Plus de transparence sur le lobbying
Les groupes de pression ont de plus en plus de poids sur la scène politique. Et ils savent y faire. Jusqu'ici, on ne savait pas très bien qui, parmi les lobbyistes, a accès à la salle des pas perdus du Parlement fédéral. Cela va changer.
«La population a le droit de savoir qui représente des groupes d’intérêts au Palais fédéral», affirme la conseillère nationale Edith Graf-Litscher.
Dans une initiative parlementaire, cette députée socialiste a exigé il y a déjà quelques années que les membres des groupes de pression se fassent désormais accréditer. Ce qui permettrait d’empêcher l’accès de la salle des pas perdus à des représentants d’intérêts spécifiques non autorisés.
Pris d’assaut
«Entretemps, j’ai constaté que je m’étais attaquée à forte partie, poursuit Edith Graf-Litscher. La majorité des parlementaires ont peur que les coulisses du parlement ne soient prises d’assaut par des membres de groupes de pression.»
Aujourd’hui, la conseillère nationale socialiste se contente d’un compromis. Au lieu d’un devoir d’accréditation, qui risquerait au contraire de renforcer l’importance des groupes de pression et de provoquer d’interminables débats pour en fixer les critères, il s’agit plutôt de publier la liste de tous les lobbyistes et de leurs commanditaires.
Une liste sur Internet
Il existe bien une telle liste depuis 2003, c’est-à-dire depuis l’entrée en vigueur de la loi sur le Parlement, mais elle est quasi inaccessible au public. C’est-à-dire qu’on ne peut la consulter que sous surveillance et que les photocopies sont interdites. Malgré cela, certains médias ont régulièrement publié ladite liste, comme la Weltwoche, le Blick et le Beobachter.
Dès le début de la nouvelle législature, en 2012, la liste sera publiée officiellement sur Internet. Mais les règles d’accès au saint des saints restent inchangées. C’est-à-dire que l’invitation de l’un ou l’autre parlementaire est nécessaire, chacun d’entre eux disposant de deux «entrées gratuites» d’une durée illimitée jusqu’à leur sortie du parlement.
De l’économie aux Eglises
Un coup d’œil sur la liste montre que tous les parlementaires n’utilisent pas cette possibilité. Il est frappant de voir que plusieurs confient leur passe-droit à des membres de leur famille ou à leurs collaborateurs personnels. Certains n’ont donné que l’une des deux cartes, d’autres aucune. Le parti qui compte le moins d’ayant-droit est l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice).
Les groupes de pression les plus représentés proviennent des domaines de la santé, de l’économie, des syndicats, de la protection de l’environnement, de l’aide au développement et du secteur financier.
Puis viennent des représentants des intérêts des villes et des cantons, des transports, des télécoms, de l’agriculture, de l’industrie alimentaire et de la gastronomie. D’autres lobbyistes représentent les Eglises nationales, les organisations de jeunesse et les Suisses de l’étranger.
Des avantages
Il y a des parlementaires qui préféreraient ne voir aucun lobbyiste entrer au Palais fédéral, poursuit Edith Graf-Litscher. «Il m’arrive de parler avec des lobbyistes. Ce n’est pas un problème, car c’est une réalité. Mais je veux savoir qui représente quels intérêts et pour qui.»
Il est clair que l’accès à la salle des pas perdus procure des avantages. Mais le lobbying se fait surtout à l’extérieur, avec des invitations à des apéritifs, à des repas, à diverses présentations et autres occasions. De plus, l’importance des groupes de pression dans les couloirs du parlement se voit relativisée du fait que nombre d’élus, comme des présidents d’associations, des secrétaires syndicaux, des capitaines d’industrie ou des maires de communes, sont aussi des représentants de groupes d’intérêts.
Lobby: terme anglais qui signifie «groupe de pression» ou «groupe d’intérêts communs» et évoque une structure organisée pour représenter et défendre des intérêts particuliers d’un groupe donné qui s’efforcent d’exercer une influence sur les processus d’élaboration, d’application ou d’interprétation de mesures législatives, mais aussi l’opinion publique à travers les médias.
Les associations patronales, syndicales, non-gouvernementales et autres, ainsi que les grandes entreprises, font valoir leurs intérêts dans le processus législatif. Inversement, les membres des associations bénéficient des informations réunies par celles-ci.
(Traduction de l’allemand: Isabelle Eichenberger)
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