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La guerre en Ukraine divise les mouvements pacifistes

Manifestation pour la paix en Suisse
Manifestation contre l'intervention militaire russe en Ukraine dans les rues de Berne, le 2 avril dernier. Keystone / Peter Klaunzer

Les mouvements pacifistes en Suisse ne souhaitent naturellement rien d’autre que la paix pour l’Ukraine. Mais les avis divergent parfois fortement sur la manière d’y parvenir.

Le Mouvement suisse pour la paix (SFBLien externe) est une organisation plutôt petite. Pourtant, c’est précisément dans ses rangs que semble s’être déclenché un débat sur ce que signifie réellement s’engager pour la paix.

Contrairement à d’autres mouvements pacifistes, le SFB s’oppose non seulement à la livraison d’armes à l’Ukraine, mais il considère également que les sanctions contre la Russie ne sont pas la bonne solution. «Plus d’armes ne mènent pas à une victoire rapide, mais ne font que prolonger la souffrance des deux côtés», explique son secrétaire Tarek Idri.

Les sanctions ne sont, selon lui, pas non plus un moyen efficace de parvenir à la paix. De telles mesures de coercition unilatérales sont contraires au droit international et incompatibles avec le principe de neutralité en vigueur en Suisse. «Il est peu probable que la Suisse continue d’entrer en ligne de compte comme médiateur pour la Russie», fait remarquer Tarek Idri. Mais ce dernier critique surtout le fait que «ce sont toujours les couches les plus pauvres de la population qui sont touchées par les sanctions». Et dans le cas présent, cela ne vaut pas seulement pour la population russe, mais aussi pour celle de nombreux autres pays.

En raison de cette position, le mouvement est actuellement confronté à des vents contraires. Pour autant, la cohésion et la motivation ont nettement augmenté au cours des dernières semaines, déclare Tarek Idri. Certes, le nombre de membres se situe toujours autour de quelques centaines, mais le désir de s’engager activement pour la paix est beaucoup plus perceptible, note le secrétaire.

«Pour nous tous, l’objectif premier est la désescalade, indique le secrétaire du SFB. Elle ne peut toutefois être atteinte que par un cessez-le-feu et des négociations.» Des armes lourdes et des sanctions ne feraient qu’attiser le feu. «La paix et la sécurité en Europe ne peuvent réussir qu’avec – et non contre – la Russie», estime Tarek Idri.

Le fait que d’autres organisations pacifistes aient si naturellement soutenu la livraison d’armes lourdes dans cette guerre est pour lui problématique: «Nous souhaitons bien sûr continuer à collaborer avec ces organisations – mais cette attitude nous déconcerte».

Contenu externe

Deux visions

Ces propos visent en premier lieu le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsALien externe), qui est de loin la plus grande organisation pacifiste de Suisse avec ses quelque 24’000 membres et sympathisants.

Pour sa secrétaire Anja Gada, il n’est pas contradictoire que des membres se prononcent aussi clairement en faveur de la livraison d’armes à l’Ukraine. Il y a en effet toujours eu au sein du GSsA des positions différentes sur cette question. Pour les uns, toute violence doit être par principe rejetée, tandis que pour les autres, ce sont les circonstances qui sont déterminantes.

En cas d’attaque directe, le droit à l’autodéfense doit aussi être reconnu. «Nous nous concentrons sur la prévention, explique Anja Gada. Nous essayons d’abord de faire en sorte qu’il n’y ait pas d’escalade.» En revanche, lorsqu’un conflit est déjà bien engagé, comme c’est le cas actuellement dans cette guerre d’agression en Ukraine, la situation de départ est différente, argumente la secrétaire.

Pour le GSsA, il est clair que la Suisse doit soutenir les sanctions occidentales contre la Russie. «Les négociations diplomatiques sont précieuses et importantes, souligne Anja Gada, dont l’organisation a gagné plusieurs centaines de membres au cours des derniers mois, dont de nombreux jeunes. Mais la Suisse ne doit pas se cacher derrière son rôle de médiatrice». Ne rien faire dans le conflit actuel viole tout autant le principe de neutralité du pays, juge-t-elle.

La secrétaire du GSsA demande que la Suisse, en tant que place financière et plaque tournante du négoce des matières premières, se montre beaucoup plus ferme envers les entreprises et les oligarques russes. La responsabilité est bien trop souvent reportée sur les cantons lorsqu’il s’agit de geler des placements ou d’empêcher des transactions. Or, ce sont précisément ces fonds qui financent la guerre actuelle. «C’est le plus grand et le plus important levier dont dispose la Suisse pour contribuer à la paix en Ukraine», estime Anja Gada.

En même temps, cette dernière critique le fait que les partis bourgeois instrumentalisent la peur de la population pour faire avancer des projets de réarmement en Suisse, comme l’achat d’avions de combat F-35. Selon la secrétaire du GSsA, même la rhétorique du Conseil fédéral a changé dans le sillage de cette guerre. L’avion de combat promet une sécurité illusoire, alors que la situation sécuritaire en Suisse n’a pas changé depuis la guerre d’agression menée par la Russie. Si les troupes russes traversaient tout à coup les territoires de l’OTAN, nous devrions faire face à une guerre nucléaire mondiale. «Dans ce cas, même trois douzaines de nouveaux avions de combat ne nous seraient plus d’une grande utilité», argumente-t-elle.

Traduction de l’allemand: Olivier Pauchard

(Traduction de l’allemand: Olivier Pauchard)

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