Reprendre le dialogue, mais sur de nouvelles bases
Suite au refus sénégalais de ratifier l'accord de transit signé en janvier, l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) réclame une reprise des négociations.
Jürg Schertenleib, directeur du service juridique, le confirme à Isobel Johnson.
swissinfo: êtes-vous surpris de la volte-face du gouvernement de Dakar?
Jürg Schertenleib: Non, pas du tout. La Suisse est le premier pays européen à avoir tenté ce genre de négociation sur le transit avec un pays d’Afrique. Il n’y a pas de précédent en la matière.
swissinfo: la Suisse a-t-elle commis des erreurs dans ce dossier?
J.S.: Le rapatriement en Afrique de l’Ouest de requérants d’asile déboutés a déjà suscité la polémique. Le renvoi début 2000 de certains d’entre eux par la Côte d’Ivoire sans accord préalable a dû rendre le Sénégal très suspicieux quant aux volontés réelles de la Suisse.
On ne peut pas ignorer une dimension essentielle des droits de l’homme, notamment la manière dont sont renvoyés les requérants d’asile déboutés.
L’isolement de la Suisse fragilise sa position. Contrairement à d’autres pays européens, nous n’avons pas d’accords de coopération dans le domaine de l’asile.
swissinfo: la Suisse doit-elle reconsidérer cet accord?
J.S.: Nous sommes obligés de nous demander ce que nous pouvons faire à l’heure actuelle. Car il est important d’entreprendre de nouvelles négociations avec le Sénégal.
Mais pour trouver un terrain d’entente, il est nécessaire d’engager des observateurs des droits de l’homme. Leur présence garantirait le respect des droits de chaque requérant débouté amené à rejoindre son pays.
Ces observateurs devraient être habilités à rédiger des rapports concernant le traitement réservé aux individus renvoyés. Petit à petit, des normes de garanties pourraient être établies.
Grâce à ces deux instruments, un nouvel accord pourrait dès lors éventuellement être trouvé avec un pays africain.
swissinfo: le fait que l’accord prévu n’ait pas été ratifié pose-t-il un grand problème à la Suisse?
J.S.: Non, pas du tout. Car jusqu’ici, seules 50 personnes auraient dû retourner en Afrique de l’Ouest par le biais de cet accord.
Il faut, par ailleurs, noter qu’un certain nombre de requérants d’asile d’Afrique occidentale déboutés n’ont pas encore été formellement identifiés. Impossible donc de connaître leur nationalité. Et cela rend leur renvoi très difficile.
D’autres pays européens sont confrontés au même type de problème. D’où la nécessité de parvenir à coopérer avec eux sur cette question.
swissinfo: l’identification de ces personnes aurait-elle été plus facile au Sénégal?
J.S.: Pour moi, le problème reste le même en Suisse ou en Afrique de l’Ouest. Il est de toute évidence imaginable d’organiser des rencontres entre les demandeurs d’asile déboutés et les représentants des ambassades des pays d’Afrique occidentale en Suisse pour faciliter cette démarche.
Interview swissinfo: Isobel Johnson
(traduction: Mathias Froidevaux)
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