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«Un non à l’impôt minimum de l’OCDE équivaudrait à se tirer une balle dans le pied»

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Monika Ruehl est directrice d'economiesuisse, la faîtière des grandes entreprises. © Keystone / Peter Klaunzer

Voter oui à l’impôt minimum de l’OCDE sur les grandes entreprises, c’est s’assurer que les recettes fiscales supplémentaires promises par la réforme restent en Suisse, argumentent les partisans de l’objet soumis à la sagacité du peuple le 18 juin. Les explications de la directrice d’economiesuisse, Monika Rühl.

swissinfo.ch: En trois phrases, pourquoi le peuple devrait-il accepter ce projet?

Monika Rühl: Un oui est nécessaire pour que les recettes fiscales supplémentaires restent en Suisse et ne partent pas à l’étranger. Deuxièmement, l’ensemble des cantons profitera de cet argent par le biais de la péréquation. Troisièmement, la Suisse doit demeurer une place économique attractive, les grandes entreprises qui sont installées ici et paient des impôts profitent à toutes et tous.

La Suisse prétériterait-elle son image en refusant de se conformer au nouveau principe?

Dans ce cas, les impôts iraient tout simplement à d’autres pays. En laissant cela arriver, nous nous tirerions une balle dans le pied. Seul un oui garantit que cet argent reste en Suisse.

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L’impôt minimum de l’OCDE a été revu à la baisse en cours d’élaboration au niveau international. Il est passé des 21% prévus à l’origine à 15%. C’est trop peu, non?

Quelque 140 pays se sont accordés sur ces 15%. Tous ces pays mettent en œuvre le projet, nous compris. Notre pays a tout intérêt à ce que ces 15% d’impôts sur les grandes entreprises actives globalement demeurent en Suisse et que les recettes engrangées puissent être utilisées ici.

Si nous n’appliquons pas cet impôt minimum, l’impôt additionnel sera simplement ponctionné à l’étranger. Nous ne verrions alors rien de cet argent. Les voix critiques l’ont aussi compris. Les Verts ont choisi la liberté de vote et certaines sections cantonales ont même opté pour le oui. Des figures éminentes du PS appuient également le projet.

La Suisse s’est positionnée en faveur d’un impôt réduit. Quelle est votre position à cet égard?

Une imposition attractive pour les entreprises est un facteur de succès important pour la Suisse. Il en résulte une hausse constante des recettes fiscales. La communauté internationale s’est mise d’accord sur un impôt minimum de 15% pour les grandes multinationales afin de mettre tout le monde sur un pied d’égalité sous l’angle de la concurrence fiscale. Les directives de l’OCDE pour la mise en œuvre du projet sont très claires et s’appliquent à tous les pays de la même manière.

Une partie des opposants relève que les bénéfices des grandes entreprises multinationales sont aussi générés dans le Sud global. En conséquence de quoi le Sud devrait obtenir une part des impôts prélevés ici. Un argument que vous pouvez suivre?

Si le développement des pays du Sud global est une préoccupation tout à fait légitime, la participation à l’impôt sur les bénéfices n’est pas l’instrument qui convient pour atteindre ce but.

Quel est-il alors?

Les pays du Sud global doivent devenir plus attractifs pour les investissements. Ils ont besoin, par exemple, de sécurité du droit et de conditions-cadres stables. C’est dans cette optique que le Confédération soutient ces pays au moyen de projets ciblés dans le cadre de la coopération au développement.

Si la plupart des entreprises concernées ont installé leur siège dans les pays industrialisés où cet impôt minimum est appliqué, ce n’est pas sans raison. Les pays en développement attirent beaucoup moins d’entreprises de ce type. Mais ils tirent profit des investissements directs.

La façon de ventiler les recettes fiscales supplémentaires en Suisse même est un autre sujet de désaccord. Tous les cantons n’en profiteront pas de la même manière. Ne serait-il pas plus juste qu’une part plus importante de cet argent soit attribuée au pot commun de la péréquation?

C’est bien ce qui se passe. Je tiens d’abord à relever que la clé de répartition prévue a le soutien de la Confédération, de tous les cantons, des villes et des communes. La péréquation, qui a fait ses preuves, permettra à l’ensemble des cantons de profiter des recettes additionnelles générées par l’impôt minimum. Plus il y a d’argent dans la péréquation, plus les cantons bénéficiaires en touchent.

Graphique
Kai Reusser / swissinfo.ch

Il faut voir aussi que les cantons contraints de relever leur niveau d’imposition sur les grandes entreprises perdront en attractivité. En conséquence de quoi ils doivent pouvoir prendre des mesures alternatives pour demeurer attractifs. Sur la manière, ils ont toute liberté.

Ils peuvent choisir par exemple de promouvoir les activités de recherche et développement ou de subventionner les crèches.

Mais la concurrence fiscale entre cantons va redoubler de vigueur…

Au contraire. Pour les grandes entreprises, la concurrence fiscale sera contenue puisque les 15% seront appliqués partout.

Certes, mais les cantons économiquement forts pourront utiliser l’argent additionnel pour réduire leurs impôts dans d’autres domaines. Ce qui aiguisera la concurrence fiscale…

Si un canton manifestait de telles velléités, il serait possible pour la population de voter sur la question. La démocratie s’applique dans ce cas de figure aussi.

Les opposants signalent aussi des échappatoires sous l’angle de l’impôt. Selon eux, le système fiscal suisse fournit les instruments à même de permettre aux grandes entreprises de compenser l’impôt minimum de l’OCDE. Votre réplique?

C’est une simple affirmation. L’OCDE précise le mode d’emploi pour la mise en œuvre de la réforme. L’organisation contrôlera cette mise en œuvre, ce que je trouve personnellement un peu inélégant, soit dit en passant. Le contrôle s’applique donc. De ce point de vue, il n’y a pas d’échappatoire possible.

>> Un non à l’impôt minimum de l’OCDE doit permettre d’élaborer une version plus juste de ce projet de loi, explique Fabian Molina:

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Traduit de l’allemand par Pierre-François Besson

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