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La recherche de sites de stockage est relancée

Keystone

Le choix de sites d'entreposage des déchets nucléaires est sujet à controverse depuis des années en Suisse. Or le gouvernement vient de réamorcer le processus de recherche. En insistant beaucoup sur la nécessité de la transparence.

Depuis 2002, la recherche d’un site destiné au stockage des déchets nucléaires est gelée en Suisse. A l’époque, les citoyens de Nidwald avaient refusé pour la seconde fois la construction d’une galerie de sondage sur le site de Wellenberg, enterrant définitivement le projet.

Pour éviter qu’un tel scénario ne se répète, la loi sur l’énergie nucléaire (2005) donne désormais les pleins pouvoirs à la Confédération. Et comme elle stipule aussi que les déchets radioactifs helvétiques ne doivent plus être exportés, ils sont entreposés provisoirement à Würenlingen, dans le canton d’Argovie, depuis juillet 2006.

Le Conseil fédéral (gouvernement) a toutefois relancé à la mi-avril les études pour la recherche de lieux d’entreposage. Le calendrier prévoit la mise en service d’un dépôt pour les déchets faiblement ou moyennement radioactifs à l’horizon 2030. L’échéance a été fixée à 2040 pour les déchets hautement radioactifs.

Mais un site unique accueillant toutes les catégories de déchets dans des dépôts séparés pourrait également être envisagé, a indiqué le ministre de l’Environnement Moritz Leuenberger.

Benken et le Jura

Après l’échec du Wellenberg, les autorités marchent toutefois sur des œufs. Pour l’instant, elles se sont bien gardées de nommer des sites potentiels. Par contre, Moritz Leuenberger, tout en soulignant que la sélection s’effectuerait d’abord selon le critère de la sécurité, a insisté sur la nécessité de la transparence et du dialogue avec les citoyens.

La Nagra (Société coopérative pour l’entreposage des déchets radioactifs) devra soumettre une liste de propositions définitives cet été ou cet automne. Cela même si elle a déjà énoncé ses préférences.

Pour elle, l’opaline argileuse du site de Benken, dans le Weinland zurichois, est la roche la plus adaptée pour les déchets hautement radioactifs. Un choix confirmé par l’Office fédéral de l’énergie (OFEN). Mais un rapport datant de 2005 cite aussi le pied Sud du Jura argovien et soleurois ainsi que les monts Bözberg et Lägeren, dans le canton d’Argovie.

Quant à l’option du Wellenberg, elle a été abandonnée, «pour des raisons démocratiques», selon le ministre de l’Environnement. Le gouvernement a estimé qu’après deux refus dans les urnes, un nouveau projet n’était pas souhaitable.

Un service au pays

«Benken n’est pas forcément le meilleur site, même si techniquement, la preuve de la faisabilité a été apportée. Au niveau des désavantages, il est proche de la frontière et d’une vallée d’érosion glaciaire très profonde. Il mérite donc d’être comparé à d’autres sites pour savoir s’il s’agit vraiment de la meilleure solution», explique Walter Wildi, expert en sécurité nucléaire et ancien président de la Commission fédérale de la sécurité des installations nucléaires.

Lors de l’échec du Wellenberg, les opposants avaient contesté l’absence d’alternative. Cette fois, le gouvernement veut donc mettre toutes les chances de son côté en disposant de plusieurs sites d’implantation potentiels. Selon l’OFEN, les régions concernées comptent 20 à 30 communes chacune. D’où l’importance du caractère participatif des procédures.

«Les citoyens et les organisations pourront s’exprimer, par exemple sur l’emplacement exact du lieu de stockage ou sur la manière dont il devra être construit», explique Michael Aebersold, chef de la section gestion des déchets radioactifs à l’OFEN. Pour lui, il est primordial de travailler sur l’acceptation de tels sites par les régions concernées.

Michael Aebersold précise également que celles-ci seront indemnisées et que des mesures de compensation seront mises en place. «Ces zones recevront de l’argent car c’est un service qu’elles rendent au pays tout entier», souligne-t-il.

Une série d’études devra également être réalisée pour mesurer les conséquences socio-économiques, écologiques et les incidences sur l’aménagement du territoire.

La question des nouvelles centrales

Quant à la décision gouvernementale sur le choix définitif des sites, elle n’interviendra pas avant 2016-2018. Elle devra ensuite être approuvée par le Parlement. Si un vote n’est plus possible à l’échelle communale ou cantonale, le peuple suisse pourrait donc avoir à se prononcer en cas de référendum.

Enfin, à chacune des étapes suivantes, les autorisations de construire nécessaires pourront également être contestées selon la procédure régulière auprès du Tribunal administratif fédéral, voire du Tribunal fédéral.

Pour sa part, Walter Wildi estime que ces délais ne «sont pas forcément irréalistes». Mais la bataille promet d’être longue. Surtout qu’elle en cache une autre, beaucoup plus politique. Les partis en effet ne sont pas d’accord sur les capacités des futurs sites d’entreposage.

Pour les socialistes et les Verts, le site doit pouvoir accueillir les déchets des cinq centrales nucléaires existantes. Pour les partis bourgeois, des capacités supplémentaires doivent être prévues car il faut compter avec la construction de nouvelles centrales nucléaires.

«En Suisse, on ne pourra jamais détacher la discussion sur le stockage des déchets de celle sur la suite éventuelle d’un programme nucléaire, déplore Walter Wildi. Tant que cela reste comme ça, je pense que l’acceptation d’un dépôt sera très difficile à faire passer dans la population».

swissinfo, Susanne Schanda
(Traduction et adaptation de l’allemand: Carole Wälti)

1978: le Conseil fédéral (gouvernement) charge la Société coopérative nationale pour l’entreposage des déchets radioactifs
(Nagra) d’examiner quelles possibilités la Suisse a en la matière.

1985 : la Nagra affirme qu’il est possible de stocker durablement et sûrement les déchets nucléaires en Suisse.

1995/2002 : les citoyens de Nidwald refusent par deux fois le projet d’un site d’entreposage au Wellenberg.

2001: le dépôt intermédiaire pour déchets radioactifs de Würenlingen, dans le canton d’Argovie, entre en service.

2002: la Nagra présente son projet d’entreposage définitif de déchets hautement radioactifs à Benken, dans le Weinland zurichois.

2004: le ministre de l’Environnement Moritz Leuenberger exige l’examen de solutions alternatives à Benken, notamment au pied sud du Jura argovien et soleurois.

2006: le Conseil fédéral juge établie la faisabilité du stockage final des déchets radioactifs en Suisse.

2 avril 2008: le gouvernement donne son feu vert pour la recherche d’un site de stockage.

En Suisse, les déchets radioactifs proviennent surtout des cinq centrales nucléaires existantes. Le reste est issu de la médecine, de l’industrie et de la recherche.

Au total, cela représente quelques centaines de m3 de déchets par année.

Si l’on considère que les centrales nucléaires existantes atteindront une durée d’exploitation de 50 ans, la quantité totale de déchets à gérer avoisinerait alors 87’100 m3.

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