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Hans-Rudolf Merz défend son action en Libye

Keystone

Le Gouvernement savait qu'Hans-Rudolf Merz se rendrait en Libye, mais il n'était pas au courant du contenu détaillé de l'accord qui y serait signé. Celui-ci a été préparé avec les services du ministère des Affaires étrangères, a indiqué vendredi le président de la Confédération.

Largement interrogé par la presse sur la question des excuses présentées, Hans-Rudolf Merz fait valoir que ses déclarations étaient nécessaires pour dépasser le blocage dans lequel se trouvait l’affaire. «On avait l’intention d’exprimer une forme d’excuses», a-t-il souligné tout en expliquant qu’il y avait eu de longues discussions pour savoir s’il fallait parler de regrets ou d’excuses.

Après avoir retracé les différentes étapes de l’affaire et des préparatifs pour la résoudre, le président a indiqué avoir pris la décision d’agir car il a constaté il y a un mois que la situation était «bloquée». Il a assuré assumer la responsabilité de l’accord passé et de ses conséquences. «Il n’y avait pas d’autre choix», selon lui.

Hans-Rudolf Merz a aussi justifié pourquoi il est revenu en Suisse sans les deux otages. Aux yeux des Libyens, les deux hommes sont retenus pour des questions de visa. La justice locale a donc besoin de quelques jours pour clore le dossier, a expliqué le président.

Le deux hommes reviendront donc «la semaine prochaine», a affirmé Hans-Rudolf Merz, qui a exigé des Libyens leur retour en Suisse avant le 1er septembre.

Quant au sort des anciens domestiques à l’origine de la plainte contre Hannibal Kadhafi et son épouse – retirée depuis lors -, il n’a pas été abordé lors de la négociation de l’accord. Ils ne sont plus en Suisse, a souligné Hans-Rudolf Merz.

Genève soutient sa police et sa justice

Vendredi également, le Gouvernement (Conseil d’Etat) du canton de Genève est sorti de son mutisme. Dans un communiqué, il dit avoir pris connaissance de l’accord conclu entre la Suisse et la Libye et s’inquiète de la création d’un tribunal arbitral étranger.

Le canton regrette que la Confédération, «sans l’en informer au préalable», le laisse seul face à cette instance, qui aurait le droit de désigner «des coupables» au sein des autorités et de la police.

Dans ce cadre, le Gouvernement cantonal avertit qu’il résistera à toute action «qui ne serait pas strictement conforme aux libertés individuelles garanties par la Constitution genevoise». L’exécutif a pris contact avec la Conférence des gouvernements cantonaux afin d’obtenir le soutien des autres cantons dans ce processus.

Le Conseil d’Etat a en outre pris acte des efforts entrepris par le président de la Confédération pour dénouer l’affaire et «espère qu’ils permettront prochainement la libération des otages suisses en Libye».

La justice muette

Par contre, le procureur général de Genève Daniel Zappelli n’a pas souhaité s’exprimer vendredi matin sur l’accord entre la Suisse et la Libye. Le volet juridique de l’affaire a été refermé avec le retrait de la plainte déposée par les deux domestiques d’Hannibal Kadhafi, indique-t-on au service de presse du Palais de justice.

Ce même service a toutefois précisé qu’avant de décider d’arrêter Hannibal Kadhafi dans son hôtel l’été dernier, le Parquet genevois avait pris toutes les précautions nécessaires auprès de l’Administration fédérale pour s’assurer que le fils du leader libyen ne bénéficiait pas du statut diplomatique.

Plus de vols vers Tripoli

Par ailleurs, on apprend vendredi que Swiss ne réintroduira pas de vols en direction de la Libye. La compagnie aérienne avait cessé de relier Zurich à Tripoli en décembre dernier car Mouammar Kadhafi le lui avait interdit. Mais le règlement du conflit ne change rien pour Swiss, indique vendredi sa porte-parole.

Swiss a fermé son bureau à Tripoli et les avions qui desservaient la capitale libyenne sont désormais utilisés pour d’autres trajets. Cette destination n’est économiquement plus intéressante pour la compagnie.

L’accord n’a pas de conséquences non plus pour la marine suisse. Aucun paquebot n’avait l’intention d’accoster en Libye ces prochains temps. «Depuis des années, les sociétés maritimes évitent la Libye, en raison d’ennuis à répétition tels que des bagarres avec des marins libyens», a déclaré Michael Eichmann, de l’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays.

swissinfo.ch et les agences

Rédigé en anglais et en arabe, l’accord signé jeudi entre la Suisse et la Libye comprend sept points et porte les signatures du président de la Confédération Hans-Rudolf Merz et du premier ministre Al Baghdadi El-Mahmoudi:

Excuses. Le gouvernement suisse doit s’excuser publiquement et officiellement pour l’arrestation «injustifiée et inutile» d’un diplomate libyen (Hannibal Kadhafi) et de sa famille par la police genevoise «et d’autres autorités suisses».

Tribunal. Berne et Tripoli acceptent d’établir un tribunal arbitral composé de trois juges afin d’enquêter sur l’affaire. Chaque partie désignera un juge venant d’un Etat tiers indépendant dans les dix jours qui suivront la signature de l’accord.

Président. Les deux juges choisiront ensuite un troisième magistrat qui présidera le tribunal.

Frais. Les deux parties se partageront les coûts du tribunal arbitral. Il siégera à Londres et travaillera en anglais. Il devra appliquer les lois nationales et internationales appropriées et devra rendre sa décision dans les 60 jours.

Sanctions. Les autorités suisses compétentes prendront les mesures nécessaires contre les responsables de l’incident si le tribunal conclut à des actes injustes.

Indemnité. Dans ce cas, la Confédération devra payer une compensation établie par le tribunal au bénéfice de la victime de l’incident ou d’une organisation de son choix. La Suisse s’engage ensuite à ce que pareille affaire ne se reproduise plus avec des citoyens libyens.

Normalisation. Les deux parties normaliseront leurs relations: reprise des activités consulaires, délivrement de visas d’entrée ou de sortie pour les citoyens suisses et libyens, reprise des échanges économiques.

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