René Gagnaux, un médecin au Mozambique (I)
René Gagnaux a vécu et est mort au Mozambique. Ce médecin et missionnaire suisse assassiné en 1990 est considéré comme un héros dans sa terre d’adoption.
Durant la guerre civile qui a ensanglanté le Mozambique, il a opéré jusqu’à quinze personnes par jour dans des conditions précaires, ne faisant pas de différence entre soldats et rebelles.
Pierre Gagnaux sort des photos d’une boîte conservée au haut d’une armoire de son appartement de Maputo, la capitale du Mozambique. L’une d’elles, en noir et blanc mais déjà jaunie par le temps, montre une promenade en famille faite à la fin des années 70 dans l’île d’Inhaca, l’un de sites touristiques les plus connus du pays.
Au milieu de ces souvenirs, il trouve également une revue consacrée à la biographie de son père. Financée par la coopération suisse, cette publication raconte en 32 pages l’histoire d’un médecin et missionnaire qui a abandonné la sécurité de la Suisse pour aider un peuple qui souffre aux confins de l’Afrique.
Missionnaire
René Gagnaux naît le 4 janvier 1929 à Lausanne. «Lorsqu’il était jeune, il en est arrivé à porter des sacs de charbon pour aider à payer ses études», lit-on dans la publication. Après avoir étudié la médecine à Paris, il effectue un stage à Yverdon. C’est dans cette petite ville vaudoise qu’il rencontre Claude, une technicienne de laboratoire de l’hôpital, qu’il épouse en 1960.
Peu après, le couple se rend au Portugal où René fait un stage en médecine tropicale. C’est à cette époque que le Suisse décide d’aller travailler dans un pays du Tiers-monde où un professionnel comme lui peut aider davantage de gens qu’en Suisse.
Grâce à des amis du chœur d’une église, René Gagnaux découvre que la Mission suisse recherche un médecin au Mozambique. La famille arrive à Lourenço Marques – l’ancien nom de Maputo – le 13 septembre 1964.
Pendant onze ans, René et son épouse travaillent dans un hôpital de la province de Maputo. Le 25 juin 1975, le Front de libération du Mozambique (FRELIMO) déclare l’indépendance de la colonie portugaise et instaure un régime communiste.
Tout est nationalisé et les étrangers ont une semaine pour décider s’ils souhaitent continuer à travailler pour le nouvel Etat ou quitter le pays. La Mission suisse prend alors la responsabilité de laisser ses 17 missionnaires – dont René Gagnaux – dans le pays.
Le médecin suisse et déjà si intégré qu’il en vient même à cultiver des plantes et à élever des animaux dans son jardin familial. Une activité utile, vu que durant les années du régime communistes la pénurie alimentaire est constante.
A l’hôpital, René Gagnaux et ses assistants arrivent à opérer de dix à quinze personnes pas jour. Souvent, les opérations se déroulent dans des conditions précaires en raison du manque de médicaments et d’équipements.
Guerre civile
Personne ne sait vraiment quand la guerre civile commence au Mozambique. Au début des années 80, le pays compte déjà plusieurs formes de guérillas placées sous le commandement de la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO).
Durant les années que dure le conflit, l’hôpital où travaille René Gagnaux accueille des centaines de blessés, qu’il s’agisse de soldats, de civils ou d’insurgés.
Un jour, les troupes officielles menacent de tuer un patient suspecté de soutenir leurs ennemis. Ce n’est que grâce à la pression internationale que René Gagnaux réussit à lui sauver la vie.
Malgré les difficultés et les dangers, le médecin suisse reste fidèle au poste. Enlevé par la RENAMO, il est libéré sans dommage. Et même lorsque des soldats mettent leur feu à son infirmerie ou lors des fréquents combats qui se déroulent près de l’hôpital, René Gagnaux n’abandonne pas son travail.
En 1989, le médecin suisse reçoit la plus haute distinction de la part du gouvernement mozambicain sans même l’avoir réclamée. Bien que frappé par une crise cardiaque à la fin des années 80, il continue à opérer dans son hôpital et dans les campagnes.
«Il utilisait une jeep 4X4 pour se rendre dans les régions éloignées, se souvient son fils Pierre. Il avait l’habitude de ne pas s’arrêter aux contrôles de peur des embuscades ou des vols. Mais pour finir, les gens de la région le connaissaient.»
(à suivre)
swissinfo, Alexander Thoele
(Traduction du portugais: Olivier Pauchard)
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