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Les atouts suisses dans la crise nord-coréenne

La ligne de démarcation entre les deux Corées. Keystone

Micheline Calmy-Rey est arrivée vendredi à Pyongyang, première étape de son voyage de dix jours en Asie.

Forte du crédit dont jouit la Suisse, la ministre des Affaires étrangères va tenter d’intervenir dans la crise entre les Etats-Unis et la Corée du Nord.

La cheffe de la diplomatie suisse a été accueillie après sa descente d’avion par son homologue Choe Su Hon.

Il s’agit de la première visite d’un membre du Conseil fédéral depuis l’établissement de relations diplomatiques entre les deux pays en 1974.

«A plusieurs reprises, la Corée du Nord nous a fait comprendre qu’elle souhaitait que nous venions», a lâché dimanche Micheline Calmy-Rey sur les ondes de la Radio suisse romande.

«La Suisse se doit d’honorer ses engagements, a ajouté la ministre en guise de justification. De plus, la Corée du Nord s’ouvre, avec la Suisse comme témoin et comme soutien.»

Une controverse politique

Si Micheline Calmy-Rey sent le besoin de se justifier, c’est que ce voyage est contesté par une partie de la classe politique helvétique.

«Il n’y a aucune urgence, estime Maximilian Reimann, président de la commission des affaires étrangère de la chambre haute du parlement suisse. A l’heure des coupes budgétaire, la ministre peut tout à fait différer son voyage.»

Un point de vue que réfute Philippe Régnier: «Nous assistons à une aggravation de la crise américano-coréenne», souligne le directeur du Centre de recherche sur l’Asie moderne.

Le régime de Pyongyang vient de se retirer de l’accord sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne. Or ce traité était la dernière contrainte légale l’empêchant de développer des armes nucléaires.

Par ailleurs, dans le même temps, les autorités nord-coréennes ont annoncé un renforcement de leurs défenses militaires.

Un enjeu économique

«Une menace élevée de conflit en Extrême-Orient aurait de lourdes répercussions sur l’économie mondiale et sur celle de la Suisse en particulier», prévient Philippe Régnier.

L’Asie de l’Est est en effet le 2e partenaire économique de la Suisse, après l’Union européenne.

«En 2002, rappelle le directeur du Centre de recherche sur l’Asie moderne, à elle seule, la Chine a importé pour 15 milliards de francs de produits helvétiques.»

De plus, la Suisse veut et pourrait, peut-être, contribuer à apaiser la crise entre Washington et Pyongyang.

Une excellente réputation

C’est d’ailleurs pour en parler que Micheline Calmy-Rey a rencontré jeudi à Berne Maurice Strong, conseiller spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Corée du Nord.

C’est que la Suisse jouit d’un certain crédit à Pyongyang. Depuis des années, elle entretient une proximité avec le régime nord-coréen.

Pendant longtemps, elle a été l’un des seuls pays occidentaux à avoir entretenu des relations diplomatiques normales avec la Corée du Nord.

Son agence de coopération (DDC) y est active depuis 1995. Elle a d’ailleurs un bureau dans la capitale nord-coréenne.

«En Corée du Nord, précise Sarah Grosjean, porte-parole de la DDC, la Suisse est l’un des rares pays occidentaux à mener des programmes de développement à moyen terme.»

Et puis, rappelle Philippe Régnier, le directeur du Centre de recherche sur l’Asie moderne, «La Suisse est également l’un des garants du cessez le feu entre les deux Corées».

Depuis 50 ans, un contingent de soldats suisses est en effet stationné au poste frontière de Pan Mun Jon dans la zone démilitarisée qui sépare les deux Corées.

Avec leurs collègues suédois, ces militaires veillent au maintien du cessez-le-feu conclu entre Séoul et Pyongyang, après trois ans de guerre.

Un symbole fort

Lors de son voyage, Micheline Calmy Rey compte d’ailleurs leur rendre visite. Selon son porte-parole Simon Hubacher, la cheffe de la diplomatie suisse devrait même traverser – à pied – la frontière entre les deux pays.

Cette première mondiale – aucun autre ministre ne l’a fait – devrait symboliser le rôle que la Suisse entend jouer.

«La Suisse est convaincue que cette crise – comme toutes les autres – se résoudra par le dialogue et non par l’isolement», a lancé Micheline Calmy-Rey, sur les ondes de la Radio suisse romande.

Martelé sans succès lors de la crise irakienne, ce credo semble correspondre, cette fois, aux objectifs de l’administration américaine de George W.Bush.

A mainte reprise en effet, les Etats-Unis ont répété qu’ils entendaient privilégier la voie du dialogue dans cette crise.

swissinfo, Frédéric Burnand, Genève

-En 1953, la Confédération autorise la participation de soldats suisses à la Commission de supervision des nations neutres en Corée.

-Placée sous l’égide de l’ONU, cette commission veille depuis 50 ans au cessez-le-feu entre Seoul et Pyongyang.

-Elle est située sur le 38ème parallèle qui marque la dernière ligne de front de la guerre de Corée (1950-1953).

-En 1974, la Suisse établit des relations diplomatiques avec le régime communiste nord-coréen.

-En 1995, l’agence de coopération helvétique lance ses premiers programmes en Corée du Nord.

-Par cette action, la Suisse répond aux besoins d’une population menacée par la famine.

-Depuis cette date, la Suisse cherche également à favoriser les premiers signes d’ouverture d’une des dictatures les plus fermées de la planète.

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