Une percée autour de la fiscalité de l’épargne
Pour la première fois, Suisses et Européens ont examiné jeudi à Bruxelles un projet d'accord sur la fiscalité de l'épargne.
Il se base sur la proposition suisse d’une retenue d’impôt à la source. Plus question d’échange automatique d’informations.
Les négociations sur la fiscalité de l’épargne progressent. Lors d’une conférence de presse commune – fait rarissime – les chefs négociateurs des deux parties ont confirmé qu’ils étaient proches d’une solution. Et qu’il y avait sur la table un projet concret d’accord.
Ce projet reprend la proposition suisse, à savoir la retenue à la source, comme solution alternative pour lutter contre la fraude fiscale.
«Nous ne demandons pas à la Suisse d’appliquer le système d’échange automatique d’informations», explique Robert Verrue, directeur général de la Direction Générale Fiscalité. «Car nous savons que la Suisse ne peut pas adopter ce système», poursuit le chef négociateur de l’Union européenne (UE).
Quatre principes
Concrètement, le projet d’accord repose sur quatre principes. Premièrement, la Suisse introduirait une retenue à la source sur les intérêts de l’épargne perçus par les non-résidents communautaires. Le taux de taxation reste ouvert. Il pourrait s’élever à 15% dans un premier temps, puis à 20%. La plus grande partie de ces recettes serait rétrocédée aux pays de l’UE.
Deuxième élément, l’instauration en Suisse d’un mécanisme général d’échange d’informations sur une base volontaire. Avec l’accord de leurs clients étrangers, les banques suisses pourraient transmettre automatiquement des renseignements aux autorités fiscales des Etats membres de l’UE.
Troisième point, l’intégration dans l’accord bilatéral d’une clause de révision.
Enfin, l’UE demande à la Suisse de fournir des informations à la demande, en cas d’escroquerie fiscale.
Désaccord sur l’échange à la demande
Les deux parties sont d’accord sur trois des quatre éléments du compromis. Le dernier point reste en discussion. «L’information à la demande ne fait pas partie de la négociation sur la directive sur la fiscalité de l’épargne» souligne le professeur Robert Waldburger, délégué aux accords fiscaux internationaux à l’Administration fédérale des contributions.
Le chef négociateur suisse ne veut pas répondre aux rumeurs qui laissent entendre que la Suisse pourrait élargir la définition de la fraude fiscale, afin d’y intégrer des cas graves d’évasion fiscale.
Mais Robert Waldburger reconnaît que Berne serait disposée à accorder une assistance administrative sur demande pour les cas d’escroquerie fiscale dans le cadre des conventions de double imposition conclues avec les Etats membres de l’UE.
La Commission a cédé
Depuis la dernière réunion des ministres européens des Finances, le 8 octobre, les rencontres entre experts suisses et européens se sont multipliées. La pression sur la Suisse s’est accentuée.
Face à l’intransigeance de Berne, la Commission européenne, soucieuse d’obtenir un accord, a donc cédé. Ainsi, c’est la solution suisse qui est retenue comme base du projet d’accord.
Reste à savoir si cet accord sera jugé acceptable par les ministres européens des Finances. Car la Commission européenne n’est chargée que de négocier un accord avec la Suisse qui soit «équivalent» à la directive européenne. La décision finale est prise par les ministres.
Le sujet sera évoqué à huis-clos lors de leur prochaine réunion le 5 novembre. C’est le 3 décembre qu’ils feront le bilan des négociations avec les pays tiers et, en particulier, avec le premier pays inscrit sur leur liste, la Suisse.
Les discussions promettent d’être rudes. Car pour plusieurs pays, mesures «équivalentes» signifient mesures «égales». Ce qui est en jeu maintenant, c’est le sort de la directive européenne qui prévoit d’instaurer un système automatique d’échange d’informations entre administrations fiscales des Quinze.
Barbara Speziali, Bruxelles
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