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Le gouvernement de Romano Prodi tombe

Jeudi soir au Séant italien: on s'insulte avant de déboucher bruyamment le champagne. Keystone

Sénateur italien résidant en Suisse, Claudio Micheloni ne veut pas d'élections anticipées dans son pays sans réforme de la loi électorale. Un avis partagé par la presse suisse, qui craint le retour de Berlusconi.

Mis en minorité lors d’un vote de confiance au Sénat, le président du Conseil Romano Prodi a remis jeudi soir sa démission au chef de l’Etat Giorgio Napolitano.

Sitôt le verdict connu jeudi soir, les élus de la droite ont laissé éclater une joie bruyante dans l’hémicycle du sénat italien. «On va tout droit aux élections !», jubilait Gianfranco Fini, chef de la droite conservatrice. «Maintenant, il faut aller voter», a renchéri Silvio Berlusconi, ancien président du Conseil et leader de Forza Italia.

Mais dans l’autre camp, la perspective d’élections anticipées apparaît plus comme une menace que comme une promesse. Car l’actuelle loi électorale, adoptée in extremis par le dernier gouvernement Berlusconi, est faite sur mesure pour empêcher une nette victoire de la gauche.

Et le système a déjà fonctionné: le gouvernement démissionnaire de Romano Prodi repose sur une coalition hétéroclite de 16 partis, qui va de l’extrême-gauche aux catholiques modérés et ne pouvait (théoriquement) compter que sur deux petites voix d’avance au Sénat.

Ingouvernable

Pour Claudio Micheloni, la cause est entendue: «si on organise des élections maintenant, cela changera peut-être les couleurs de la coalition au pouvoir, mais pas de gouvernabilité – ou plutôt l’ingouvernabilité – du pays.»

Le sénateur espère maintenant que le président de la République parviendra à résoudre ce qui est pour lui «une des crises les plus difficiles» de l’histoire italienne. Et pour cela, il faudra «ramener les partis à la raison pour essayer de former un gouvernement de transition avec pour mandat de réformer la loi électorale.»

Une exigence que partage le quotidien zurichois Tages Anzeiger. Pour lui, il faut «d’abord une nouvelle loi électorale». Car voter sous le régime de la loi actuelle «n’aurait pas de sens» et ne ferait que reconduire l’actuel éparpillement des forces politiques.

Sans compter que des élections anticipées organisées maintenant ne pourraient avoir qu’un seul vainqueur: Silvio Berlusconi. Si l’éditorialiste zurichois considère cette perspective comme «bien morne», son confrère de la Basler Zeitung y voit carrément «une mauvaise nouvelle pour l’Italie».

Intérêts personnels

Le quotidien bâlois dénonce également «l’égoïsme personnel du leader d’un parti qui ne représente que 1,4% des voix» et qui est capable de faire tomber un gouvernement «élu sur de grandes espérances par plus de neuf millions de citoyens».

Le fait que la défection d’un seul petit parti suffise à provoquer une telle crise illustre bien, selon Claudio Micheloni, «deux problèmes de fond dont souffre l’Italie. Le premier est que la classe politique n’a ni le sens de l’Etat ni le sens des institutions. Et le deuxième, c’est l’éclatement des forces politiques en une multitude de partis».

Et ce n’est pas tout. Le sénateur dénonce également la «paralysie» d’un parlement où «les pouvoirs sont monopolisés par des leaders qui dirigent leurs partis comme des entreprises, particulièrement à Forza Italia».

«Ce qui est dramatique dans cette crise, c’est qu’elle ne survient pas sur une décision du gouvernement ou sur un problème de choix politique, mais bien à cause des intérêts personnels de certains, qui voulaient faire tomber le cabinet pour l’empêcher de réformer la loi électorale», conclut Claudio Micheloni.

Peu de marge de manoeuvre

La balle est désormais dans le camp du président de la République, qui doit décider entre élections et formation d’un gouvernement de transition pour quelques mois, le temps de réformer la loi électorale. Giorgio Napolitano s’est toujours opposé à un retour aux urnes dans les conditions actuelles.

La marge de manœuvre du chef de l’Etat est cependant très étroite. Comme le note le quotidien tessinois La Ragione, il ne pourra pas aller contre la volonté des grands leaders de la droite et «si Berlusconi, Fini, Casini et Bossi ne veulenet rien savoir, il n’y aura pas d’alternative aux élections anticipées».

swissinfo

16 janvier: le ministre de la justice Clemente Mastella, représentant du petit parti catholique de l’Udeur, démissionne après la révélation du fait que son épouse est visée par une enquête pour corruption.

L’Udeur – qui dispose de tois sénateurs – quitte alors la coalition de Romano Prodi et annonce qu’il ne soutiendra plus le gouvernement qu’«au cas par cas».

23 janvier: le gouvernement Prodi obtient la confiance de la Chambre basse du parlement, où le centre-gauche dispose d’une majorité confortable.

24 janvier: le Sénat – où les forces sont plus équilibrées – refuse sa confiance à Romano Prodi, par 161 voix contre 156.

Né en 1952 à Campli, dans les Abruzzes, région montagneuse du centre de l’Italie qui borde la côte adriatique, Claudio Micheloni vit depuis 1960 en Suisse, dans le canton de Neuchâtel. Il est marié, père de deux fils et dessinateur en génie civil de profession.

De 1997 à 2000, Claudio Micheloni a été membre de la Commission fédérale des étrangers, organe consultatif du gouvernement et du parlement suisses. Il a également présidé la Fédération des colonies libres italiennes en Suisse, organe des immigrés transalpins.

Dès 2002, il a été secrétaire général du Forum pour l’intégration des migrants en Suisse, avant d’être élu en 2006 au Sénat italien, dans la circonscription «étranger». Il appartient au groupe de l’Olivier, la coalition du président du Conseil démissionnaire Romano Prodi.

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