Barack Obama, président d’une ère nouvelle
La presse suisse est unanime à le relever, les Etats-Unis ne seront plus tout à fait les mêmes demain. Entre les espoirs suscités et les importants défis qui l'attendent, le nouveau président américain devra se montrer à la hauteur de ceux dont il se réclame.
Une «nouvelle ère de paix, de responsabilité». Récurrente dans le discours d’investiture de Barack Obama mardi, la formule a fait mouche. Les journaux helvétiques la reprennent en chœur, commentant ce qu’elle signifie à l’échelle des Etats-Unis mais aussi du monde.
L’espoir d’abord, incarné par ces millions d’Américains et de téléspectateurs de la planète entière qui ont assisté, en direct ou en différé, à la prestation de serment du premier président «noir» de l’histoire des Etats-Unis.
Ce «faiseur de rêve», comme le nomme le journal romand Le Temps, dont le slogan électoral est détourné en une du quotidien de boulevard alémanique Blick: «Jetzt we can !» («Maintenant nous pouvons!»). Comme pour mieux rappeler que c’est désormais l’épreuve des faits qui attend Barack Obama.
Valeurs et vertus
«Fini les envolées lyriques de la campagne électorale, retour sur terre! C’était là également l’enjeu du supershow d’hier: désigner ce qui est réalisable ou nécessaire, sans renoncer à l’idéal», note à ce propos l’éditorialiste de La Liberté. Pour qui, la prestation de serment de Barack Obama «fait d’ores et déjà partie de la mémoire collective du 21ème siècle».
Relevant les qualités d’orateur et l’habileté rhétorique du 44ème président des Etats-Unis, les journaux helvétiques soulignent également que l’«ère nouvelle» annoncée par Barack Obama devra passer d’abord par un retour à certaines valeurs.
«Il a convoqué l’espoir et la vertu, le respect, le partage. Le sacrifice, la résilience», énumère ainsi le commentateur de 24 heures. Celui de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) parle lui de valeurs «américaines, comme le zèle, l’honnêteté, le courage, le sens de la justice». Les seules susceptibles, aux yeux du quotidien zurichois, de «fonctionner comme remède contre les difficultés actuelles».
«Innombrables» selon Le Temps, elles sont résumées par le Tages Anzeiger: «L’industrie de la finance est à terre, des millions d’emplois sûrs manquent, la formation et le système d’assurance maladie sont inaccessibles pour beaucoup d’Américains. Sans parler de la crise au niveau international.»
Popularité et majorité
Face à ces défis, Barack Obama va devoir «remplacer le cynisme par la réconciliation, le dogmatisme par l’efficacité, l’arrogance par la générosité, la crainte par l’espoir» juge Le Temps. Faute de quoi «la complexité, l’impatience, la banalité du réel» risquent de le rattraper.
Mais le nouveau président américain a de nombreux atouts en main selon la presse helvétique. A commencer par son pragmatisme et sa détermination. De son discours d’investiture, c’est la figure d’un homme fort en temps de crise qui émerge, note ainsi le journal bâlois Basler Zeitung . Car son ambition est de se montrer à la hauteur de ses plus illustres prédécesseurs, Lincoln, Roosevelt ou Kennedy.
Quant à sa popularité, elle lui vaut un début de mandat marqué à la fois par «une espérance hors du commun et un véritable enthousiasme», d’après le Bund. Ceci également du côté de la classe politique.
«Il bénéficie, au sein du Capitole et dans les deux Chambres du Congrès, d’une très forte majorité, constate à ce propos la NZZ. Une majorité plus importante que celle dont ont pu bénéficier ses prédécesseurs lors de ce dernier quart de siècle. C’est une chance qui l’aidera à mettre en place des réformes rapidement.»
Sévères critiques contre Bush
Reste que, et le Bund juge bon de le rappeler dans le titre de son éditorial, «Obama n’est qu’un politicien». Et le journal bernois de relever que le nouveau président ne pourra assurément pas satisfaire tous les espoirs placés en lui, ni surtout «changer les Etats-Unis en une seule nuit».
Il pourra néanmoins, et les commentateurs sont nombreux à le relever, faire mieux, nettement mieux, que le président sortant. Lorsqu’ils l’évoquent, tous se montrent très critiques.
«Quel contraste abyssal avec un prédécesseur dont aucun des mêmes mots, les eût-il prononcé, n’aurait sonné juste, écrit 24 heures. Parce que là où Barack Obama entame sa marche à pied, résolu mais sans fard, déterminé mais sans haine ni accents messianiques, George W. Bush partait en chevalier vengeur, dans une croisade irrésolue».
Même constat dans le journal tessinois La Regione, qui relève qu’Obama, lui, n’a pas parlé d’une Amérique apeurée. «Il ne lui a pas fourni des raisons de craindre ou des mots d’ordre idéologiques pour se réinventer. Il n’a pas désigné d’éventuels ennemis à combattre, hormis ceux issus de la perte de repères.»
Et le Tages Anzeiger de renchérir: «Sous Bush – qui n’est déjà plus qu’une ombre -, l’Amérique n’était pas elle-même. Elle peut faire mieux, pour elle-même et pour le monde».
swissinfo, Carole Wälti
Investiture. Barack Obama est le 44ème président des Etats-Unis. Il a été investi dans sa fonction mardi 20 janvier devant le Capitole, siège du parlement américain, à Washington.
Serment. Après la prestation de serment du vice-président Joe Biden, Barack Obama a prêté serment sur la Bible d’Abraham Lincoln.
Discours. Le nouveau président a ensuite prononcé son discours d’investiture, dessin de la vision et des grandes orientations de sa présidence.
Sécurité. L’ordre a été assuré par 10’000 membres de la Garde nationale et 7500 soldats.
Foule. Plus de deux millions de personnes ont assisté au sacre de Barack Obama.
Juriste. Barack Obama, né en 1961 à Honolulu sur l’île d’Hawaï, est juriste de formation. En 2004, il a été élu sénateur de l’Illinois.
Annonce. Le 10 février 2007, plus de 18’000 personnes ont accouru à Springfield, dans l’Illinois, pour assister à l’annonce de sa candidature à l’élection présidentielle.
Officiel. Le 3 juin 2008, Obama a obtenu le nombre suffisant de voix de délégués pour devenir le candidat officiel du Parti démocrate et défier son adversaire républicain John McCain.
Victoire. Le 4 novembre, il remporte l’élection présidentielle avec 53% des voix, contre 46% à John McCain.
Populaire. Aucun président n’a entamé son premier mandat avec une telle cote de popularité (78% selon un dernier sondage).
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