Le Forum humanitaire mondial en phase test
Lancé par la Suisse fin 2007, le «Global Humanitarian Forum» doit encore convaincre les acteurs de l'action humanitaire. Son nouveau directeur Walter Fust dévoile les contours de sa stratégie pour imposer l'ONG présidée par Kofi Annan. Interview.
La toute première conférence du Forum humanitaire mondial doit se tenir les 24 et 25 juin prochain sur le thème de l’impact humain du changement climatique. Les résultats de cette conférence devraient permettre de stopper le vent de scepticisme qui s’est levé à la naissance de cette ONG présidée par l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan.
Fort de sa longue expérience à la tête de l’agence helvétique de coopération (DDC), Walter Fust a accepté de diriger le Forum et de lui trouver une place reconnue parmi les nombreux acteurs de l’humanitaire présents à Genève.
swissinfo: Ce forum a-t-il fait l’objet de consultations avant d’être lancé?
Walter Fust: L’idée du forum est née d’une étude faite il y a plus de deux ans sur les contours de l’action humanitaire à Genève en 2015. Sous la haute autorité de Kofi Annan et d’un conseil d’administration très bien composé, nous devons prouver que nous sommes capables d’apporter une valeur ajoutée.
swissinfo: Ce forum semble susciter des résistances…
W. F.: Je ne vois pas de résistances. En revanche des gens ou des institutions ont encore des doutes quant à sa nécessité. Ce que je comprends bien, vu qu’ils ne connaissent pas encore la stratégie de ce forum.
Le forum n’est ni un acteur opérationnel ni un centre de recherche ou un think tank de plus. Il entend développer les capacités d’aborder les défis de l’humanitaire de demain. Et ce en réunissant des personnes expérimentées et capables de penser aux solutions.
Le forum a également l’avantage de pouvoir aborder des questions et des thèmes que le système onusien ou le mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ne peuvent toucher, que se soit pour des raisons politiques ou autres.
Le forum a aussi pour tâche de faire un lobbying très ciblé auprès des décideurs.
swissinfo: Mais quelle est la différence avec un think tank?
W. F.: Il y a 5080 think tanks dans le monde. Nous ne voulons pas en créer un nouveau. Nous allons d’ailleurs avoir prochainement une réunion avec une quinzaine d’entre eux pour voir comment ils peuvent nous aider à élaborer et sélectionner les processus menant à des solutions.
Mais nous n’allons pas apporter des solutions toutes faites. Nous voulons déblayer le terrain, présenter les différentes options, approfondir certaines questions ou alors venir avec des thèmes que les autres acteurs de l’humanitaire n’ont pas encore abordés.
swissinfo: Votre première réunion a pour thème l’impact humain du réchauffement climatique. Quels sont vos objectifs?
W.F.: Suite à une analyse de différentes conférences sur ce sujet, une chose n’est toujours pas assurée: le principe du pollueur-payeur.
Si nous voulons arriver à un nouveau régime climatique et faire en sorte que toute cette politique climatique fasse partie d’un développement durable, nous devons empoigner cette question de justice climatique. Un thème qui sera difficile pour certains parlements, en particulier dans les pays industrialisés.
Mais ça n’est pas tout. Nous aurons toute une série d’ateliers et de tables rondes sur la sécurité alimentaire, la planification urbaine ou la problématique de l’énergie. Une question écartée des Objectifs du Millénaire (qui visent à réduire de moitié la pauvreté dans le monde d’ici 2015), alors que sans énergie, il n’y a pas de développement.
Sur la base des réflexions de ces tables rondes, nous choisirons les points que nous allons approfondir et les processus de décision pour lesquels nous ferons du lobbying.
Nous prévoyons également d’aller auprès de communautés très touchées par le changement climatique et de récolter des idées lancées par les populations de ces régions, tout en réfléchissant à de nouvelles voies pour soutenir ces populations.
Interview swissinfo: Frédéric Burnand, Genève
Doté d’un budget initial de 1,3 million de francs suisses, le Forum a obtenu cette année 2,3 millions de francs de la Suisse, du Luxembourg et du Lichtenstein. L’Allemagne met à disposition un collaborateur.
Selon Walter Fust, 7 autres pays ont montré leur intérêt à financer le Forum, tout comme des entreprises privées.
Le Forum vise à moyen terme un budget annuel de 4 millions de francs suisses.
En conformité avec les normes du JTI
Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative
Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !
Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.