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La Suisse met le cap à droite toute

La victoire de l'UDC augure d'une redistribution des rôles au sein du Parlement. Keystone

L’Union démocratique du centre sort grand vainqueur des élections fédérales. Le parti de la droite dure revendique donc un deuxième siège au gouvernement.

Mais la gauche progresse aussi. Du coup, l’échiquier politique suisse est de plus en plus polarisé.

L’Union démocratique du centre (UDC) a gagné son pari. Le parti de la droite dure, nationaliste et parfois populiste a confirmé une progression entamée depuis maintenant presque dix ans.

L’UDC devient même le groupe parlementaire le plus important. Et, en gagnant plusieurs sièges en Suisse romande, elle est désormais un parti d’envergure véritablement nationale.

Fort de son poids, l’UDC revendique depuis plusieurs années un deuxième siège au gouvernement. Et le fait qu’elle soit aujourd’hui le premier parti du pays ne donne que davantage de poids à cette exigence.

Une polarisation de plus en plus marquée

Mais l’UDC n’est pas le seul gagnant de ces élections législatives. En effet, la gauche ne s’est pas contentée de maintenir ses positions, elle a réussi à progresser.

Cette progression concerne en premier lieu les écologistes qui confortent leur position de principale formation politique non gouvernementale.

Les différents sondages avaient prévu une bipolarisation de la politique suisse, c’est-à-dire un paysage politique marqué par une droite dure et une gauche fortes.

Or, au soir de ces élections fédérales 2003, force et de constater que ces prévisions étaient exactes. La réalité dépasse même les sondages.

Des recettes simples voire simplistes

La crise économique, le chômage et les menaces planant sur les assurances sociales ont très certainement profité à la gauche qui prend traditionnellement la défense de l’Etat social.

Mais ces mêmes conditions ont aussi favorisé la droite dure qui propose des recettes simples – simplistes diront ses adversaires – pour résoudre des problèmes tels que le renchérissement des primes de l’assurance maladie.

De plus, le discours musclé de l’UDC concernant la population étrangère et un certain sentiment d’insécurité ont, comme de coutume, séduit la frange la plus conservatrice de l’électorat.

Un centre-droit en perdition totale

Ce sont les partis du centre et de la droite modérée qui font les frais de ces élections. Le Parti démocrate-chrétien (PDC/centre-droit) perd une fois de plus des électeurs. Ce n’est pas vraiment une surprise.

Depuis maintenant plus de dix ans, le PDC fait en effet figure d’«homme malade» de la politique suisse. Ce grand parti du centre peine à présenter une image forte aux électeurs.

Plus surprenant est la chute du Parti radical-démocratique (PRD/droite). Les sondages prévoyaient que ce parti réussirait à «limiter les dégâts». Or, force est de constater que ces n’est pas le cas.

Traditionnelle courroie de transmission de l’économie au niveau politique, le PRD a certainement souffert des effets de la morosité économique. Il n’a jamais réussi à convaincre de sa capacité à résoudre les problèmes.

De plus, les projets de son ministre Pascal Couchepin – notamment celui qui prévoit une élévation de l’âge de la retraite – n’ont pas contribué à rendre ce parti très populaire auprès des électeurs.

Comment stopper l’hémorragie

Aussi membre de la grande famille libérale, le Parti libéral (PLS/droite) n’a pas non plus réussi à convaincre. Le recul amorcé en 1999 se confirme. Pire, le PLS n^’est même plus en mesure de former un groupe parlementaire.

Reste à voir maintenant ce que les partis du centre et de la droite vont faire pour stopper l’hémorragie.

La logique voudrait que radicaux et démocrates-chrétiens se rapprochent – voire fusionnent – pour former un grand parti du centre capable de tenir tête à la gauche et à la droite dure.

Mais les résultats de dimanche montrent les limites de cette hypothèse. En effet, là où les radicaux ont collaboré avec l’UDC (Zurich), ils ont réussi à se maintenir. Et là où ils se sont vivement opposés à la droite dure (Suisse romande), ils ont perdu du terrain.

La voie de la stabilité

Avec la fulgurante percée de l’UDC, ces élections fédérales ont pris l’allure d’un véritable séisme politique. Mais il n’est pas pour autant certain qu’elles déboucheront sur de profonds changements ni au Parlement, ni au gouvernement.

Bien que la gauche progresse, le Parlement reste solidement accroché à droite. Et l’UDC ne s’oppose aux autres partis de droite que sur des questions qui touchent l’ouverture du pays.

Or, su ce plan, il n’y a plus vraiment de thèmes d’affrontement: la Suisse est entrée à l’ONU et le débat sur l’adhésion à l’Union européenne est reporté aux calendes grecques.

Sur la plupart des autres sujets tels que la fiscalité, la réduction du déficit public, les partis de droite présentent un front relativement uni. Et cette situation ne devrait pas changer, hormis le fait que l’UDC pourrait davantage encore donner le la.

Le système de concordance

Il n’est pas sûr non plus que la traditionnelle composition du gouvernement (2 radicaux, 2 socialistes, 2 PDC et 1 UDC) soit modifiée.

Ecologistes et démocrates-chrétiens s’opposent à l’entrée du second UDC au gouvernement. Radicaux et socialistes se disent, quant à eux, ouvert à un deuxième siège UDC.

Cependant, il serait difficile de maintenir une politique de concordance au sein du gouvernement si un représentant de l’aile dure de l’UDC y entrait.

Les partis traditionnels devront donc se demander s’ils sont prêts à faire voler en éclat ce système de concordance auquel la population – les sondages le montrent – est très attachée.

Et il est fort probable qu’au moment crucial, ils se refuseront à franchir le Rubicon.

swissinfo, Olivier Pauchard

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