L’armée à la rescousse pour sécuriser l’Euro 2008
Le gouvernement prépare la plus vaste mobilisation militaire depuis la Seconde Guerre mondiale pour assurer la sécurité de l'Euro 2008 de football.
Son plan d’engagement prévoit jusqu’à 15’000 hommes sur le terrain et une possible implication de drones et d’hélicoptères. Coût estimé: 10 millions de francs.
Le gouvernement a soumis mercredi au parlement son plan d’engagement de l’armée à l’occasion du Championnat d’Europe de football en juin 2008. Selon l’état actuel de planification, environ 13’900 militaires devraient être appelés pour assister les autorités civiles des villes de Genève, Bâle, Berne et Zurich, où se tiendront les matches.
Comme lors du Forum de Davos, dans le canton des Grisons, ils ne devront pas entrer en confrontation avec la population civile, a précisé le ministre de la défense Samuel Schmid devant la presse.
Et de préciser que l’ampleur de cet effectif se justifie par la flexibilité nécessaire à l’armée pour assurer la sécurité lors d’un évènement comme l’Euro 2008.
Concernant le nombre de policiers et leur emplacement, le ministre n’a pas pu avancer de données précises. Selon lui, les forces de police, plus flexibles que l’armée, devraient être au nombre de «quelques milliers».
Onze bataillons et des limousines blindées
Onze bataillons ou groupes seront engagés dans les domaines de l’aide de commandement, des radars, des liaisons par ondes dirigées, des transmissions et de la guerre électronique, ainsi que trois bataillons d’infanterie et deux bataillons de logistique.
Huit compagnies viendront s’ajouter pour les domaines sanitaire, transports, circulation, sécurité militaire, conducteurs de chiens, états-majors de commandement et transport aérien.
Concernant les escortes, des véhicules blindés (des limousines de plusieurs tonnes) ainsi que des engins de sécurité avec des militaires spécialement formés pour le transport des personnes protégées par le droit international seront mis à disposition. Le recours aux gardes du corps restera toutefois de la compétence de la police civile.
L’engagement de l’armée aura lieu de manière échelonnée suivant le jour du match, la ville et les corps de troupe concernés afin de répartir l’effectif sur la durée du championnat. Pour les corps de troupe ayant des fonctions communes, des relèves internes seront calculées. Ainsi, à aucun moment l’effectif total de 15’000 militaires ne devrait être engagé en même temps.
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Armée de milice
Ciel sous haute surveillance
Une fermeture de l’espace aérien au-dessus de certains sites pourrait être décidée, mais la décision «dépendra des risques», selon Samuel Schmid.
Le recours à des drones de reconnaissance et à des hélicoptères Super Puma munis de caméras de jour ou à infrarouge n’est pas non plus exclu. Selon l’évolution de la situation, il est possible que l’état-major d’engagement civil estime ces mesures de surveillance nécessaires, note le gouvernement.
Comme il l’a fait en juillet en faveur des garde-frontière, le Conseil fédéral a donc autorisé l’engagement des tels moyens de reconnaissance par les Forces aériennes.
Questions encore ouvertes
L’ensemble des mesures soumises à l’approbation des Chambres fédérales se base sur les premiers entretiens menés entre l’armée et les autorités civiles des polices des sites concernés. Il s’agit de prévoir le meilleur appui militaire possible, ce qui ne signifie pas que l’armée sera pleinement mise à contribution.
Il n’est pas simple de planifier dans le détail en 2006 un engagement qui n’aura lieu qu’en 2008, a noté Samuel Schmid. De nombreuses questions restent en effet ouvertes. On ignore par exemple encore qui sera qualifié pour l’Euro 2008 (si ce n’est l’Autriche et la Suisse, en tant que pays organisateurs), et quelles équipes s’affronteront sur quel stade. Le tirage au sort des matches aura lieu le 1er décembre 2007.
Réactions contrastées
Les villes hôtes de l’Euro 2008 saluent l’engagement prévu des militaires. Le conseiller d’Etat genevois Laurent Moutinot parle ainsi d’un «signe très positif», ajoutant être très content «que le Conseil fédéral prenne la mesure de nos difficultés».
A Zurich et à Berne, la police municipale se dit aussi satisfaite. Les mesures prises devraient couvrir globalement les besoins que les polices des villes concernées ont présentés à la Confédération, a dit le porte-parole bernois Franz Märki.
La Fédération suisse des fonctionnaires de police (FSFP) salue l’engagement de l’armée tant qu’il reste subsidiaire et qu’il n’y a pas de contact direct entre les soldats et les supporters.
Par contre, le ‘Groupe pour une Suisse sans armée’ (GssA) ne cache pas son mécontentement. A ses yeux, la mobilisation prévue est «totalement exagérée». Il faut retirer le domaine du sport au conseiller fédéral Samuel Schmid, exige-t-il en outre. Son engagement se révèle être «un engagement en faveur d’une armée au chômage», estime le GSsA.
swissinfo et les agences
Durant la guerre de 39-45, l’armée suisse a mobilisé 450’000 hommes.
Institution de milice encadrée de professionnels, elle a subi une forte réduction de ses effectifs avec l’acceptation par le peuple en 2003 de la réforme Armée XXI. Elle compte aujourd’hui 155’000 hommes et femmes.
Sur le territoire suisse, les polices cantonales et comunales sont responsables de l’ordre public et de la sécurité. Plusieurs offices fédéraux ont aussi des tâches de police.
L’armée intervient en soutien des autorités civiles lors d’événements particuliers comme le Forum économique de Davos ou la tenue de sommets internationaux.
Le Championnat d’Europe de football se déroulera en Suisse et en Autriche entre le 7 et le 29 juin 2008.
Quinze matches seront disputés en Suisse, à Bâle, Berne, Genève et Zurich.
Le coût anticipé pour les collectivités publiques atteint 182 millions de francs.
Le tournoi devrait rapporter quelque 500 millions de francs à la Suisse.
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