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Un petit pas vers la transparence de la vie politique suisse

L’initiative populaire sur la transparence des partis a été déposée en octobre 2017, munie de 110'000 signatures. © Keystone / Anthony Anex

Un peu de lumière dans l’opacité du financement des partis politiques et des campagnes en Suisse. Les sénateurs ont accepté d’édicter des règles en la matière, refusant toutefois de se montrer trop stricts. Un pas insuffisant vers davantage de transparence, critique Transparency International Suisse.

Si la Suisse se plaît à vanter sa démocratie directe, le financement des partis politiques helvétiques reste le plus opaque d’Europe. Parmi les 47 États membres du Conseil de l’Europe, la Confédération est la seule à n’avoir pas élaboré de loi en la matière. Une lacune qui lui a valu d’être pointée du doigt à maintes reprises par le Groupe d’États contre la corruption du Conseil de l’Europe (GRECOLien externe).

Les sénateurs avancent toutefois avec beaucoup de prudence vers davantage de transparence. La Chambre haute du Parlement (Conseil des États) a refusé ce lundi l’initiative populaireLien externe «Pour plus de transparence dans le financement de la vie politique» par 32 voix contre 12.

Déposé en octobre 2017 par la gauche et les petits partis du centre, le texte vise notamment à contraindre les partis politiques à rendre public le montant ainsi que l’origine des dons de plus de 10’000 francs ou leurs dépenses de campagne pour des élections et votations lorsqu’elles dépassent 100’000 francs. Seuls la gauche et les Verts ont défendu l’initiative.

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Un seuil à 25’000 francs

Comme le gouvernement, la majorité des sénateurs a reconnu la nécessité d’agir, mais a estimé que l’initiative allait trop loin. À la place, la Chambre haute a opté par 29 voix contre 13 et deux abstentions pour un contre-projet Lien externeindirect plus édulcoré, élaboré par la Commission des institutions politiques du Conseil des États. Celui-ci fixe la barre des montants soumis à la transparence à 25’000 francs par année pour les dons et à 250’000 francs pour les campagnes.

Les sénateurs ont en outre encore adouci la proposition de leur commission. Il n’y aura ainsi pas d’obligation de déclaration lors de récoltes de signatures en vue d’une initiative populaire ou d’un référendum. La Chambre haute est cependant allée au-delà du texte d’initiative sur un point: elle veut interdire les dons provenant de l’étranger, quel qu’en soit le montant.

Les actes intentionnels de dissimulation pourront être punis d’une amende de 40’000 francs, mais aucune amende ne sera prévue pour les actes de négligence.

L’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) et le Parti libéral radical (PLR /droite), qui estiment que le texte améliore peu la transparence, ont tenté en vain de rejeter la totalité du projet.

«Le manque d’information sur le financement de la vie politique nuit à la réputation, mais aussi à la qualité de la démocratie directe suisse»
Alex Bicaro

Des lacunes pointées du doigt

Pour la section suisse de l’ONG Transparency International, qui figure parmi les auteurs de l’initiative, l’option retenue par la Chambre haute ne va clairement pas assez loin. «Les lacunes du contre-projet rendent la loi de facto inexistante», commente le directeur adjoint de l’organisation, Alex Biscaro.

Il estime que le seuil de 25’000 francs pour soumettre les dons à la transparence est trop élevé car une grande majorité des donations y échapperait. «Dans les pays européens, ce montant est en moyenne de 3500 euros, un objectif bien plus exigeant que les modestes 10’000 francs demandés par l’initiative», souligne Alex Biscaro.

Le contre-projet ne prévoit pas non plus de mécanisme de contrôle efficace pour veiller au respect des normes, aux yeux de Transparency International Suisse. L’ONG regrette également que les règles de transparence prévues ne s’appliquent qu’aux élections à la Chambre basse et pas à celle de la Chambre haute.

La qualité de la démocratie directe en jeu

Si cinq cantons (le Tessin, Genève, Neuchâtel, Fribourg et Schwyz) ont déjà édicté leurs propres règles en matière de transparence, Alex Biscaro estime que des mesures doivent être prises à l’échelle nationale. «Le manque d’information sur le financement de la vie politique nuit à la réputation, mais aussi à la qualité de la démocratie directe suisse», estime-t-il.

L’initiative et le contre-projet indirect devront encore être traités par la Chambre basse (Conseil national), avant d’être présentés à la population.

Fin de la procédure de non-conformité

Dans son dernier rapport, publié en septembre, le GRECO a clos la procédure de non-conformité contre Berne, notamment en raison du contre-projet indirect du Parlement. La Suisse devra élaborer un rapport d’ici la fin 2020 pour informer le groupe d’États de l’évolution du dossier. Celui-ci donnera ensuite une nouvelle position.

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