Tout le monde ne veut pas la transparence du financement
Alors qu’une partie de la droite refuse de divulguer ses ressources pour les élections du 18 octobre, les grands partis jugent-ils utile de faire tout la lumière sur leur financement? Tour d’horizon.
Faut-il une loi fédérale sur la transparence du financement des partis? C’est ce que demande la gauche et ce que recommande le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECOLien externe), une instance du Conseil de l’Europe, depuis plusieurs années.
En l’absence de législation, les partis sont libres de communiquer ou non leurs budgets et leurs sources de financement. Notre enquête a montré que le PLR, l’UDC et le PDC sont les partis les moins transparents du pays. A l’inverse, les champions de la transparence sont le PS, les Verts et le PEV.
Nous avons demandé aux principaux partis du pays comment ils se positionnent par rapport au débat sur la transparence du financement des partis et des campagnes. Tour d’horizon.
PS: « Publier les dons supérieurs à 5000 ou 10’000 francs »
Pour une loi fédérale, le PS affirme déjà appliquer la transparence et met en avant sa charte éthique. « En 2013 et 2014, nous avons refusé pour un demi-million de francs de dons provenant notamment de Credit Suisse, UBS, AXA Winthertour et Swiss », affirme Flavia Wasserfallen, co-secrétaire générale du PS. Seuls les dons « transparents » de La Mobilière et Raiffeisen ont été acceptés.
Les socialistes demandent notamment l’obligation de publier la provenance des dons de plus de 5000 ou 10’000 francs. Le parti indique n’avoir reçu qu’un seul don supérieur à cette limite en vue des fédérales. De qui? « On ne peut pas le dire après-coup, et il faut les mêmes règles pour tout le monde », explique Flavia Wasserfallen, précisant que les comptes du parti sont disponibles sur leur site. Si la situation n’évolue pas après les élections fédérales, le PS va examiner le lancement d’une initiative populaire, prévient la co-secrétaire générale du parti.
PLR: « Seuls le président et le secrétaire général connaissent les dons »
Parti le moins transparent d’après notre enquête, le PLR a refusé nos demandes d’interview. Le secrétaire général du parti Samuel Lanz s’est contenté d’un court commentaire par e-mail:
« Les fonds pour la campagne électorale sont générés durant les quatre ans avant les élections, en particulier grâce à des demandes de dons par courrier à nos membres et aux contributions de nos élus. A cela s’ajoutent des dons de particuliers et d’entreprises. Afin de préserver l’indépendance du parti, seuls le président et le secrétaire général du parti connaissent les montants et les sources des dons ».
Les Verts: « Il faut un meilleur financement des partis »
Comme le PS, les Verts militent pour une loi sur la transparence du financement des partis. Celle-ci ne devrait toutefois pas concerner les petits donateurs. « Ce sont surtout les grandes donations qui posent des problèmes, ce n’est pas un don de 50 francs qui peut influencer. Il y a aussi la question de la protection des données, car le donateur pourrait par exemple avoir des problèmes avec son employeur », explique Miriam Behrens, secrétaire générale des Verts.
Selon elle, il faut aussi revoir le financement des formations politiques: « Les partis sont obligés de chercher des dons et cela comporte des risques, surtout auprès des entreprises. Il faudrait recevoir plus de moyens de l’Etat, comme cela se passe dans d’autres pays ».
UDC: « Nous ne voulons pas être tributaires de l’Etat »
Sur le plan national, l’UDC n’a dévoilé aucun chiffre. Le parti s’affiche clairement contre une loi obligeant les partis à dévoiler leurs comptes. « En Europe ou même dans le canton de Genève, il y a une transparence très forte qui s’accompagne toujours d’un financement public important. On ne souhaite pas un tel système où les partis sont tributaires d’un financement public », explique le vice-président du parti, Pierre-Alain Voiblet.
Ce dernier assure que l’UDC refuserait des « dons conditionnés » si elle en recevait et met en garde contre la transparence volontaire: « Dans tous les partis, il y a des groupes, comme des associations et des syndicats, qui financent des campagnes. C’est donc de la naïveté de croire des comptes de campagne bruts ».
PDC: « C’est aux entreprises de déclarer leurs dons »
Au PDC, la secrétaire générale Béatrice Wertli assure « ne pas accepter n’importe quel don » mais que « c’est aux associations et aux entreprises qui nous soutiennent de déclarer leurs dons ». Les démocrates-chrétiens sont donc opposés à une loi obligeant la publication de la liste des donateurs.
Béatrice Wertli regrette la mauvaise image qui colle aux finances des partis: « Cela devrait être un atout de dire qu’on finance un parti politique. Apparemment, il n’y a rien de mal à financer la Superleague ou le Festival du film de Locarno, mais dès qu’il s’agit d’un parti politique, pour une raison étrange, ce n’est pas le cas ».
PVL et PBD: « Les mêmes règles pour tout le monde »
« Si tout le monde est transparent, nous sommes pour », explique la secrétaire générale des Vert’libéraux, Sandra Gurtner-Oesch. Selon elle, la transparence « n’est pas un avantage dans cet environnement concurrentiel car certains donateurs n’aiment pas voir leur nom publié et pourraient renoncer à faire leur don ».
Ni vraiment pour, ni vraiment contre, le PBD pense lui « qu’il faut mener la discussion ». « La transparence du financement ou un financement par l’Etat ne suffisent pas car des fondations peuvent financer des campagnes et rester en dehors des comptes du parti », précise sa secrétaire générale, Nina Zosso.
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