied d’égalité avec la Suisse; ils refusent d’être contraints à basculer du système de le retenue à la source (qui est également appliqué par Berne et permet de préserver l’anonymat des épargnants) vers celui de l’échange automatique d’informations entre administrations fiscales si la Confédération ne leur emboîte pas le pas.

Un tigre de papier

L’Italie, en revanche, n’a pas décoléré et a mis son veto à l’adoption du texte, malgré la forte pression qu’ont exercée sur elle la présidence hongroise et la Commission, ces derniers jours.

Le ministre italien des Finances, Giulio Tremonti, a accusé certains Etats et opérateurs économiques de violer «systématiquement» la réglementation existante.

La directive européenne sur la fiscalité de l’épargne «a été écrite par la Suisse», dont «l’Union est devenue membre», s’est-il plaint. « C’est un tigre de papier, un texte qui n’a pas de dents. Des obligations ont été imposées aux institutions financières et aux Etats, mais aucune sanction n’a été prévue» à l’encontre de ceux qui ne les respectent pas.

Cela «ouvre la porte à des abus. C’est un scandale», a-t-il ajouté, en accusant les banques «d’utiliser des systèmes d’assurances ou des fonds offshore» pour contourner leurs obligations.

A court d’idées ?

L’Italien en veut pour preuves les résultats de l’opération d’amnistie fiscale qu’elle a menée en 2009. Ils ont selon elle révélé que les fonds dissimulés par les Italiens sont trente fois plus importants que ce qui apparaît dans les comptes de la Confédération – la Suisse ristourne chaque année 75% des recettes engendrées par la retenue à la source qu’elle applique aux pays de l’UE; en 2008, Rome a récupéré 123 millions de francs, un montant qu’il juge dérisoire.

Giulio Tremonti a affirmé que son pays refuserait de faire la moindre concession aussi longtemps que l’Union «ne s’engagera pas à appliquer des sanctions contre les pays et les opérateurs» indélicats, dans le cadre de l’examen de l’application de la législation européenne existante qui est prévu à Bruxelles: la Commission présentera un rapport «avant la moitié de l’été», a confirmé le commissaire européen à la fiscalité, Algirdas Semeta.

En attendant, la Hongrie va malgré tout «essayer de voir comment faire progresser le dossier» avant la fin de sa présidence de l’Union, le 30 juin, a annoncé son grand argentier, György Matolcsy. Mais elle semble désormais à court d’idées.

Février 2009: UBS est autorisée par Berne à livrer aux Etats-Unis l’identité de 255 clients qu’elle a aidé à échapper au fisc américain, en violation de la loi sur le secret bancaire.
 
Mars 2009: Dans le collimateur de l’OCDE, Berne décide d’assouplir le secret bancaire en suivant les standards en matière d’échange d’informations.
 
Avril 2009: Le G20 place la Suisse sur une liste grise des paradis fiscaux prêts à faire des efforts en matière d’échange d’informations.
 
Août 2009: La Suisse et les Etats-Unis trouvent un accord sur UBS. Les Américains ne chercheront plus à obtenir l’identification de 52’000 titulaires. Une entraide administrative est décidée sur 4450 comptes.
 
Septembre 2009: Après avoir signé 12 conventions élargies de double imposition, la Suisse est biffée de la liste grise de l’OCDE.
 
Novembre 2009: Le gouvernement propose au parlement de soumettre les nouveaux accords de double imposition au référendum facultatif. L’UE reporte à 2010 un projet d’accord sur la fiscalité de l’épargne impliquant l’échange automatique d’informations.
 
Position officielle: La Suisse est décidée à refuser l’échange automatique d’information. L’entraide administrative est accordée au cas par cas, en réponse à des demandes concrètes et justifiées. L’échange d’informations est limité aux impôts couverts par les conventions de double impositions concernées.

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