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La fiscalité suisse va finir par fâcher vraiment l’Europe

Keystone

Micheline Calmy-Rey, cheffe de la diplomatie suisse, est attendue ce jeudi 26 février à Bruxelles. Mais plutôt que de célébrer la victoire du «oui» à la libre circulation des personnes, on risque surtout de reparler de fiscalité. Un sujet qui n'en finit pas de fâcher.

La ministre suisse des Affaires étrangères devra avant tout s’employer à limiter les dégâts provoqués par l’affaire UBS et, surtout, la poursuite de la polémique sur la fiscalité cantonale des entreprises. En effet, le spectre de mesures de représailles communautaires refait surface.

La Commission européenne a informé vendredi le «groupe AELE» de l’Union, qui regroupe des diplomates des Vingt-Sept, des résultats des discussions qu’elle a eues avec Berne sur la fiscalité cantonale le 13 février. Elle en a dressé un bilan négatif, témoigne un expert.

Propositions insuffisantes

Ce jour-là, Alexander Karrer, le chef de la délégation suisse, a remis à la Commission un document résumant, en deux petites pages, les mesures que le gouvernement se déclare prêt à promouvoir – la décision finale appartiendra au Parlement, voire au peuple, précise-t-il – dans le cadre d’une «réforme autonome» de la législation suisse sur l’imposition des entreprises.

Berne, souligne ce papier, suggère d’abolir le régime des sociétés boîtes aux lettres (la moitié des 20’000 entreprises qui bénéficient, en Suisse, d’un régime fiscal «spécial» seraient concernées), d’interdire aux holdings d’exercer une quelconque activité commerciale, en Suisse ou à l’étranger et d’empêcher les sociétés mixtes (qui devraient changer de nom) à faire du commerce en Suisse – elles ne seraient plus autorisées qu’à remplir un rôle d’agent entre un vendeur et un acheteur localisés à l’étranger.

Pour la Commission, ces propositions sont «nettement insuffisantes». Certes, elles permettraient d’éliminer certains avantages dont bénéficient actuellement ces sociétés, qui selon l’Union représentent des aides d’Etat qui violent l’accord de libre-échange que la Suisse et l’UE ont conclu en 1972. Mais elles ne répondent pas à toutes les préoccupations que Bruxelles avait déjà formulées le 12 janvier, dans une lettre adresse à Alexander Karrer.

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Un traitement préférentiel

Dans cette missive, la Commission souligne entre autres que les holdings pourront toujours remplir des fonctions de «quartier général auxiliaire», ce qui leur permettra de soustraire certains revenus (paiements intragroupe d’intérêts et de redevances, droits de licences, rémunérations liées à la gestion de trésorerie, etc.) à toute imposition cantonale.

Pour Bruxelles, les holdings continueront donc à bénéficier d’un «traitement préférentiel» et «d’avantages sélectifs» inacceptables, par rapport à d’autres sociétés établies en Suisse.

La commissaire européenne aux relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner, abordera de long en large ce problème jeudi, lorsqu’elle recevra Micheline Calmy-Rey, a annoncé vendredi la Commission, en insistant par ailleurs auprès des Vingt-Sept afin que soit respecté le principe du parallélisme. En clair, si la Suisse veut conclure de nouveaux accords bilatéraux avec l’UE, elle devra sérieusement se soucier des intérêts des Européens.

Des sanctions?

En campant sur ses positions, Berne, qui refuse d’abolir les régimes fiscaux incriminés, risque d’envenimer le débat.

De bonne source, on a en effet appris que la Commission «réfléchit» à certaines mesures de représailles qui pourraient être adoptées à l’encontre de la Suisse.

Trois types de sanctions sont envisagés, note-t-on: une application pure et dure de la doctrine du parallélisme, la suppression de certains avantages octroyés aux entreprises helvétiques par le biais des conventions bilatérales prévenant la double imposition, et la réintroduction de droits de douane à la réexportation vers l’UE de produits d’origine communautaire.

swissinfo, Tanguy Verhoosel à Bruxelles

Privilèges. Le conflit entre Berne et Bruxelles tourne autour des régimes fiscaux de certains cantons suisses. L’UE dénonce les privilèges qu’ils accordent.

Déloyauté. L’UE juge déloyale et contraire à l’Accord de libre-échange de 1972 l’imposition des sociétés étrangères à Zoug, Schwyz et Obwald, entre autres.

Position suisse. Berne estime que les procédures de taxation des entreprises d’administrations, de sociétés mixtes et des holdings sortent du champ d’application de l’Accord de libre-échange de 1972. Cet accord concerne uniquement le commerce de certains biens (produits agricoles transformés et industriels).

OCDE. De son côté, l’Organisation de coopération et de développement économique ne voit rien à redire aux régimes fiscaux des cantons suisses.

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