Les partis n’oublient pas les Suisses de l’étranger
Alors qu’aucun expatrié n’a jamais siégé aux Chambres fédérales, les partis politiques appliquent diverses stratégies envers la Cinquième Suisse. Après tout, ils sont dans les 140'000 inscrits sur les registres électoraux. Dans la perspective des législatives du 18 octobre, la presse latine de Suisse s’est emparée du sujet.
«Draguer», «courtiser», «faire du gringue», «cibler» et autres synonymes font les titres de la presse francophone et italophone de ce vendredi à propos des efforts des divers partis politiques pour s’attirer les suffrages des Suisses de l’étranger. «La Regione Ticino» consacre sa une à «la chasse au vote ‘étranger’», alors que le «Corriere del Ticino» avec «Il Giornale del Popolo» évoquent «des candidats extra-muros à la charge».
Après tout, les quelque 140’000 citoyens inscrits sur les registres électoraux équivalent à un canton comme Neuchâtel. «Le Temps» rappelle que c’est dix fois plus qu’en 1992, lors de l’introduction du vote par correspondance. Et d’ajouter que «ceux-ci, encouragés par les réseaux sociaux et le développement du vote électronique, praticable dans 13 cantons, sont toujours plus nombreux à vouloir apporter leur contribution à leur pays».
Le PS dans les trois régions linguistiques…
Le Parti socialiste (PS) a présenté jeudi sa plateforme internationale, montrant qu’il entend aussi se battre pour assurer à la Cinquième Suisse une représentation politique au Parlement. «Le PS est prêt à frapper fort, relève ‘La Tribune de Genève’. Il en veut pour preuve le fait qu’il a demandé à plusieurs reprises de créer une circonscription pour les Suisses de l’étranger».
Comment ça marche
Alors qu’ils n’étaient que 14’000 inscrits sur les listes électorales en 1992, lors de l’introduction du vote par correspondance, le nombre d’électeurs suisses de l’étranger atteint aujourd’hui 140’000.
Théoriquement, il est possible à tout expatrié de se présenter à l’élection de la Chambre du Peuple (Conseil national) via le canton où il est enregistré. Pour la Chambre des cantons (Conseil des Etats), cette possibilité n’était prévue en 2011 que dans 11 cantons sur 26.
Dans un avis de droit publié en mars 2014, la Chancellerie fédérale a estimé qu’il n’était pas possible à la Confédération d’obliger tous les cantons à offrir ce droit.
Une autre option consiste à créer une représentation directe au Parlement de ses expatriés, à l’instar de la France, de l’Italie ou du Portugal.
L’idée de créer une circonscription électorale, soit un 27e canton, avait été proposé via une initiative parlementaire socialiste rejetée en 2009.
(Source: ATS)
Le quotidien genevois poursuit: «Le PS caresse l’espoir d’entrer dans l’Histoire en faisant élire sous la coupole le premier Suisse de l’étranger: Tim Guldimann, ancien ambassadeur en Allemagne et en Iran, aujourd’hui retraité à Berlin». Celui-ci figure en 10e position sur la liste «ordinaire» du PS à Zurich. Par ailleurs, le parti présente 13 autres candidats sur sa liste «internationale» dans les cantons de Schaffhouse, Genève et Tessin, soit les trois régions linguistiques.
…mais aussi l’UDC
Cet investissement stratégique, appliqué aussi par l’Union démocratique du centre (UDC, droite conservatrice) et les Verts, n’est pas surprenant, au vu des résultats des votes des Suisses de l’étranger lors des dernières élections fédérales en 2011, qui avaient profité avant tout à ces trois partis.
En effet, l’UDC International entre elle aussi en force cette année avec 35 candidats présentés dans 10 cantons. L’un d’entre eux figure même sur la liste principale de l’UDC à Saint-Gall. Les Verts, eux, se concentrent sur une seule liste internationale dans le canton de Genève, avec 25 candidats vivant en France voisine.
Quant au Parti libéral-radical (PLR / droite) International, il n’a qu’un seul candidat vivant hors des frontières et préfère miser sur des candidats locaux ayant accepté de défendre les intérêts de la Cinquième Suisse s’ils sont élus à Berne. Le Parti démocrate-chrétien (PDC / centre-droit), enfin, ne compte lui aussi qu’un seul candidat expatrié qui se lance dans le canton de Berne.
Les voix expatriées sont bonnes à grappiller
«Le Temps» rappelle que les expatriés ont des soucis qui pourraient bien s’exprimer dans les urnes: «Les mesures discriminatoires, comme des surtaxes ou la fermeture de comptes, prises par les banques suisses, mettent les expatriés en colère, notamment la décision de PostFinance de résilier les contrats de leurs cartes de crédit, mais aussi les économies dans le réseau consulaire».
«La Liberté» se montre toutefois réaliste: «Quel que soit l’effort consenti, le même constat s’impose à tous: jamais un Suisse de l’étranger n’a réussi à se faire élire au Conseil national. Sans parler du Conseil des Etats où c’est d’emblée mission impossible, d’autant que les règles de candidature diffèrent d’un canton à l’autre. Lors des dernières élections, en 2011, les représentants de la Cinquième Suisse n’ont obtenu que quelques centaines de voix chacun sur des listes apparentées».
On conclura que, si les chances d’être élus pour les Suisses de l’étranger sont maigres, l’opération peut néanmoins se justifier puisqu’elle permet aux partis de grappiller des voix supplémentaires.
En conformité avec les normes du JTI
Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative
Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !
Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.