Les insignes colorés de la solidarité ont 60 ans
Depuis sa création il y a 60 ans, l'ONG Swissaid vend chaque année des figurines en bois et autres poupées en tissu pour financer ses projets. Autrefois fabriqués en Suisse, ces insignes qui symbolisent la solidarité aux yeux des Suisses le sont aujourd'hui en Inde.
En 2008, ce sont de petits animaux de tissu remplis de sable qui ont véhiculé les couleurs de l’espoir pour Swissaid. Cousus à la main en Inde, ils illustrent la manière pragmatique dont cette ONG suisse conçoit la solidarité depuis sa création en 1948.
Fondée dans l’Europe sinistrée de l’après-guerre pour venir en aide aux populations réfugiées, l’œuvre d’entraide helvétique a dès ses débuts mis sur pied une vente annuelle d’insignes pour étoffer ses récoltes de fonds.
Au départ, c’est son logo – quatre cœurs imbriqués représentant une croix suisse – qui a servi de modèle à l’épinglette métallique vendue dans tout le pays au nom de la solidarité avec les victimes de la guerre.
Mais, dès le milieu des années 60, Swissaid réoriente son action vers les pays du Sud. Ses insignes prennent du coup une apparence plus chatoyante. Broches ornées de motifs, de chapeaux, corbeilles miniatures, poupées gigognes ou boîtes de métal émaillé, tous les objets sont désormais produits dans les pays où l’ONG mène des projets de développement.
Salaires équitables
Chargée de la vente des insignes chez Swissaid, Theres Berner indique que cette manière de collecter des fonds rapporte aujourd’hui à l’ONG environ 15% de ses revenus annuels, soit près de 1,2 million l’an dernier.
Vendus 5 francs pièce, traditionnellement au début de la nouvelle année, les insignes sont toujours produits de manière artisanale. Un défi lorsqu’il s’agit de fabriquer les quelque 300’000 à 350’000 pièces écoulées en Suisse.
Les petits animaux remplis de sable du 60ème anniversaire ont par exemple vu le jour en Inde, près de Dehli. Cousus à la main par les membres d’une association de femmes, ils ont permis d’assurer un revenu à près de 200 familles durant plus d’une année.
«Swissaid paie des salaires équitables, c’est-à-dire 300 roupies par semaine pour quelqu’un qui n’a pas fait d’apprentissage et le double si la personne a fait un apprentissage. Sur place, on a un maître artisan qui montre aux employés comment fabriquer les pièces», explique Theres Berner.
Dimension écologique
Privilégiant le travail avec les populations locales, Swissaid s’appuie chaque fois qu’elle le peut sur leur savoir-faire. Quant à ses bureaux de coordination, ils sont également dirigés par des cadres autochtones, qui seront en Suisse entre le 7 et le 17 octobre à l’occasion des 60 ans de l’ONG.
Pour les insignes 2009, c’est également l’Inde que Swissaid a choisie. Là aussi, son projet a permis de procurer un revenu équitable à 200 artisans. Misant une fois encore sur le secours du monde animalier, qui a toujours beaucoup de succès selon Therer Berner, l’ONG a fait fabriquer des petites figurines d’animaux d’ici et d’ailleurs.
Peintes à la main, elles ont été taillées dans un bois issu de forêts cultives selon les principes du développement durable. Un aspect important pour Swissaid, qui se montre attentive à la dimension écologique de ses projets. Engagée pour une agriculture durable et soucieuse de la biodiversité, elle a par exemple réclamé récemment un moratoire international contre les agrocarburants.
Aspect pédagogique
Autre priorité pour l’ONG, mettre l’accent sur l’action individuelle, que ce soit dans les pays concernés ou en Suisse. Ainsi, le fait que les insignes soient vendus par des écoliers suisses correspond à la philosophie de Swissaid.
Assurée par près de 30’000 enfants, la vente a en outre un aspect pédagogique puisqu’elle constitue souvent pour eux un premier contact avec la problématique de la pauvreté et du développement.
«Les insignes sont livrés avec un film dans lequel on voit la vie en Inde et les conditions de travail là-bas. Un projet Swissaid y est également expliqué», relève Theres Berner.
Elle déplore néanmoins que le nombre de classes qui participent à la vente ait tendance à fondre ces dernières années. Non par manque d’intérêt des maîtres, lesquels se montrent toujours ouverts à la démarche, mais parce que le nombre d’écoliers recule et que les classes fusionnent.
Quant aux parent qui expriment des craintes à l’idée de voir leur progéniture parcourir les rues pour vendre les insignes, Theres Berner tient à les rassurer: «Pour les enfants, c’est souvent une première occasion de faire quelque chose dans le domaine de la coopération et surtout de vivre la solidarité concrètement. C’est très important».
swissinfo, Carole Wälti
Swissaid a vu le jour le 1er juillet 1948.
L’organisation se nommait alors Aide suisse à l’Europe.
Elle avait pour but de venir en aide aux habitants des pays dévastés par la guerre (Allemagne, Autriche, Sicile) réfugiés en Suisse.
En 1956, l’Aide suisse à l’Europe décide de mener des actions également hors du Vieux-Continent.
Elle devient l’Aide suisse à l’étranger et mène des projets de coopération en Tunisie, en Algérie, en Inde, au Tchad.
En 1968, elle devient Swissaid.
En 1983, Swissaid devient une fondation. Elle ouvre un bureau à Lausanne un an plus tard.
Lors de son cinquantenaire en 1998, Swissaid part en tournée dans 18 villes suisses avec son Palais du monde.
Dans le domaine de la coopération au développement, Swissaid se distingue par sa manière de travailler.
Elle concentre son action sur un nombre limité de pays, actuellement 9 (Inde, Birmanie, Tanzanie, Niger, Tchad, Guinée-Bissau, Nicaragua, Equateur et Colombie).
Elle n’envoie par ailleurs pas de délégués dans les pays du Sud, mais privilégie les forces de travail disponibles sur place.
Environ 78 personnes travaillent pour Swissaid dans le monde, dont 29 à Berne et à Lausanne.
En 2007, Swissaid a investi 11,6 millions de francs dans ses programmes pour des dépenses totales de 18,3 millions.
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