Le glissement à droite s’accentue
La question de l’immigration donne des ailes à l’Union démocratique du centre, tandis que les partis du centre sont à la peine. Ce sont les principaux enseignements du baromètre électoral de la SRG SSR diffusé mercredi.
Si les sondages précédents avaient mis en exergue l’avancée du Parti libéral-radical (PLR / droite), c’est cette fois la progression de l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) qui saute aux yeux.
Le parti enregistre en effet une hausse de pratiquement deux points par rapport au baromètre du mois de juin, atteignant 28%. L’UDC est donc en progression de 1,4% par rapport aux élections fédérales d’il y a quatre ans.
Le baromètre
Pour cette enquête, l’institut gfs.bern a interrogé par téléphone un échantillon représentatif de 2013 personnes entre le 21 et le 29 août.
La marge d’erreur est de +/- 2,2%.
Pour des raisons liées à la protection des données, l’adresse des électeurs installés hors des frontières nationales n’est pas communiquée aux sondeurs.
En plus d’une campagne électorale jugée réussie par les personnes interrogées (une sur quatre considère même que c’est la meilleure), l’UDC a un autre atout précieux dans sa manche.
«Le thème qui est désormais largement dominant est celui de l’asile et l’UDC est considérée comme le parti le plus compétent pour résoudre ce problème», souligne Claude Longchamp, responsable de l’institut gfs.bernLien externe qui a réalisé l’étude pour le compte de la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR).
Les derniers développements sur le front de la migration, en particulier le mouvement de solidarité apparu en Allemagne et en Autriche (le sondage avait été effectué avant, entre le 21 et le 29 août), ne devraient pas avoir une grande influence. «L’UDC pourrait perdre ou gagner 1%, mais certainement pas 5%», estime Claude Longchamp.
Le responsable de l’institut gfs.bern rappelle que flot actuel de réfugiés représente le troisième plus important enregistré en Suisse depuis 1945, après ceux de 1989/91 et de 1998/99. «En 1999, l’UDC avait connu la plus grande progression de son histoire en gagnant 7%», rappelle Claude Longchamp.
Le PLR pourrait aussi contribuer au renforcement de la droite. Le parti confirme en effet les progrès déjà relevés dans les précédents baromètres. Même s’il s’affaiblit légèrement par rapport au mois de juin (- 0,2%), le PLR est crédité de 16,9%, soit 1,8% de plus que lors des élections fédérales de 2011.
Pour le PLR, l’évolution pourrait être plus positive encore, mais son électorat semble moins se mobiliser que celui des autres partis. Seulement 49% des personnes proches des idées du PLR indiquent vouloir se rendre aux urnes. A titre de comparaison, ce taux est de 58% parmi les sympathisants de l’UDC et du Parti socialiste..
Relative stabilité à gauche
Les choses ne devraient pas fondamentalement changer pour les socialistes. Le PS reste sur ses positions des derniers mois, soit à 19,3%.
Les socialistes pourraient progresser de 0,6% par rapport aux dernières élections fédérales. Mais la gauche dans son ensemble devrait rester stable, car les voix en plus pour le PS feront très certainement défaut au Parti écologiste suisse.
Les Verts souffrent probablement du fait que la question environnementale ne figure plus au sommet de la liste des préoccupations des Suisses. Le parti régresse de 1% par rapport à 2011, pour atteindre 7,4%.
Tassement au centre
Ce 4e baromètre confirme une autre tendance déjà apparue au cours des derniers mois. «Le centre se tasse, même s’il n’y a pas de pertes spectaculaires», relève Claude Longchamp.
Le Parti démocrate-chrétien (PDC / centre-droit) atteint le niveau le plus bas de son histoire avec 11,1% (- 1,2% par rapport à 2011). En mars, les démocrates-chrétiens avaient subi une défaite dans les urnes sur l’un de leurs thèmes de prédilection, la famille. Leur initiative pour défiscaliser les allocations familiales, soutenue aussi par l’UDC, avait été refusée par trois quarts des votants.
Les deux nouvelles formations du centre, les Verts libéraux (VL) et le Parti bourgeois démocratique (PBD) sont également en perte de vitesse. Elles ne réussissent pas à renouer avec le succès rencontré y a quatre ans.
Les VL peinent à se remettre de leur déroute de mars dernier, lorsque leur initiative demandant de remplacer la TVA par un impôt écologique avait été balayée à plus de 90%. Le PBD, parti de la ministre Eveline Widmer-Schlumpf, n’est de son côté pas parvenu à se profiler sur un thème en particulier et subit encore le contrecoup de sa déroute électorale dans son fief du canton de Berne (perte de 11 de ses 25 sièges).
Le scénario le plus probable à l’issue des prochaines élections est donc celui d’un glissement à droite, conclut Claude Longchamp. «Une droite renforcée, mais pas une majorité de droite», précise-t-il.
L’immigration, et puis plus rien
En ce qui concerne les thèmes, l’immigration se retrouve très largement en tête sur la liste des préoccupations des Suisses: pour 46 électeurs sur 100, il s’agit du problème le plus urgent à résoudre (+ 12% par rapport au baromètre précédent).
C’est le cas dans toutes les régions du pays. En Suisse italienne, par exemple, le chômage était la préoccupation principale jusqu’il y a trois mois. Aujourd’hui, c’est l’immigration. A titre de comparaison, il y a quatre ans, moins d’un quart des personnes interrogées (22%) faisaient de l’immigration le problème numéro un.
Cette prédominance a fait passer toutes les autres problématiques au second plan. Les relations avec l’Union européenne, mises à mal après l’acceptation de l’initiative «Contre l’immigration de masse», arrivent en deuxième position, mais ne sont jugées prioritaires que par 7% des sondés. L’environnement, deuxième préoccupation des Suisses il y a 4 ans, a dégringolé au 5e rang, après les assurances sociales et le chômage.
«Il s’agit d’un niveau encore jamais atteint auparavant, souligne Claude Longchamp en parlant de l’immigration. Jamais un thème n’avait autant dominé une campagne électorale.»
Politique énergétique
Lors de cette enquête, l’institut gfs.bern s’est aussi concentré sur le thème de la politique énergétique.
53% des personnes interrogées ont affirmé être «complètement d’accord» avec le fait que la Suisse doit abandonner le nucléaire à long terme. 21% sont «plutôt d’accord», 14% «plutôt pas d’accord» et 8% «pas du tout d’accord». 4% n’ont donné aucune réponse.
Presque les trois quarts (73%) des sondés ont par ailleurs déclaré être convaincus ou plutôt convaincus du fait que le tournant énergétique se traduira pas la création de milliers d’emplois. La même proportion de personnes estime que la durée de vie des centrales nucléaires existantes doit être limitée.
Enfin, les sondés de divisent en deux camps de force égale quant à la capacité de l’économie à encaisser une hausse de l’énergie et de l’essence: 43% sont d’avis que ces hausses ne sont pas supportable, alors que 51% sont de l’avis contraire.
(Traduction de l’italien: Olivier Pauchard)
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