Un nouvel échec pour les coronasceptiques en Suisse
L’initiative populaire fédérale «Pour la liberté et l’intégrité physique» a été balayée par le peuple dimanche. Les Suisses votaient pour la quatrième fois sur un thème en lien avec la pandémie de Covid-19, même si celle-ci n’est plus qu’un mauvais souvenir.
Les opposantes et opposants aux mesures anti-Covid ont subi dimanche une nouvelle défaite dans les urnes. Le peuple a refusé à 73,7% leur initiative qui visait à prohiber toute vaccination obligatoire.
Le Mouvement suisse pour la liberté (MSL), un groupement de citoyens et citoyennes essentiellement alémaniques, avait lancé son texte, intitulé «Pour la liberté et l’intégrité physique», pendant la pandémie de Covid-19 à l’automne 2020. Il exigeait que chacun ait la liberté de déterminer ce qui doit être injecté ou implanté dans son corps. S’il ne citait pas nommément la vaccination, c’était bien elle qui était visée.
L’intégrité physique, exigence principale de l’initiative, est toutefois déjà inscrite dans la Constitution en tant que droit fondamental. Personne ne peut être vacciné sans son consentement en Suisse.
Texte «inutile» ou «mensonge des autorités»?
Le net rejet de l’initiative anti-vaccin prouve qu’elle ne s’attaquait pas à un vrai problème, a réagi la Conférence des directeurs cantonaux de la santé. Elle qualifie le texte d’«inutile» et «malhonnête».
Même si le peuple s’est prononcé en faveur de la possibilité d’une vaccination obligatoire il y a dix ans, celle-ci n’a jamais été appliquée, ont relevé les directrices et directeurs cantonaux de la santé dans un communiqué. Ils soulignent également que, même durant la pandémie de Covid-19, l’obligation de vaccination n’a jamais été sérieusement discutée.
De leur côté, les opposantes et opposants à la vaccination obligatoire refusent de jeter l’éponge. «Nous envisageons de lancer l’initiative une nouvelle fois», a déclaré l’initiateur du texte Richard Koller à Keystone-ATS. Le président du MLS a évoqué l’idée de formuler l’initiative de manière plus précise ou de travailler plutôt sur une initiative parlementaire.
Interrogé sur la RTS, le co-initiant Charly Pache a qualifié le net rejet de «grosse déception». Il a également dénoncé un «mensonge» des autorités, qui ont affirmé dans la brochure de vote destinée à la population que le texte affecterait le travail de la police et de la justice. Dans ce contexte, une citoyenne a d’ailleurs déposé un recours à Genève pour annuler le vote, a indiqué le militant en précisant qu’il soutient la démarche.
Un quatrième plébiscite pour la politique anti-Covid
Parmi les principaux partis du pays, seule l’Union démocratique du Centre (UDC / droite conservatrice) a apporté son soutien à l’initiative.
«Il existe déjà un droit à la liberté personnelle, notamment en ce qui concerne l’intégrité physique et mentale. Cependant, pendant la pandémie, ce droit a été limité et violé. C’est pourquoi un complément à la Constitution est nécessaire», a déclaré Pirmin Schwander, sénateur UDC, pendant la campagne.
Des arguments qui n’ont pas trouvé d’écho auprès du gouvernement et du Parlement, ni auprès de l’électorat ce week-end.
«Aujourd’hui déjà, personne ne peut être vacciné sans son consentement», a souligné le Conseil fédéral, rappelant que le droit à l’intégrité physique et psychique est déjà inscrit dans la Constitution et ne peut être «restreint que pour des raisons très importantes et dans les conditions prévues par la Constitution elle-même».
Ce rejet massif de l’initiative émanant des milieux opposés aux mesures prises pour lutter contre le coronavirus est aussi un plébiscite en faveur de la politique sanitaire des autorités pendant la pandémie. Ce n’est d’ailleurs par le premier: le peuple votait pour la quatrième fois sur un thème lié au Covid-19. Les citoyennes et citoyens avaient auparavant accepté trois fois la base légale qui régissait les mesures anti-Covid.
L’obligation vaccinale pas totalement exclue
En réalité, l’obligation de se faire vacciner n’est pas totalement exclue en Suisse. L’article 22 de la loi sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme stipule qu’«en cas de danger sérieux, les cantons peuvent déclarer obligatoires des vaccinations pour les groupes de population à risque, en particulier pour les personnes particulièrement exposées et les personnes exerçant certaines activités».
Malgré cette possibilité, aucune autorité cantonale n’avait pris une telle mesure pendant la pandémie. En revanche, certaines institutions et entreprises l’ont fait.
À Genève, par exemple, de septembre 2021 à août 2022, l’Hôpital universitaire avait imposé la vaccination à tout le personnel nouvellement recruté.
La compagnie aérienne Swiss, pour sa part, avait licencié 150 membres d’équipage qui avaient refusé le vaccin. Une affaire sur laquelle la justice suisse devra faire la lumière. Certaines des personnes licenciées ont poursuivi leur ancien employeur, estimant que la mesure – pourtant couverte par la convention collective de travail du personnel de cabine – était disproportionnée. Le tribunal compétent de Zurich n’a pas encore statué.
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