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Le sommet de la FAO laisse des questions sans réponse

Le directeur général de la FAO Jacques Diouf a rencontré les médias à l'issue du sommet de Rome. Keystone

Les 181 délégués du sommet de l'ONU ont tenté de trouver des solutions à la crise alimentaire mondiale, mais le dialogue avec la société civile n'a eu que de maigres résultats à Rome.

Après trois jours de débats et de divergences, les délégués de l’Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture se sont mis d’accord péniblement sur une déclaration minimaliste pour répondre à la flambée des prix alimentaires et encourager les investissements dans l’agriculture.

La déclaration finale, sans engagements concrets, appelle à une augmentation de la production alimentaire, une levée des restrictions commerciales sur les produits agricoles (tarifs douaniers, etc.), sans se prononcer sur la question des biocarburants ni des subventions agricoles.

Les organisations non gouvernementales suisses ont vivement critiqué ces maigres résultats. «C’est se moquer des millions de gens qui souffrent de la faim», a notamment déclaré Rosmarie Bär, d’Alliance Sud, le collectif des oeuvres suisses d’entraide. «Les gouvernements ont certes reconnu les causes de la crise mais cela ne la résoud en rien.»

Ambiguïté

Manfred Bötsch, directeur de l’Office fédéral de l’agriculture et délégué à la conférence, a indiqué qu’il espérait que la résolution serait appliquée. Il s’est également dit déçu de voir rejeter la proposition de la Suisse et d’autres pays de définir des normes internationales en matière de biocarburants. De même, il a regretté que les délégués n’aient pu se mettre d’accord sur la question des subventions agricoles.

«Cela prend toujours du temps pour appliquer les décisions, a-t-il déclaré, mais pour ce qui est des biocarburants, je suis convaincu que nous serons obligés d’établir des indicateurs afin d’affirmer clairement que ces produits doivent être développés de manière écologique et sociale.»

De son côté, l’Union suisse des paysans a réagi en déclarant que la résolution finale «ne dit rien des réformes dont la politique agricole a un urgent besoin».

Pas un mot sur la spéculation

«Il n’y a pas un mot sur le problème de la spéculation», a regretté Manfred Bötsch, avant d’ajouter que les délégués n’ont pas réussi non plus à se prononcer clairement sur l’agriculture des pays en voie de développement.

La cause de la flambée des prix est imputée principalement à la spéculation sur les denrées alimentaires et la croissance de la consommation de viande et de produits laitiers par la population des pays émergents d’Asie. D’autre part, l’augmentation du prix de l’essence fait également augmenter celui des fertilisants, des véhicules agricoles et du transport des produits agricoles.

Des gouvernements asiatiques ont limité les exportations de riz, ce qui a été critiqué comme contribuant à la hausse des prix. Le Japon, dont l’agriculture est lourdement subventionnée et suffit à la demande domestique, n’en a pas moins stocké 2 millions de tonnes de riz, dont une bonne partie est importée des pays voisins ainsi que des Etats-Unis.

De son côté, le rapporteur de l’ONU sur le droit à l’alimentation Olivier de Schutter a indiqué qu’il faut aussi traiter du problème posé par l’existence de quelques grandes firmes qui dictent leurs conditions à 500 millions de petits paysans. «Le secteur privé a un rôle important à jouer pour résoudre la crise», a ajouté M. de Schutter.

Querelle de marchands de tapis

L’accord de Rome devra être rapidement appliqué dans les 181 pays concernés pour avoir un impact sur les quelques 850 millions de personnes sous-alimentées que compte la planète, et dont le nombre augmente rapidement, ont indiqué les responsables de l’ONU.

Le secrétaire général Ban Ki-moon a estimé en ouverture du sommet que la production alimentaire mondiale devait augmenter de 50% d’ici 2030 pour faire face à la crise actuelle.

De son côté, le directeur de la FAO Jacques Diouf s’est défendu d’avoir «pris correctement la mesure du problème de la faim dans le monde».

Le texte final se prononce également pour la fourniture de semences et d’engrais aux petits producteurs et la levée des restrictions sur la circulation des biens agricoles. L’Argentine a regretté que la déclaration finale ne mentionne pas le rôle des subventions agricoles accordées notamment par les Etats-Unis et l’Union européenne, qui jouent selon Buenos Aires un rôle majeur dans l’augmentation des prix alimentaires.

Les observateurs présents ont déclaré que les 12 heures de débat qu’il a fallu pour accoucher de cette résolution décevante avaient tout d’une querelle de marchands de tapis.

«C’est normal, quand 180 Etats abordent pour la première fois un thème aussi difficile, qu’ils n’arrivent pas à s’entendre tout de suite et que la discussion prenne des aspects politiques qui sortent parfois du sujet», commente Manfred Bötsch.

Le débat de Rome devrait toutefois contribuer à donner une nouvelle impulsion pour la conclusion du cycle de Doha au sein de l’Organisation mondiale du commerce.

swissinfo, Justin Häne
(Traduction de l’anglais: Isabelle Eichenberger)

En 2007, les céréales ont augmenté de 130%, le soja de 87% et le maïs de 31%.

Selon l’organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le prix du riz a augmenté de 70% durant la même période.

Des émeutes de la faim et des manifestations ont éclaté au Burkina Faso, au Cameroun, en Egypte, en Ethiopie, en Haïti, en Indonésie, en Côte d’Ivoire, au Niger et aux Philippines.

En 2007, l’impact sur les prix de la fabrication d’éthanol à base de maïs a fait descendre dans la rue des dizaines de milliers de Mexicains.

La population mondiale a augmenté de 2,5 milliards de personnes en 1950 à 6,1 milliards en 2000. Elle devrait atteindre 9,2 milliards en 2050.

Selon l’ONU, il faudrait 20,8 milliards de francs par an pour combattre efficacement la faim.

Il y a quatre ans, 10 à 15 milliards ont été investis dans des fonds de placement de produits agricoles, actuellement, ce sont plus de 150 milliards.

En 2003, l’ONU a publié un rapport selon lequel 16’000 litres d’eau sont nécessaires pour produire un kilo de viande de bœuf, plus de 5000 litres pour un kilo de fromage et 1000 à 2000 litres pour un kilo de céréales.

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