Schengen: les frontières tombent entre l’Est et l’Ouest
C'est historique: depuis vendredi à minuit, il n'y a plus de contrôles entre l'Est et l'Ouest de l'Europe. Cela marque la fin définitive du Rideau de fer.
Prévue le 1er novembre 2008, la participation de la Suisse à l’Espace Schengen risque en revanche d’être reportée, car trois membres de l’UE n’ont toujours pas ratifié le traité signé entre Berne et Bruxelles.
La Slovaquie et l’Autriche ont donné jeudi le coup d’envoi des festivités prévues pour l’élargissement de 15 à 24 pays de l’espace européen de libre circulation.
Vendredi à 00h01 très exactement, les pays de l’Est qui sont devenus européens le 1er mai 2004 abolissent officiellement leurs frontières avec leurs voisins de l’Ouest. Quelque 400 millions d’Européens partageront le même espace de libre circulation.
«C’est un événement historique après les destructions des deux guerres mondiales et la division du continent par le Rideau de fer», a souligné le chancelier autrichien Alfred Gusenbauer.
«Ce soir à minuit, vous pourrez voyager sur 4000 km de Tallinn en Estonie à Lisbonne au Portugal, sans aucun contrôle frontalier», s’est enthousiasmé le Premier ministre slovaque Robert Fico.
«Trop tôt»?
Il a fallu des mois de préparatifs administratifs et policiers intenses pour élargir de 15 à 24 pays l’espace Schengen, mettre en commun le fichier informatique SIS de données sur les criminels, créer des patrouilles conjointes entre pays voisins et sécuriser les 9000 km de nouvelles frontières contre les trafiquants et les migrants clandestins.
Mais la suppression des frontières internes ne se fait pas sans tiraillements: certains, comme le chef de la police allemande, estiment qu’il est «trop tôt». Des habitants de régions frontalières d’Allemagne qui redoutent un afflux de criminels sont eux équipés de grilles, de barbelés, d’alarmes.
Face à ces peurs, la direction d’Europol à Berlin a assuré que «la levée des contrôles frontaliers ne créerait pas de nouvelles opportunités pour les criminels».
Retard suisse
La Suisse devrait rejoindre l’Espace Schengen le 1er novembre 2008. Mais l’agenda a pris du retard.
La Commission européenne et Berne exhortent les trois Etats de l’UE qui n’ont pas encore donné leur feu vert à la ratification des accords passés avec la Suisse à franchir le pas. La ratification était prévue cette année encore, mais l’approbation des parlements grec, tchèque et belge se fait attendre.
Luzius Mader, vice-directeur de l’Office fédéral de la justice, n’a pas exclu pas que l’entrée de la Suisse dans l’espace Schengen s’en trouve reportée. Cette situation signifie avant tout un retard pour le test d’arrimage de la Suisse à la base informatique SIS. Arrimage qui permettra une mise en réseau du SIS avec la banque de données suisse RIPOL.
L’EURO 2008 de football, qui aura lieu en juin prochain en Suisse et en Autriche, pose aussi problème. Durant une période de six semaines, aucun test ne pourra en effet être mené, les banques de données étant utilisées pour les engagements policiers autour de cette manifestation.
Autre écueil possible, d’éventuelles plaintes concernant l’adjudication des adaptations techniques nécessaires. De telles plaintes pourraient aussi entraîner des retards, a indiqué Sascha Hardegger, porte-parole du ministère suisse de justice et police. Quelques acteurs admettent de leur côté en aparté que les travaux nécessaires ont été sous-estimés.
swissinfo et les agences
Les accords de Schengen ont été signés en 1985 dans le village luxembourgeois éponyme par la France, l’Allemagne et le Benelux.
Ces accords, qui concernent les secteurs de la justice et de la police, ont fourni le cadre légal à l’abolition progressive du contrôle des personnes aux frontières intérieures de l’UE.
Pour garantir la sécurité, le traité de Schengen prévoit un renforcement des contrôles aux frontières extérieures de l’UE, une meilleure collaboration transfrontalière entre les polices et une lutte coordonnée contre le crime organisé.
Ces accords ont été étendus le 21 décembre 2007 aux pays qui avaient rejoint l’UE le 1er mai 2004 (à l’exception de Chypre).
Le Parlement suisse a ratifié le Traité de Schengen le 16 octobre 2004.
Combattue par référendum, l’adhésion aux espaces Schengen (sécurité) et Dublin (réfugiés) a été approuvé par le peuple suisse (54,6%) le 5 juin 2005.
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